feat. Grace Lucy Warren

YOU'VE BEEN MY ONLY FRIEND

19h, les rayons de soleil qui lentement fléchissent, et baissent en intensité, laissant courir leurs jolies couleurs sur les immeubles de Detroit. Ou aussi la fin du service de Charlie au Mus'off ce soir. Elle venait de terminer de ranger la boutique afin qu'elle soit en ordre le lendemain matin. Charlie n'aimait pas particulièrement ce boulot - ni d'ailleurs les employés - mais devait gagner un peu d'argent. Pour toute sorte de choses, sorties, loisirs, fringues, ou... drogues et alcools. Son père refusait à présent de lui donner du fric, ayant comprit un peu tard que sa si jeune fille se défonçait tous les soirs avec l'argent de poche de papa. Celui ci n'avait pas tellement apprécié d'ailleurs. Après une violente dispute il avait réussi à faire en sorte que la gamine se casse toute la nuit, oui, il avait réussi à énerver Charlie Braxton. Dieu seul sait à quel point cela était difficile ; mais quand elle était en colère, elle ne l'était pas à moitié. Elle avait pété un plomb, fait plusieurs crises d'angoisses, puis avait décidé de rejoindre ses potes camés. Depuis ce jour là, elle et son père ne s'adressaient plus la parole, c'est d'ailleurs tout juste s'ils se croisaient. Charlie vivait mieux sans lui, et visiblement, lui aussi. Il en était mieux ainsi.
Après avoir fermé la boutique Charlie erra durant une bonne demie heure dans les rues sans but précis. Le soleil s’immisçait entre ses cheveux, et lui chatouillait le visage. Elle sourit. Ce genre de choses, pourtant banales, c'était c'qu'elle aimait. Parfois au lieu de se retrouver un verre de Vodka à la main, elle r'gardait simplement le soleil se coucher sur les immeubles de West Street. Elle traînait les pieds sur le trottoir, tête baissée, réfléchissant profondément à ce qu'elle allait bien pouvoir faire ce soir. Aller traîner vers West street puis rentrer comme à son habitude, chez elle, à 3h du matin ? Non. Elle n'en avait pas envie. Cette journée avait été agréable. Enfin presque, si l'on oubliait les têtes de cons qui passaient à la boutique toute la journée. Et puis il faisait trop beau pour s'enfermer dans une maison avant le coucher du soleil. Elle décida donc de rendre visite à une de ses meilleures amies, Lucy. Elle marcha nonchalamment jusqu'à un arrêt de bus, direction Railway Place. Un fois qu'il fut arrivé, elle monta dans l'autocar, s'acheta un ticket et alla s'asseoir contre une fenêtre. L'engin démarra dans un bruit inquiétant - il faut dire qu'il avait l'air plutôt ancien, et le regard de la jolie brune se perdit sur les maisons et rues de Detroit. Physiquement elle était présente, mentalement c'était autre chose. Elle aimait beaucoup observer les maisons de chaque rue, leur architecture, et imaginer une vie aux personnes qui y logeaient. Dans des appartements elle imaginait principalement des célibataires, dans de grands pavillons où maisons de ville, des familles accomplies, noyées dans leur pseudo bonheur, construit sur des mensonges. Les gens heureux lui semblaient tellement pathétiques, ignorants du malheur qui n'faisait que bouffer chaque personne, qu'elle paraisse heureuse, ou non. Le malheur est la vérité, le bonheur un mensonge. Charlie souffla profondément en sentant le véhicule s'arrêter. " Terminus " annonça la voix si particulière, mais pourtant bien commune aux autocars. Elle descendit rapidement et prit le chemin du logis de son amie. Elle s'arrêta dans une petite épicerie de quartier, tenue par un vieux baroudeur aux airs de pêcheur enraciné dans son commerce. Un peu alcoolique sur les bords. En entrant, elle sourit au vieil homme qui lui répondit par un regard noir, de ses yeux noisettes cachés derrière des sourcils grisonnants. Il caressait sa bedaine proéminente de sa grosse main, de l'autre, il tenait un journal. La jeune fille s'arrêta devant l'étalage d'alcool et prit une bouteille de Whisky. Le vieux connaissait pertinemment son âge, mais il s'en fichait. Un jour même, il lui avait sorti, une bouteille à la main : " t'sais ma p'tite, j'ai été jeune avant toi ! ". C'était le seul jour ou il avait daigné lui adresser la parole, du moins gentiment. Il avait sûrement un peu trop bu. C'était certain même. Charlie se dirigea vers le petit bureau qui servait de caisse. Le quinquagénaire connaissait tous ses articles, mais étique oblige, il les passait tout de même à la caisse enregistreuse.

« Ca f''ra vingt cinq dollars la gamine. »

Elle lui tendit l'argent, et lui sourit en guise de remerciement avant de sortir de la petite boutique lugubre et de cette fois ci, réellement se rendre chez Lucy. Elle emprunta quelques raccourcis, ruelles sombres et passages en tout genres, et arriva devant le bâtiment. Elle entra dans l'enceinte de l'immeuble et monta les escaliers, jusqu'à arriver à l'étage de son amie, et une fois arrivée, elle toqua à la porte, et attendit que la jeune blonde vienne lui ouvrir. Il n'y avait pas à dire, c'était une jolie fille. Même, une très, très très jolie fille. Lorsque la porte s'ouvrit, Charlie lui offrit un de ses plus beaux sourires et lui plaqua la bouteille dans les mains.

« Hello. »

Cheveux blonds, tombants en cascade sur des épaules fines, une silhouette élancée, un regard à faire craquer plus d'un homme, tel était le portrait qu'offrait la jeune femme à 20h30. Charlie ne savait pas si elle dérangeait, mais dans tous les cas, ce n'était pas bien important, elle ne laissait jamais la petite brune dehors.

Spoiler:

VERROUILLE

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