Serena & Chuck

Il s’était écoulé trois bonnes semaines depuis le désastre du 4 Juillet. Chuck n’avait probablement jamais autant regretté d’avoir reçu des invitations de toute sa vie. Il avait prévu de passer une bonne soirée avec Serena, de s’amuser, de rattraper un peu le temps perdu et qui sait… Seulement tout était allé de travers, dès le début ils avaient été dérangés par Nathanaël – et Chuck ne pouvait toujours pas penser à lui sans sentir ses poings et sa mâchoire se serrer automatiquement – qui avait involontairement révélé à Chuck qu’il s’était tapé Serena. Serena avait fini par dire adieu à Chuck et ensuite, le bateau avait coulé. C’était une soirée bien réussie en somme. Le jeune homme avait terminé à l’hôpital pour faire examiner sa cheville qui l’avait fait souffrir après l’explosion et on lui avait vite appris qu’il s’était fait une entorse. Il en avait pour trois semaines de béquilles, super. Heureusement que son boulot ne nécessitait que peu de déplacements en ce moment, il avait réussi à négocier avec son père pour effectuer une partie de son travail directement depuis sa chambre d’hôtel. Au final, il ne se déplaçait plus que pour les réunions, ce qui n’était pas fait pour lui déplaire. Il avait bien besoin d’air, de solitude, et surtout d’éloignement par rapport à son père. Après tout ce qui s’était passé, il n’était pas d’humeur à entendre les sermons de son paternel, ses inquiétudes pour son fils et encore moins son enthousiasme à propos d’Hesther. Hesther, d’ailleurs, Chuck n’avait pas encore cherché à la revoir, il s’en voulait toujours de l’avoir mise dans une situation aussi tordue, surtout depuis qu’il avait appris que Nathanaël l’avait mise enceinte. Il soupira à nouveau et alla prendre une douche, laissant ses béquilles près de son lit.

Cela faisait quelques jours qu’il avait recommencé à marcher sans ses béquilles, mais sa cheville lui paraissant encore un peu faible sous son poids, il avait préféré ne pas tenter le diable et s’était accordé quelques jours de plus d’exil dans sa chambre d’hôtel. Il avait contacté un kinésithérapeute et avait commencé les sessions pour remuscler sa cheville. Il laissa l’eau brûlante couler sur sa peau et essaya de se détendre. Il savait qu’il lui en faudrait plus que ça pour se détendre, mais ça valait toujours le coup de tenter. Une serviette autour de la taille, il alla ensuite vérifier ses messages sur son téléphone portable. Rien. Il n’avait toujours pas eu de nouvelles de Serena. Il lui avait laissé quelques messages et elle ne l’avait pas rappelé. Il reposa son téléphone sur la table de nuit et alla s’habiller. Puisque la montagne ne voulait pas venir à Mohamed… Il avait discuté avec Anastasia après la catastrophe sur le bateau et après s’être donné des nouvelles, il avait appris à quel point Serena avait souffert de son départ. En plus de ça, elle lui avait également expliqué que l’une de ses amies venait de se suicider. Chuck était incapable de rester loin d’elle après avoir appris ça, il savait qu’il ne rendait service à personne en allant la voir, et très certainement pas à elle, mais il ne pouvait pas s’en empêcher. Il ne pensait plus qu’à ça, il était incapable d’enlever la jeune femme de son esprit et au point où il en était, il n’avait plus grand-chose à perdre à aller la voir. A part la vie bien sûr, si jamais les parents de la jeune femme venaient à l’apprendre. Enfin, rien que de penser à l’état dans lequel devait être Serena… Il était incapable de rester ici les bras croisés, c’était plus fort que lui, il fallait qu’il aille la voir, qu’il essaye de la réconforter, n’importe quoi. Mais il ne supportait pas de savoir qu’elle souffrait et qu’il ne pouvait rien faire pour l’aider à aller mieux.

Il enfila un pantalon de costume, plus par habitude qu’autre chose, ainsi qu’une chemise bleue. Il fourra son portefeuille et ses clés dans ses poches avant de sortir. Il héla un taxi et lui donna une adresse au hasard dans le quartier où Serena habitait. Il ne tenait pas à se faire repérer dès qu’il aurait mis les pieds dans sa rue, non, malheureusement il allait en plus falloir qu’il utilise la ruse. Pendant tout le trajet il se demanda ce qui ne tournait pas rond chez lui, il repensa à tout ce que son père lui avait dit la dernière fois qu’ils s’étaient parlé, il revit – pour la centième fois – se dérouler devant ses yeux les derniers mots que Serena lui avaient dit, mais il n’y avait rien à faire. Rien de tout cela ne réussit à le convaincre qu’il faisait encore une énorme erreur et il effectua le trajet dans un silence absolu. Il paya finalement le chauffeur et descendit. Après quelques pas il se rendit bien compte qu’il aurait mieux fait d’attendre un peu plus avant de venir ici, mais il n’était pas venu ici pour repartir. Il marcha tranquillement jusqu’au pâté de maison de Serena et repéra sa maison. « T’es vraiment qu’un con. » Murmura-t-il plus pour lui-même qu’autre chose avant de contourner la maison de Serena. Il grimpa au-dessus de la porte du jardin et se faufila vers la fenêtre de la jeune femme. Il s’arrêta à côté et se prit la tête à deux mains. Mais c’est pas possible, t’as quel âge là ? Son père avait raison, il n’était pas aussi adulte qu’il aurait voulu le penser, voilà les extrémités auxquelles il se voyait réduit juste pour voir Serena. Qui d’ailleurs lui avait clairement fait comprendre qu’elle ne voulait plus le voir. Il était stupide, il allait rentrer chez lui, il n’aurait jamais du venir ici. Surtout que si les parents de Serena le voyaient ici, ils seraient bien capables de le poursuivre dans la rue torches et fourches à la main.

«The sun will rise.»
Chuck & Serena

Des cris affreux, de l’eau partout et Charlie. Elle était là sur le bateau, du sang coulait de sa tête mais tout le monde s’en fichait, elle était morte, Serena criait, il y avait trop d’eau, trop d’eau qui l’empêchait de respirer et elle mourrait, elle aussi. La jeune fille se réveilla en sursaut, des larmes coulant encore sur ses joues. Elle s’était encore endormie sur la banquette de la fenêtre, on était en pleine journée mais Serena n’avait plus aucune notion du temps, à rester cloitrée dans sa chambre, ses uniques déplacement se résumant du lit à la salle de bain à la banquette. C’était pire que la dernière fois, tout autour d’elle était affreusement noir, du moins de son point de vue. Ses frères et sœurs cherchaient à la réconforter, on la chouchoutait, plus que la dernière fois étant donné que cette fois-ci sa famille n’était pas responsable. Elle se ressassait tous les événements sans cesse dans sa tête, le bateau, les drames, l’explosion, le verre, et à son retour la nouvelle horrible qu’elle avait apprise : le suicide de Charlie. Elle en cauchemardait toute les nuits, Charlie avait été la personne qui avait su lui montrer qu’elle avait tout faux en se confortant dans la superficialité, ou plutôt la stupidité. Maintenant qu’elle était morte, c’était une partie d’elle-même qui l’était elle-aussi. Tout s’effondrait, comme d’habitude.

La brune regarda sa jambe platrée, elle n’en pouvait plus de rester assise comme ça, en permanence, mais après tout qu’est-ce qu’elle aurait pu faire de plus ? Elle jetta un coup d’œil à son portable, elle avait encore quelques appels et des messages vocaux venant de Chuck. Elle n’avait aucune envie de lui parler. Si c’était pour qu’il vienne la troubler et ensuite le dire pour la énième fois qu’il ne voulait pas d’elle non merci. Oui, il l’avait sauvé sur le bateau, et elle lui en était redevable mais non elle ne pouvait pas supporter de le voir tout en sachant qu’il ne voudrait pas la même chose qu’elle. Et puis, tout ça lui prenait la tête, elle en avait assez et malgré le fait qu’elle l’aime, bien plus que n’importe qui d’autre, excepté sa famille, elle avait envisagé l’idée de couper les ponts complètement avec lui. Après tout, il lui téléphonait simplement par politesse, il se fichait d’elle. Pour qui se prenait-il ? Jaloux, mais elle avait apprise l’aventure que celui-ci avait eu avec Hesther, et ce n’était pas loyal vraiment pas de sa part. Elle appuya sa tête contre le mur et regarda par la fenêtre, il faisait beau comme toujours mais le soleil lui faisait mal aux yeux.

Etrange silhouette qui se dessina tout à coup près de sa fenêtre, un homme en chemise et pantalon de costume… Chuck. Voilà qu’il se mettait à l’espionner maintenant ? Et les portes il ne connaissait pas ? Elle haussa les sourcils avant d’ouvrir la fenêtre. « Tu m’espionnes maintenant ? » , dit-elle d’un ton froid. Elle devait avoir mauvaise mine, mais de toute façon elle n’avait pas à faire d’efforts pour lui, la dernière fois qu’elle l’avait fait ca n’avait rien changé. Et puis elle se sentait à l’aise dans son ensemble de jogging gris du lycée et si ca ne lui plaisait pas ce n’était pas son problème. Elle regarda Chuck d’un air triste, il était toujours parfait, bien habillé, bien coiffé, un vrai gentleman, elle se sentait encore plus jeune qu’elle ne l’était quand elle se trouvait avec lui de toute façon. « Mes parents sont partis, mais Luisa et Esteban sont là. Alors puisque tu es là… grimpe. », laissa-t-elle tomber. Elle n’allait pas le laisser poirauter dehors, déjà qu’il prenait assez de risque. Une fois qu’il se trouvait dans sa chambre, elle entreprit de déplacer sa chambre et de la laisser poser sur une chaise en face d’elle, histoire de laisser une place à côté d’elle. Sa chambre était remplie de photos, qu’elle avait prise cette dernière année, elle avait retirée toutes celles avec Chuck, et partout elle pouvait voir celles prises avec Alty, April, Leo, Megane, même Hessy… et les photos de la remise de diplômes. Chuck le remarquerait surement, surtout qu’il était venu assez de fois ici. « Qu’est-ce que tu veux ? », demanda-t-elle. Serena l’avait fixé attendant sa réponse.

Chuck savait pertinemment qu’il était en train de faire une connerie et alors qu’il se trouvait enfin près de la fenêtre de Serena, il se mit en tête de repartir aussi sec, avant que quelqu’un ne le voit. Il était ridicule, qu’est-ce qu’il attendait de cette visite hein ? Il n’en savait trop rien lui-même. Il était assez arrogant pour penser qu’il aurait pu aider Serena, mais il allait falloir qu’il apprenne que si la jeune femme ne le voulait plus dans sa vie, c’était pour une bonne raison. Il savait qu’il avait tort de venir s’immiscer comme ça chez elle, surtout après ce qu’elle lui avait dit, mais ça avait vraiment été plus fort que lui. Enfin maintenant qu’il commençait à prendre pleinement conscience de ce qu’il avait fait, il n’avait plus qu’une seule idée en tête : repartir de là où il était venu. Serena n’apprécierait probablement pas le fait qu’il soit entré chez elle par effraction et pour le coup, il la comprenait entièrement. Au fond, son père avait raison, ce qu’il ressentait pour Serena ne lui avait rien apporté de bon depuis qu’il la connaissait, et ça continuait même à lui faire faire de belles conneries.

Le jeune homme se retourna brusquement en entendant la fenêtre s’ouvrir derrière lui. Et merde. Bon, pour le coup, c’était raté. Il sentit les battements de son cœur s’accélérer et croisa le regard de Serena. Il ne lui fallut pas beaucoup de temps pour remarquer qu’il avait eu raison de s’inquiéter. Il n’avait pas énormément revu Serena depuis qu’il était revenu à Détroit mais il pensait savoir encore faire la différence entre une Serena qui allait bien et une Serena qui déprimait totalement. Il baissa les yeux et préféra ne pas répondre à sa première question en tout cas. Il n’aurait jamais réussi à excuser ou à justifier sa présence ici, alors autant ne pas essayer. Il hocha la tête quand Serena lui expliqua que ses parents n’étaient pas là. Bon, ça ne lui donnait pas la liberté de se promener dans la maison comme bon lui semblait mais c’était déjà ça, il n’était pas prêt à affronter les parents de Serena aujourd’hui et il n’était pas venu pour ça. Il remarqua que la jeune femme lui laissait de la place pour qu’il vienne s’asseoir à côté d’elle et ne put s’empêcher de penser que c’était un bon signe. Déjà elle l’avait laissé entrer, alors qu’elle aurait très bien pu appeler son frère pour qu’il vienne lui en coller une. Elle aurait eu le droit, Chuck n’était même pas sûr qu’il aurait essayé de l’éviter tellement il savait qu’il était en tort. Il entra et jeta un coup d’œil autour de lui dans la chambre, elle avait changé depuis un an. Il n’était pas venu si souvent que ça ici, à cause des parents de Serena bien sûr, mais il avait gardé un souvenir assez vif de l’endroit. Des photos – celles avec lui majoritairement – avaient disparu mais il ne pouvait pas dire qu’il était surpris. Il s’approcha de l’une d’elles en particulier et reconnut immédiatement Hesther. Il laissa échapper un soupir discret et leva les yeux au ciel. Au point où il en était, et vu la chance qu’il avait depuis qu’il était revenu à Détroit, il aurait dû se douter qu’en plus de ça les deux jeunes femmes se connaitraient. Il décida de ne pas lancer le sujet, pas aujourd’hui, ce n’était pas pour ça qu’il était là. « Je suis désolé, je sais que je n’aurais pas du venir et je sais que tu n’as probablement aucune envie de me voir. » Il lança un demi-sourire à la jeune femme, debout en face d’elle, les mains dans les poches et essayant d’appuyer la majorité de son poids sur sa cheville intacte. Il ne portait plus de protection à sa cheville blessée, mais il la sentait encore faible, surtout avec les séances chez le kiné. Il ne voulait pas tenter le diable. « J’ai parlé à Ana. » Lança-t-il comme si ça justifiait complètement sa présence ici. Il passa rapidement sa langue sur ses lèvres. Il cherchait les mots justes pour parler à Serena, mais il n’arrivait pas à les trouver. Il opta finalement pour l’honnêteté. « Elle m’a dit ce que tu avais traversé… Ce que tu traverses toujours, et je… Je n’ai pas pu m’empêcher de venir. » Il baissa à nouveau les yeux, les mains toujours bien enfouies dans les poches. Lui qui était venu pour essayer de l’aider, il avait comme l’impression qu’il n’allait faire qu’empirer les choses. Enfin, maintenant qu’il était là, il n’allait pas en plus s’enfuir.

Il jeta un nouveau coup d’œil au plâtre sur la jambe de la jeune femme et se mordilla la lèvre. Il s’en était sorti un peu mieux qu’elle après la soirée sur le bateau, et même s’il avait réussi à l’aider ce soir-là, il ne pouvait pas s’empêcher de se sentir coupable en la voyant encore blessée. En même temps, c’était devenu une habitude chez lui de culpabiliser pour tout ce qui avait un rapport avec Serena, ça n’avait encore une fois rien de bien surprenant. « Je voulais juste voir comment tu allais. » Lâcha-t-il dans un soupir en relevant les yeux. Il désigna le plâtre de la jeune femme d’un bref signe de tête. « On ne devrait pas tarder à te l’enlever, non ? » Il ne s’était quasiment jamais senti aussi mal à l’aise qu’en ce moment même. Et plus les secondes passaient, plus il se demandait ce qui lui avait pris de venir ici. Il n’allait pas pouvoir réussir à aider Serena, non, encore une fois il n’avait pas pensé à elle, il avait juste écouté ses propres envies et tout ce qu’il allait réussir à faire, c’était empirer les choses. Il ne lui restait plus qu’à espérer que ça ferait du bien à Serena de lui crier un peu dessus, si c’était le prix à payer pour l’aider même un tout petit peu, il était heureux de se sacrifier.

Spoiler:

«The sun will rise.»
Chuck & Serena

Quand Chuck évoqua le fait qu’elle n’avait surement pas envie de le voir, Serena regarda le jeune homme, le visage toujours impassible. Elle le contemplait patauger dans la semoule et elle ne pu s’empêcher d’esquisser un sourire, plus par amusement qu’autre chose. Toujours en silence, elle l’écoutait lui dire qu’il avait parlé avec Anastasia, elle avait du tout lui raconter, décidemment personne ne gardait jamais rien pour soi dans cette ville. Mais dans tout cela, la jeune fille restait sceptique, parce que ce n’était pas parce que Chuck savait désormais qu’elle était tombée en dépression, que cela changerait. Pire, elle ne supportait pas l’idée qu’il puisse se sentir concerné par son état uniquement par pitié, ou encore par culpabilité. Il était hors de question qu’elle le laisse faire, lui et son visage angélique à qui n’importe qui donnerait le bon Dieu sans confession. Le laisser entrer à l’intérieur était sa manière à elle de montrer qu’elle ne voulait pas totalement le repousser, il ne méritait pas cela, elle lui avait attiré assez d’ennuis, mais elle lui en voulait, c’était assez confus dans sa tête. Après la phrase de Chuck, Serena releva la tête vers lui, avec un faible sourire, une pointe d’ironie dans la voix, « Comme tu peux le voir je me porte à merveille ! Et toi ? Je veux dire, ton mariage avec Hesther ca avance ? » Et voilà, et dire qu’elle s’était promis de ne pas mettre cela sur le tapis. Elle n’était pas le moins du monde en colère contre Hesther, pas du tout, parce qu’elle savait très bien ce qu’il s’était passé et qu’elles en avaient discutés. De plus, elles étaient… comment dire ? A parts égales entre Chuck et Nathanael. La vérité c’est qu’elle était en colère contre Chuck, parce qu’il avait osé l’accabler et lui faire une scène sur le bateau devant tout le monde, qu’elle s’en était rendue malade de culpabilité alors que lui avait fait la même chose avec Hesther pendant l’année. Sans compter qu’il ne lui ait pas dit de lui-même, qu’il ait fallut qu’elle l’apprenne par le biais de son amie.

«Hm. », laissa-t-elle échapper quand il lui parla de sa jambe. Oui dans environs cinq semaines, mais elle n’avait pas envie d’en parler. Même maintenant elle avait pour habitude de se ressasser le drame du bateau dans sa tête encore et encore. Elle pensa à toute ces personnes qui étaient mortes ce soir là, pourquoi eux ? Et pourquoi pas elle ? Certaines de ces personnes là avaient surement une vie déjà bien construite, avec une famille, des enfants. Alors que Serena elle, se contentait de rester là à vivre dans le luxe, se permettant d’emmerder tout le monde avec ses tendances dépressives. Capricieuse, egoiste, opportuniste, c’était ce qu’elle était. D’ailleurs, elle se demandait même pourquoi Chuck s’était intéressé à elle, la jeune gamine de seize ans avec ses converses et sa veste en jeans customisée. A y repenser Serena fronça les sourcils, parce que pour le première fois depuis un bout de temps elle repensa à Nolan qu’elle avait lâchement laissé tombé. Encore une preuve qu’elle était égoiste, qu’elle voulait tout mais ne pas en subir les conséquences. Et maintenant elle savait, elle savait à quel point cela faisait mal d’être abandonné par la personne qu’on aime, et elle s’en voulait à mourir, elle regrettait, tout, du début à la fin. Sa rencontre avec Chuck, ça non elle ne le regrettait pas, elle referait la même chose si cela avait été à refaire, seulement elle aurait réfléchit d’avantage, elle aurait évité d’agir en adolescente naive qu’elle était, faisant du mal à tout le monde sans s’en soucier.

Les larmes montèrent doucement aux yeux de Serena. Elle devenait de plus en plus émotive, elle pleurait pour tout, ne comprenait plus rien. Cachant tant bien que mal ses émotions, la jeune espagnole posa ses yeux humides sur la personne qui était l’amour de sa vie. « Est-ce que ca t’apportes de la satisfaction ? Est-ce que c’est un nouveau concept pour montrer que c'est toi qui décide ? » Partir, revenir et ce constamment, elle se demandait si Chuck n’en tirait pas une certaine valorisation, même si cela l’étonnerait mais elle n’était à présent plus sure de rien. « Je suis quoi pour toi ? Qu’est-ce que tu vois, là maintenant ? » Serena voulait savoir ce qu’il pensait d’elle, s’il la prenait en pitié, s’il voyait là une fille gâtée qui faisait son caprice, s’il la considérait comme un fardeau dont il n’arrivait pas à se débarrasser par culpabilité. Parce qu’elle le connaissait et elle savait que sa façon d’être lui interdisait de jouer au salaud, qu’il se montrerait gentil et soucieux avec elle pour seul but d’apaiser sa peine. Serena écarta quelques mèches de ses cheveux, au moins son aspect, avec sa mine fatiguée et ses cheveux ébouriffés, ne risquait pas de faire regretter à Chuck quoique ce soit.

Spoiler:

Chuck sentit son sang se glacer dans ses veines en entendant parler de Hesther. De Hesther et de mariage qui plus est. Il était foutu, il s’était raccroché au maigre espoir que Serena n’ait rien appris via Hesther, mais pour le coup c’était raté. Il ne savait pas encore si elle savait pour leur aventure, ou pour la petite comédie qu’elle avait accepté de jouer pour lui rendre service, ou encore les deux, mais il n’était pas sûr d’avoir envie de gaffer en lui posant la question. Il passa sa main dans ses cheveux et baissa timidement les yeux, sentant ses joues reprendre une teinte légèrement rouge. « Oui, j’ai vu que tu connaissais Hesther. » Il se tourna vers la photo où elle avait posé avec la jeune femme et se tourna à nouveau vers Serena. « Et non, pas encore de mariage de prévu. » Répondit-il, un maigre sourire aux lèvres et l’air toujours aussi gêné. « Il n’y a rien entre Hesther et moi si c’est ça que tu veux savoir. » Il ne savait pas pourquoi il se justifiait, peut-être parce qu’il avait conscience de ne pas avoir mal agit dans l’histoire et qu’il tenait à ce que Serena le sache, parce que l’opinion qu’elle avait de lui comptait encore et toujours. Enfin, il priait encore silencieusement pour que Serena ne soit pas au courant de leur petite aventure de l’année dernière, il s’en voulait à présent d’avoir été aussi jaloux sur le bateau. Il continuait à penser que les deux situations étaient différentes, Nathanael était loin d’être Hesther, mais il savait que Serena avait de quoi s’énerver contre lui aussi. Il laissa échapper un soupir et croisa ses bras sur sa poitrine, préférant abandonner volontairement le sujet pour l’instant. Il savait que ça allait mal finir et il n’était pas venu pour qu’elle le chasse aussitôt, c’était peut-être pour ça qu’elle avait accepté de le faire rentrer finalement, juste histoire de l’engueuler avant de le virer à nouveau. Il ne pourrait même pas en vouloir à Serena si c’était le cas.

Quand Chuck reposa les yeux sur la jeune femme, il ne put s’empêcher de se dire que ce n’était pas du tout la raison pour laquelle elle l’avait laissé entrer. Serena avait l’air trop… Dévastée ? Pour avoir pu penser faire quelque chose comme ça, sans compter qu’elle l’aurait déjà foutu dehors si ça avait été sa réelle motivation dès le début. Il se mordilla la lèvre inférieure tout en gardant ses yeux fixés sur Serena, c’était douloureux pour lui de la voir dans cet état. Il n’avait pas l’habitude de la voir aussi fragile et pour la première fois depuis qu’il avait eu la superbe idée de venir la voir, il commença à se dire que peut-être, il avait bien fait de l’exécuter. Il n’aurait pas pu supporter de la savoir dans cet état sans au moins essayer de faire quelque chose. Fronçant légèrement les sourcils, il décroisa les bras malgré lui et les laissa tomber le long de ses flancs. « Quoi ? De la satisfaction ? » Répéta-t-il doucement, cherchant à comprendre ce que la jeune lui demandait exactement. Si ça lui faisait plaisir de se retrouver dans cette situation ? « Serena ça n’a rien à voir, et crois-moi ça me rend tout sauf heureux. » Il laissa échapper un énième soupir avant de faire un pas en avant, commençant à se rapprocher de Serena. Il avait juste envie de la prendre dans ses bras, et ses yeux larmoyants n’étaient pas faits pour essayer de l’en dissuader. Il ne savait pas quoi dire, ni quoi faire pour faire comprendre à Serena à quel point cette situation était loin d’être idéale pour lui, mais il ne réussissait pas à en rajouter, il n’était pas venu pour se plaindre, ni même pour se faire pardonner, il était venu avec pour seule idée celle d’essayer d’aider un peu Serena.

Il laissa échapper un léger rire devant la question de Serena. Ce qu’elle était pour lui ? Par où allait-il seulement commencer ? Il fit un nouveau pas en avant et se retrouva finalement juste devant la jeune femme, qui était toujours assise sur la petite banquette sous sa fenêtre. Il lui suffisait de tendre la main pour venir caresser sa joue et il dut se faire violence pour se retenir de le faire justement. Encore une fois, il n’était pas là pour lui. « Une jeune femme merveilleuse qui traverse une période difficile. » Commença-t-il doucement en haussant légèrement les épaules. Il lança un petit sourire en coin à Serena, c’était plus fort que lui. Ressentant encore le besoin de se rapprocher, il finit par aller carrément s’asseoir à côté de la jeune femme, faisant bien attention à se mettre le plus loin possible d’elle pour ne pas forcer un contact qu’elle ne recherchait probablement pas. Tournant la tête dans sa direction, et toujours ce petit sourire au coin des lèvres, il continua. Il y avait tellement de choses que Serena représentait à ses yeux, dont certaines qu’il s’interdisait d’avouer, mais tout de même, il avait de quoi faire. « Une personne que je ne supporte pas de voir souffrir et à qui je tiens énormément. Serena, je refuse de te perdre. » Il n’avait pas réfléchi, c’était sorti tout seul, mais maintenant que c’était dit, il ne pouvait pas vraiment le reprendre. De toute façon, c’était elle qui était partie cette fois-ci, ça ne tenait pas qu’à lui pour changer et ce ne serait pas assez pour faire comprendre à Serena à quel point il l’aimait. Enfin son expression s’était faite plus sérieuse depuis quelques secondes. Il ne réussissait pas à détacher ses yeux de la jeune femme et finalement, il craqua. Il savait qu’il faisait probablement une erreur – une de plus – et que ça ne plairait pas à la jeune femme, mais il ne pouvait pas se retenir, pas en voyant le regard encore larmoyant de la femme qu’il aimait. Il passa son bras autour de ses épaules et la rapprocha de lui, déposa un rapide baiser dans ses cheveux avant de poser son menton au sommet de son crâne. « Je veux juste t'aider. » Finit-il par murmurer presque malgré lui.

Spoiler:

«The sun will rise.»
Chuck & Serena

Serena s’était laissée faire, l’avait écouté en silence. Le silence, la seule chose appropriée à la situation que Serena avait trouvé. Il valait mieux qu’elle de dise rien, son absence de réponse témoignait tout simplement, le fait qu’elle réfléchissait depuis un certain temps à une chose qu’elle allait faire et à des mots qu’elle n’aurait pas la force de prononcer. Serena sanglotait comme une enfant, c’était pathétique, elle avait décortiqué chacun de ses mots, et à aucun moment il ne lui avait dit qu’il l’aimait. Il ne lui avait pas dit depuis tellement longtemps. Ils étaient peut-être proches à ce moment précis, mais en réalité, ils étaient à des kilomètres l’un de l’autre. La jeune fille s’écarta de lui légèrement pour lui tenir la main. Rien que le contact de sa peau lui donnait des frissons. Mais elle se devait d’être forte, et de pour une fois dans sa vie, se comporter en adulte, ne pas penser qu’a sa pomme, à ses envies et ses idéaux complètement hors d’atteinte. D’un revers de main elle sécha ses larmes, elle ne voulait surtout pas que Chuck s’apitoie sur son sort encore une fois, « On ne va pas avoir la même discussion, Chuck. Encore et encore ! On en reviendra toujours au même point ! », s’était-elle exclamée un peu trop brusquement. Serena prit une profonde inspiration pour noyer à nouveau ses yeux noisette dans ceux, intensément bleus de Davis. «  J’ignore tout tes appels, je refuse catégoriquement de te parler, tu te pointes chez moi la bouche en cœur, je te tend une perche tu ne la saisis pas. Merde Chuck ! Je t’ai dit que tu me perdrais si tu ne voulais pas de moi entièrement ! Je ne suis qu’une gamine, tu le sais très bien, je n’arrive pas à penser aux autres, j’ai toujours tout eu sur un plateau en argent, je suis superficielle. » La jeune fille s’arrêta de parler un instant parce qu’elle avait déversé un flot de paroles incontrôlable et qu’elle n’avait laissé aucune opportunité à Chuck d’en placer une.

« Toi et moi c’était perdu d’avance Chuck. » Elle commençait à le dire, le pire dans tout ça, c’était qu’elle avait reprit les derniers mots qu’il avait prononcé avant de s’envoler pour New-York City. Elle ne pensait pas un traitre mot de ce qu’elle disait, et cela lui déchirait littéralement la gorge de lui mentir en pleine figure. « Tu devrais faire ta vie avec quelqu’un de bien… Hesther par exemple, vous avez tout du couple parfait. » Sentant que sa main commençait à trembler légèrement elle serra celle de Chuck un peu plus fort. « Je suis tellement désolée de t’avoir fais perdre ton temps. Plus tard on se croisera dans la rue, on repensera aux bons moments qu’on a passé ensemble et s’en sera finit. Si tu me garde toujours sous le coude quoique tu fasses, parce que je ne suis pas aveugle, on va rester coincé comme cela encore longtemps. » Cela faisait un bout de temps qu’elle n’avait pensé qu’a lui. En pensant au futur, elle ne se voyait pas dépasser les 30 ans, elle finirait surement droguée comme toute ces petites filles de riche. Elle songea à quelque chose, quelque chose dont elle ne l’avait pas informé mais qui peut-être le ferait s’éloigner d’elle un peu plus, « Ce n’est pas digne de toi…tu n’imagines même pas tout ce que j’ai fais, tu serais dégouté d’être assis à côté de moi en ce moment même si tu en connaissais ne serais-ce que le quart. » C’était un fait, la petite Serena Gomez ne deviendrait jamais Serena Davis. « Et puis, mes sentiments ont changés… je vais déménager. »

Abandonné & verrouillé