Parce qu'il ne reste que nous ... [Stiles & Joan Kellers]
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WELCOME TO DETROIT
Stiles C. Kellers
AGE : 34 NOMBRE DE CONTACTS : 217 ANNIVERSAIRE : 15/10/1990 EN VILLE DEPUIS LE : 21/07/2012 AVATAR : Jake Gyllenhaal
Sujet: Parce qu'il ne reste que nous ... [Stiles & Joan Kellers] Dim 22 Juil 2012 - 17:01
Stiles venait de terminer son service. Il salua d'un mouvement de tête les quelques collègues qu'il croisait sur son chemin. Il se dirigeait vers son vestiaire. April, la jeune infirmière qui travaillait souvent avec lui, s'enquit de lui raconter ses projets. Avec un sourire mais sans un mot, il commença à se changer écoutant parfois d'une oreille les paroles qui provenaient de son côté droit. Il y était question d'enfants, de sorties hebdomadaires et de son mari qui ne faisait jamais rien chez eux. Ce fut à peine s'il nota le soudain silence au moment où il quitta le haut de sa blouse. Les nombreuses balafres qu'il arborait faisait maintenant parti de lui. Il n'y prêtait plus vraiment attention. Peut être consciente de son attitude, April reprit son flot de paroles mais son ton était différent. C'est le risque dans un vestiaire mixte mais cela n'était que de moindre importance. Il enfila un simple tee-shirt noir à la place et remit également son jean. Il sentit le ton d'une question et son attention se porta soudain sur la jeune infirmière.
- Hum, tu disais ? - Oh rien de spécial. Je voulais savoir si tu voulais aller boire un verre, histoire de bien finir la journée !
Stiles haussa les épaules. Pourquoi pas ? April était mariée, ses intentions étaient donc tout à fait honorables et puis il n'avait rien à faire ces derniers temps. Il avait beau réussi à retrouver une trace à Détroit, il avait été surpris de mesure la hauteur de sa tache. Dans une ville aussi grande, Dieu seul sait où elle pouvait se trouver ? Alors, il attendait. Encore. Une habitude presque ancrée depuis quelques mois. Depuis son contact avec Ethan. Depuis la mort de son père.
- Euh, ouais, pourquoi pas ?
Il sourit légèrement, d'un plissement de lèvres. Il saisit son portable dans le casier. Un message. Il leva les sourcils surpris. Vu le peu de contacts qu'il possédait et le nombre restreint des personnes qui possédaient son numéro, il se demandait bien qui avait pu lui adresser quelque chose. D'un geste distrait, il ouvrit le message et se figea " 367, Woodward Avenue, Détroit" Une adresse. Il trembla légèrement en relevant les yeux vers le numéro de l'auteur. C'était lui. Il avait réussi. Il avait finalement trouvé. Quelques jours seulement. Ce jour-là était enfin arrivé. D'un geste mécanique, les yeux rivés sur son écran, il referma son casier.
- Stiles, ça va ? - Hein ?
Il releva la tête, surpris. Retour à la réalité. Son cerveau se remit à fonctionner.
- Je, oui, désolé, April, pas ce soir ! Une urgence ! On se voit demain.
Et sans attendre la réponse, il prit la direction de la sortie. Un dernier regard au message et il fourra le téléphone dans sa poche de pantalon. A mesure qu'il approchait de la sortie, ses pas s’accéléraient inexorablement, comme attirés par une force invisible. Il courrait presque une fois les portes franchies. Il parcourut rapidement le parking pour rejoindre sa voiture. Les mains tremblantes, il chercha ses clés dans sa poche et les fourra dans la serrure. Il se plaça au volant et démarra en trombe. La suite du trajet se fut presque mécaniquement. Son esprit était porté sur autre chose. J'arrive pas à le croire
FLASH BACK 2002, Londres.
Stiles remplit son sac sans apporter le moindre soin à ses affaires. Il était temps. Il n'y avait plus rien à faire. Joanny était perdue. Son seul espoir était qu'elle ne finisse pas comme sa mère. Il devait partir. Il détestait se sentir impuissant. Il se haïssait pour avoir les choses se passer de la sorte. D'abord Joanny, puis maman. Non. C'était trop. Il étouffait. Il sentit Irving passer derrière lui. Un regard à son frère, il indiquait qu'il avait encore pleuré. Il étouffa un juron. Des deux, Irving était sans doute celui qui avait le plus souffert. Il ne pouvait pas supporter de le voir ainsi. Il n'avait pas pu sauver maman, il ne pouvait sans doute plus rien pour Joanny mais pas Irving. Il ne laissera pas son frère sombrer. Pas lui aussi. Il ne le supporterait pas.
- Irving, tu sais qu'il le faut ! On va y arriver petit frère !
Irving lui adressa un sourire timide et se contenta d'un hochement de tête. Stiles était d'autant plus décidé. Il referma son sac d'un coup sec.
- Je t'attends à la voiture.
Il sortit de la pièce, salua son père d'un geste de tête. Ce dernier avait donné sa bénédiction à ses deux fils. Pour lui, il était temps qu'il fasse leur vie. Stiles avait apprécié cette remarque. En passant dans le couloir, il aperçut Joanny dans sa chambre. Dans le même état que d'habitude. Sa soeur avait perdu tout ce qu'elle était en même temps que son innocence. Il hésita puis se ravisa. S'il faisait ça, il n'aurait pas le courage de partir. Pourtant, il le fallait. Pour Irving. Il devait sauver son frère. Il quitta Joanny des yeux et prit la direction de la voiture. Ce fut la dernière fois qu'il franchit la porte de sa maison au cours des huit années qui suivirent. La dernière fois qu'il vît Joanny
FIN DU FLASH BACK
Une larme coula imperceptiblement sur sa joue. Il avait enfin la revoir. Sa Joanny. Sa toute petite sœur. Il regrettait encore parfois. Avait-il réellement sauvé son frère ce jour-là ? Sans doute pas. Aujourd'hui, il le savait. Cet homme avait tué son frère pour Joanny. S'il avait été là, elle n'aurait peut être rien eu avoir avec cet homme et Irving serait toujours vivant. Ou alors, il serait mort. Comme sa mère avant lui. Il ne pouvait plus revenir en arrière. Le passé avait marqué son pas de façon indélébile. Joanny. Il ne lui restait plus qu'elle désormais. Le savait-elle seulement ? Sans doute pas. Comment réagirait -elle ? Était -elle heureuse maintenant ? Avait-elle réussi à tracer sa route, à faire son deuil, à se reconstruire ? Ses questions qui le hantaient depuis son arrivée à Détroit allaient enfin trouver leurs réponses. On va revoir Joanny, Irving. Notre petite soeur. Elle avait sans doute changée, même physiquement. C'était une femme maintenant. Dix ans avaient passé depuis la dernière fois. Il n'arriva pas à imaginer leurs retrouvailles. Serait-elle heureuse ? Serait-elle indifférente ou bien furieuse ? Furieuse de ses dix années sans nouvelles. D'après Papa, elle avait quitté la maison deux ans après eux. Ou était-elle allé ? Il l'ignorait. Reprenant soudain ses esprits, il remarqua qu'il était arrivé à destination. Il essuya la larme sur sa joue d'un geste vif et ralentit la voiture. Il regarda plus attentivement les numéros des maisons. Un œil à son téléphone. 367. Il finit par le voir et gara sa voiture un peu plus loin. Il sortit assez machinalement de l'habitacle et ferma la voiture d'un tour de clé. D'un pas fébrile et hésitant, il s’avança vers la porte d'entrée. Arrivé devant, il se figea. Qu'allait-il bien pouvoir lui dire ? Que pouvait-on dire dix ans après ? Dix ans après une séparation de la sorte. Il ferma les yeux et respira un grand coup. On va y arriver, Irv'. Il donna un premier coup contre la porte puis un second plus fort. Aucune réponse. Il observa sa montre. La soirée venait de débuter. Peut être travaillait-elle encore ? Ou alors était-elle absente ? Le message indiquait un numéro mais pas qu'elle était là. Il jeta un œil rapide par la fenêtre. Aucun signe de vie. Il se mordit la lèvre et reprit le chemin de sa voiture. Pourtant au moins d'ouvrir la portière, il hésita. Qu'avait-il d'autre à faire ? Qu'y avait-il de plus important qu'elle désormais ? Il lâcha la portière et retourna vers la maison. Il soupira puis s'assit sur le pas de la porte. Peut être finirait-elle par arriver. Il s'accouda à la porte, les yeux dans le vague. On touche au but, Irv'. Après tout ce temps. On va voir peut être enfin savoir. Savoir pourquoi tu es mort. Tu crois que Joanny le sait. Elle connaît au moins ce type, c'est obligé. Tu crois que ce qu'on dit est vrai ? Qu'elle est vraiment devenue comme ça ? Notre petite Joanny. Comment aurait-elle pu changer à ce point ? Il ferma les yeux un moment, ses mains tremblantes emprisonnaient dans ses poches. Il était presque calme quand il ouvrit à nouveau les yeux. Et qu'il la vît. Cette vision eut l'effet d'un courant électrique. Il se releva d'un bond. Il tenta de parler mais ses mots se figèrent à ses lèvres. Que pouvait-on bien dire au bout de dix ans ?
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Sujet: Re: Parce qu'il ne reste que nous ... [Stiles & Joan Kellers] Lun 23 Juil 2012 - 15:07
Une journée machinale à l'animalerie pour Joan Kellers. Aujourd'hui, elle était particulièrement amorphe. La raison? Se sentir sans but, désespérée de retrouver un bout de soi même délesté plus de dix ans auparavant. Quelques jours auparavant avait eu lieu "l'anniversaire" de son viol et on pouvait dire que malgré le décès de l'auteur, les choses n'avaient pas changé pour la tueuse. En apparence, elle était entrée dans le droit chemin, son innocence perdue, laissant miroiter une façade de mensonges. Ses clients l'adoraient, ses collègues également aussi bien ici qu'au centre d'appels mais aucun d'entre eux n'avait idée de la vérité, de ce qu'il se cachait sous le masque de Joan Kellers. A vrai dire, ce privilège n'était accordé à personne. Seul sa famille, ses amis étaient au courant de l'épisode terrible de son adolescence. Mais personne hormis elle et Saoirse n'était au courant de sa quête de vengeance désormais accomplie. Elle se sentait mieux? Probablement pas. Elle errait seulement son but dans son nouvel appartement, à chasser la haine qu'elle avait encore contre elle même et les hommes en général. Parfois, la nostalgie et le manque se laissaient sentir, des résidus de son enfance non terminés certainement. Elle rêvait que sa mère lui apprenait à se maquiller pour la première fois, que ses frères la protégeaient du mal qu'on pouvait lui faire au lycée et que son père l'empêche de sortir avec n’importe quel garçon. La joie d'une famille réunie et normale à vrai dire. Ce qu'elle n'aurait plus jamais. Elle avait fait un choix, comme sa mère avait décidé d'en finir avant elle. Joan avait décidé de tirer un trait sur tout cela pour suivre son destin égoïste: faire taire la souffrance, la peine pour vivre à travers des illusions.
Quoiqu'il en soit, sa journée se terminait. Elle dit au revoir à sa dernière cliente qui emportait avec elle un magnifique chiot. Elle lui parla de tout et de rien pendant dix bonnes minutes alors que Joan regardait constamment sa montre. Elle voulait aller faire quelques courses, histoire de ne pas mourir de faim, les jours suivants. Cette charmante dame finit par la quitter, un sourire aux lèvres, heureuse de son achat. Joan courut au vestiaire, enfila sa veste et se rendit au supermarché en vitesse maximale. La tueuse déambula dans les rayons, remplissant son chariot de toutes sortes d'aliments qu'elle n'était même pas sûres de manger un jour mais c'était l'intention qui comptait. Elle paya et se remit en route, revigorée après cette corvée. En conduisant, elle laissa son esprit divaguer quelque peu sur des souvenirs. Des situations qu'elle aurait voulu changés, dix ans plus tard, comme le départ de Stiles & Irving, ses frères adorés...
FLASHBACK Londres, 2002.
Joan n'avait plus rien à espérer. Plus rien, depuis que son innocence lui avait été retiré. Cela faisait déjà plusieurs mois que la figure maternelle s'en était allée. Plusieurs fois par jour, la jeune Joan lisait ce mot, cette unique note qu'elle avait laissé à sa fille. Message empli de désespoir, donnant du courage à Joan, pour qu'elle survive. En fait, c'était la dernière tentative de Madame Kellers pour que sa fille promette de rester en vie coûte que coûte. Un acte égoïste en somme et elle ne faisait pas mieux qu'elle. Depuis quelques semaines, Joan passait son temps dans les registres de la ville pour retrouver la trace de celui qu'il l'avait détruit. Jusqu'ici, cela n'avait pas beaucoup avancé mais elle savait une chose. Il était un criminel qui devait avoir un réseau assez impressionnant, elle ne devait pas être la seule victime de ce style... Assise sur son lit, les yeux dans le vague, le mot de sa mère devant elle. Joan attendait. Elle voulait que le temps passe, elle voulait grandir pour enfin réaliser son oeuvre qu'elle imaginé des milliards de fois dans son esprit. Distraite, elle capta le regard de Stiles, son frère à la porte. Ce fut très bref et celui-ci quitta la maison avec Irving quelques minutes plus tard. Joan se leva et regarda par la fenêtre. Ils chargeaient la voiture, ils partaient vers de nouvelles aventures et l'adolescente sentait que c'était le dernier regard qu'elle leur lancerait. Une larme coula sur sa joue, elle était seule désormais... Un mal? Pas forcément, elle n'avait plus rien à regretter.
FIN DU FLASHBACK
Joan cligna des yeux, chassa les souvenirs et se concentra de nouveau sur la route. En un rien de temps, elle arriva chez elle. Elle sortir du véhicule et alla chercher son sac de courses dans le coffre. La tueuse verrouilla enfin sa voiture à la recherche des clés de son appartement dans la poche de sa veste. Dans le même temps, elle avançait vers la porte d'entrée. Elle avait enfin trouvé ses clefs et releva la tête pour tomber sur la surprise de la décennie. Joan crut rêver. Non, ce n'était pas possible. Elle lâcha le sac, prise par surprise, complètement décontenancée de l'image qui se tenait sur son perron, dans l'attente de son arrivée. Stiles. Son frère, l'un de ses frères qu'elle pensait ne jamais revoir. Joan ne tenta pas de ramasser ses courses, elle resta plantée là, perdue, l'air hagard devant un des hommes qu'elle aimait le plus au monde. Elle l'avait reléguée dans un coin sombre de son esprit où se trouvaient tout le reste de sa famille, ses amis du lycée et Ethan. Joan réussit à bégayer quelques mots.
St.. Stiles. Qu'est ce que tu fais ici? Où est Irving? Je pensais qu'on n'aurait pas l'occasion de se revoir.. Comment m'as tu trouvé?
En s'approchant, Joan remarqua instantanément que son frère avait changé, vraiment changé. Il avait le visage émacié, des traces d'une souffrance claire. Joan n'y comprenait rien. Ils s'étaient quittés il y a dix ans avec un bonheur évident sur le visage de son frère aîné. Qu'en était-il aujourd'hui? Joan frissonna, elle ne se sentait plus très bien tout un coup...
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Stiles C. Kellers
AGE : 34 NOMBRE DE CONTACTS : 217 ANNIVERSAIRE : 15/10/1990 EN VILLE DEPUIS LE : 21/07/2012 AVATAR : Jake Gyllenhaal
Sujet: Re: Parce qu'il ne reste que nous ... [Stiles & Joan Kellers] Mar 24 Juil 2012 - 12:43
Stiles resta figé. Ses membres refusaient de lui obéir, son sang avait cessé de couler dans ses veines, elles étaient faites de glace. Rien. Aucun mot ne sortit de sa bouche. Ils ne parvinrent même pas à sa gorge. Que pouvait-il dire ? Que pouvait-on dire ? Il ne fit aucun mouvement non plus quand elle fit tomber ses sacs au sol. Ses lèvres remuèrent légèrement à mesure que son regard le jaugeait de la tête aux pieds. Joanny. Elle avait tellement changé. Cela en était presque effrayant. Au bord du gouffre, il se rattacha aux traits qu'il reconnaissait. Cette forme-ci, cet angle-là, cette marque encore. Il commençait à sentir à nouveau ses doigts. Avant qu'il n'ait pourtant pu exécuter le moindre geste, Joanny avait déjà réussi à bredouiller. Elle enchaîna les mots, les questions. Stiles cligna des yeux frénétiquement. Cette voix. Elle était tellement lointaine. Quand l'avait-il entendu pour la dernière fois ? Un élan d'affection vînt lui serrer le cœur un quart de seconde. Avant qu'elle ne prononça le mot de trop. Irving. Ou est Irving ? Stiles baissa légèrement les yeux au sol. Ou est Irving ? Il revoyait son père sur son lit, albâtre, lui posait la question avec un grand sourire. Comme si de rien n'était. Irving. Il avait été incapable de lui répondre. Il avait fini par comprendre et par pleurer, sans que Stiles n'eut rien fait pour le consoler. Comment aurait-il pu ? Lui-même encore ne l'était pas. Il ne le serait probablement jamais. Ivy avait essayé. Elle s'y était brulée. Peut-on faire le deuil d'une partie de soi-même ? Peut-on faire le deuil de soi-même ? Peut-on faire le deuil du sens même de son existence ? Peut être. Peut être le pouvait-on. Pas lui. Irving était plus que son frère. Il était la meilleure partie de lui. Celle-ci était morte avec lui, disparue à jamais. A mesure qu'il y pensait, des flash vinrent le hanter. Maman au bout d'une corde. Papa albâtre. Joanny détruite. Irving. Irving, mort, froid, défiguré. Non .... non .... non ! IRVING ! Son souffle s’accéléra, comme s'il avait été coupé. D'un réflexe, Stiles posa sa main sur le bord de l'entrée. Il ferma les yeux et reprit ses esprits. Avec effort, il releva la tête. Il tenta même un semi-sourire. On aurait plutôt dit une grimace. Son regard était voilé, hanté, hagard. Ses cordes vocales pourtant semblaient avoir retrouvé vie.
- Bonsoir, Joanny. On a pas le droit de venir voir sa petite soeur ?
Ses yeux étaient noyés mais aucune larme ne coula. Combien de fois avait-il pleuré ces dernières années ? Pendant un instant, il pensa à l'image qu'il pouvait renvoyer de lui. Il devait avoir l'air pathétique. Un vrai zombie. Si elle l'avait vu plus tôt. Il y a quelques années. Une sorte de sourire poursuivit de se former sur ses lèvres. Il devait être fort. Il devait résister à la tentation de s'effondrer. Il était là pour Irving. Il lui devait ça. Ses émotions n'avaient aucune importance. Elles avaient cessé d'en avoir. Il se força à bouger et ramassa d'un geste précautionneux les sacs qu'elle avait fait tombé au sol avant de les lui tendre.
- Je souhaitais te parler, alors j'ai traversé l'Atlantique. Comment vas-tu Joanny ?
Le ton se voulait léger mais les mots pesaient bien trop dans l'air pour que ce fut sincère. La question était d'ailleurs surfaite. Il était extraordinairement calme. Les vannes menaçaient pourtant de s'ouvrir. Il pouvait sombrer à n'importe quel moment. Il pouvait s'effondrer au moindre mot de trop. Pour l'heure, il affichait un masque de façade, comme toujours. Il était un comédien, une marionnette qu'il tentait de manier avec talent et raison. Il était pourtant perdu. Comment cela allait-il bien pouvoir se passer ? Comment allait-il bien pouvoir lui dire ? En savait-elle au moins la moitié ? Aide-moi, Irving ! Le regard fixé sur sa sœur, il attendit de connaître la suite. Aide-moi !
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Sujet: Re: Parce qu'il ne reste que nous ... [Stiles & Joan Kellers] Mar 24 Juil 2012 - 22:53
Joan se croyait dans un rêve éveillé.. Ou peut être un cauchemar. Après tout, on ne venait pas frapper à la porte d'un individu dix ans après un départ précipité. Joan avait la nette impression que tout cela était un mauvais présage, elle ne voulait pas s'avancer mais son instinct lui disait de fuir, le plus loin possible. La douleur commençait déjà à s'immiscer par tous ses pores. Mais quelle douleur? Celle de voir son frère dans un état affligeant ou celle d'attendre le cataclysme? Joan n'en savait rien, elle restait juste figée dans l'allée, ses courses à ses pieds à observer un frère qu'elle avait cru perdu à jamais. Cette image lui était insupportable. Comment Stiles avait-il pu passer du jeune homme souriant, sociable, drôle et charmant à.. une carapace vide sans sourire et juste froid? Joan connaissait son frère et ce qu'elle voyait ne reflétait que le désespoir. A travers lui, elle ne voyait que son propre malheur. Ils étaient dans le même état, comment les choses avaient-elles pu changer à ce point? Une chose était certaine, Joan voyait sur le visage de Stiles une émotion qu'elle ne lui avait jamais connu, elle n'aurait pas pu décrire ce mélange qui semblait bien malsain. Elle avait beau le connaitre, Stiles la connaissait encore mieux. Un simple geste de travers et Joan serait maudite pour l'éternité. Ses choix avaient été malencontreux, il n'en payait le prix que tardivement et commençait tout juste à réaliser que sa quête avait été vaine tout comme l'espoir de reprendre une vie normale était enterrée depuis déjà quelques années. Tout cela était trop douloureux, l'image de Stiles la déchirait comme si elle n'était qu'une simple poupée en papier mâchée qui attendait son heure... Et elle était finalement arrivée, à partir d'aujourd'hui, plus rien ne serait comme avant. Joanny était arrivée à un carrefour et elle ne pouvait plus faire machine arrière: il ne lui restait qu'à se jeter corps et âme dans ce résidu de destin qui l'attendait et c'est ce qu'elle fit.
Elle voulut questionner son frère. Quoi faire d'autre? Faire semblant était ce qu'elle faisait de mieux, autant continuer sur cette voie. Stiles, lui, ne le voyait pas de cette façon. Il chancela un peu aux propos de sa soeur puis reprit un air stoïque, glacial qui fit un mal fou à Joan. Elle ne le montra pas pourtant et afficha même un sourire digne de retrouvailles chaleureuses. Son frère fit comme si rien n'était arrivé pourtant Joan avait bien remarqué la douleur qui le traversait lorsqu'elle posa ses simples questions sans arrière pensée. La cadette répondit donc à sa question avec le même air hagard.
Disons que je n'ai pas transmis mon adresse... Je suis un peu surprise de te voir ici pour le coup..
Elle laissa sa phrase en suspend et constata enfin que ses courses étaient jonchées devant elle. Joan se baissa pour ramasser les dégâts alors que Stiles en faisait autant. Ce silence froid et dur tuait Joanny de l'intérieur. Pourquoi? Pourquoi cette sensation glaciale? Une fois les courses ramassées, Joan se dirigea vers la porte d'entrée, ouvrit et finit par poser ses emplettes à l'intérieur en invitant d'un geste de la main son frère à entrer. A cette instant, Joan sentit que les choses se compliquaient... Comme si son frère évitait ces questions. Quelque chose n'allait pas et ce constat n'arrangeait pas la sensation de mal être. Elle attendit pourtant que son frère réponde à ses interrogations. Il continua pourtant de la questionner avec ce masque de froideur, Jona entra dans son jeu, toujours aussi perturbée..
Moi je vais bien merci. Si tu me disais plutôt de quoi tu voulais me parler? Cela se semble important...
Spoiler:
HJ: Je suis désolé, c'pathétique... :'(
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Sujet: Re: Parce qu'il ne reste que nous ... [Stiles & Joan Kellers] Mer 25 Juil 2012 - 19:10
Stiles se sentait vide. Il avait espéré que ces retrouvailles allaient peut être lui rendre une partie de lui. Une de ses parties qu'il tentait désespérément de raccrocher. Mais non. Même celle-ci semblait perdue. Quels étaient ses sentiments pour sa sœur à l'heure actuelle ? Il avait du mal à le définir. Évidemment, il y avait l'amour. Cet amour fraternel qu'il avait éprouvé à l'instant même où il avait posé les yeux sur elle. Mais qu'étaient-ils aujourd'hui si ce ne sont des étrangers ? Dix ans. Dix longues années étaient passées entre eux. Quand bien même, il était persuadé d'avoir perdu sa petite sœur ce fameux soir, il y avait toujours eu cette forme d'espoir à l'idée de pouvoir la récupérer un jour. Mais les années étaient là. Ils étaient passés sur eux comme des rouleaux compresseurs. S'il avait l'impression qu'elle avait l'air presque mieux que la dernière fois, ça n'était pas son cas à lui. Elle n'avait peut être pas tant changer, pour avoir manqué la réussite d'une reconstruction, Stiles n'était plus le même. La mort était passée par là. La dépression, la souffrance, les blessures, la fin d'une existence paisible et sereine. La fin du plus meurtrier des sentiments, l'espoir. Il était mort avec Irving dans cette ruelle sombre, un soir de novembre. Aurait-il pu se relever après ça ? Avec les bonnes personnes, les bonnes situations, les bonnes opportunités, les bons miracles. Peut être, alors oui, peut être, après toutes ses années auraient-ils réussi à faire un véritable sourire. Un sourire de joie, sincère, simple, naturel. Mais les choses s'étaient déroulées autrement. Au lieu de ça, il y avait eu l'abandon, la ruine, la chute, la prison, les morts, les blessés, les mutilés, la solitude, la maladie, le faux espoir et une mort. Une autre mort. Sans doute la dernière que Stiles pourrait supporter. Sans quoi il mourrait lui aussi. Enfin. Libéré du fardeau d'une existence qui avait perdu le moindre sens, le moindre intérêt, la moindre étincelle. Il avait envie de hurler, de se déchirer la peau, de se noyer dans ses larmes, d'oublier, juste d'oublier. Ces images, ces visages, ce sang, cette absence de vie dans des yeux qui paraissaient fait de cristal. Il n'avait jamais essayé la drogue. Il s'y était toujours refusé, par principe. Les principes. C'étaient bien les seules choses qui lui restaient. C'étaient d'ailleurs ses fameux principes qui avaient fait qu'il n'était jamais passé à l'acte, qui faisaient qu'il était là aujourd'hui face à Joanny. Parce que les principes étaient sans doute la seule trace restante de sa famille. De son père, droit et juste. D'Irving, dont la compassion et le trop plein d'amour avaient menacé d'inonder le monde de joie et d'espoir. Mais c'était fini Ce monde-là n'existerait jamais. Le monde dans lequel il vivait avait oublié le nom de son frère. Quel monde pourri ! Il avait envie de le leur cracher au visage. Mais non. Oh il le ferait ! Mais sur une seule personne, un seul homme. Celui qui lui avait pris son frère. Celui qui les avait assassinés. Tous les deux. Sans Irving, il n'était qu'une coquille vide.
Stiles continuait d'observer sa jeune sœur sans réussir à ne transmettre aucune des émotions contradictoires qui le hantait. Alors il y avait ce masque. Ce masque froid et sans cœur que Stiles affichait pour ne pas sombrer, pour ne pas révéler à quel point chaque minute sans lui était une souffrance. Une épine qui s'enfonçait sans cesse un peu plus dans son cœur jusqu'à le réduire à néant. Il aurait aimé ne plus en avoir. Être débarrassé de cette souffrance. Et pourtant non. Ne plus souffrir serait oublier. Oublier son frère. Et il s'y refusait. Il serait peut être le seul. Il était peut être le seul. Mais la mémoire de son frère ne mourrait jamais tant qu'il serait de ce monde. Ce fameux cœur pourtant se pinça en voyant Joanny sourire. Pourquoi souriait-elle ? Comment pouvait-elle sourire comme si elle était heureuse de le revoir alors qu'il était porteur de mauvaises augures ? Savait-elle seulement ? Non, elle ne savait pas et ce serait à lui de réparer cette inconnue. Elle continua de parler et il tenta alors d'en faire de même. Il contenait chacun de ses mots. Il devait attendre. Ne pas dire le mot de trop. Il n'était pas encore temps.
- Disons que je connais les bonnes personnes.
Une fois les courses remises en place, il se décala pour la laisser passer. Il se refusa pour l'heure au moindre contact. Le geste de trop, qui pourrait tout anéantir. Anéantir ce masque, anéantir sa résolution. D'un geste, elle l'invita à entrer et il s'exécuta presque comme un robot. Son regard fit rapidement le tour de l'habitacle, mais cela ne lui inspira aucun commentaire. Son esprit était définitivement ailleurs. Elle poursuivit, lui déclarant qu'elle allait bien. Une partie de lui s'en réjouit même s'il dénotait une part de mensonge derrière. Elle avait mieux ou alors elle était meilleure comédienne que lui. Difficile à juger. Elle entra pourtant directement en jeu. Stiles retint un rire intérieur. Si seulement elle avait la moindre idée de la raison de sa présence. Oui c'était important Peut être trop, à vrai dire pour être lancer ainsi d'entrée de jeu. Mais que pouvait-il faire d'autre ? Éviter la vérité ? Non, il ne pouvait pas. Il était là pour une raison et même si il aimerait qu'elle soit tout autre, ça n'était pas le cas. Oh combien, il aimerait ! Il aimerait tellement ! Etre là avec Irving, être simplement avec son frère venu rendre une petite visite à leur sœur. Comme si c'était normal, comme si c'était évident. Mais ça n'était pas le cas. Les choses étaient différentes et il devait les accepter. Encore et toujours. A jamais. Pour ne pas sombrer. Encore. Il s'appuya sur un mur, les bras croisés devant lui. La tête relevée, il ferma les yeux. Son visage se mua en une expression de douleur. Le masque menaçait de s'effriter.Dans un souffle, il lança doucement :
- Oh Joanny !
Il rouvrit les yeux, la tête toujours orientée vers le plafond. Il se mordit la lèvre inférieure et rebaissa soudainement la tête avant de fixer son regard sur elle. Ca n'était plus de la glace qui transformait ses iris, ni de la haine, ni de l'indifférence, c'était de la souffrance. De la souffrance pure. De celle que ne possède que les gens qui ont vu le pire. Mais qu'est-ce que le pire ? Vaste débat s'il en est. Joanny sans doute pouvait être qualifiait comme quelqu'un l'ayant connu. A cette pensée, une profonde affection vint rejoindre le regard de Stiles. Décroisant ses bras, il quitta son mur pour s'approcher de sa petite sœur. Ma petite Joanny. Mais qu'as-tu fait ? D'un geste doux et mesuré, il prit les bras de sa jeune sœur dans ses mains pour approcher les siennes de ses lèvres. Il ferma doucement les yeux et les embrassa légèrement. Quand il rouvrit les paupières, ses yeux étaient embués de larmes. Il lui parla tout doucement, presque avec affection.
- Joanny. Assieds-toi s'il te plaît. S'il te plaît.
Le ton était presque suppliant. Le moment approchait. Il relâcha ses bras et baissa les yeux. Il souffla intérieurement et tenta de réduire ses larmes. Aucunes n'avaient coulé. Elles ne devaient pas. Irving.
FLASH BACK 2010, Londres.
Stiles venait de finir de ranger les derniers linges. Il avait passé des heures les mains dans l'eau à réfléchir. Il avait pris une décision. Il devait lui dire. Il était leur père. Il devait savoir la vérité, la connaître. Et peut être lui faire son deuil. Stiles avait été incapable de le consoler, mais il avait jugé qu'il lui devait au moins la vérité. Il était sans doute le seul qui pouvait comprendre, ne serait-ce qu'un peu, qui pourrait partager son chagrin. Pas celui d'un frère qui a perdu son frère, sa part de lui mais celui d'un père qui a perdu un fils. Il lui devait ce respect. Dans l'état dans lequel, il se trouvait, il lui devait bien ça. Les mains serrés sur les étagères, il prit sa décision. Il avait passé du temps à y réfléchir, maintenant il devait agir, lui parler. Il prit alors la direction de sa chambre où il restait maintenant toute la journée, incapable de se lever. Quand il franchit la porte, il tenta un sourire comme pour lui faire plaisir et alla prendre place sur le lit face à lui. Son père avait du sentir qu'il allait lui parler de quelque chose d'important parce qu'il s'intéressa aussitôt à lui, la mine grave. D'un geste nerveux, Stiles saisit la main de son père, puis se mordant les lèvres commença à parler. Sa voix était douce, contrôlée.
- Papa. Je crois que je te dois la vérité. La vérité pour Irving. Je sais qu'il m'en voudrait si je ne te disais pas la vérité, si je te laissais t'imaginer toutes sortes d'horreurs. J'ai bien peur de te décevoir à ce sujet mais je vais te donner la réalité. C'était un soir d'hiver. Novembre. Irving et moi avions notre compagnie de taxi qui marchaient, à vrai dire plutôt bien. Ce soir-là, il est sorti comme tous les soirs. Faire sa tournée. En général, elle était plutôt bonne. Il n'était d'ailleurs pas rare que les clients laissent un peu d'argent pour le dérangement ou parce qu'Irving lui plaisait. Tu te souviens de lui. Toujours prêt à rendre service, toujours prêt à faire la conversation sur tout et sur rien au moindre inconnu. - le père rit légérement, Stiles un peu lui aussi, à ce souvenir de son frère, si souriant mais il reprit bien vite son sérieux - Il m'était souvent plus de temps que d'habitude sur ce type de tournée alors je ne me suis pas inquiété. Je me suis dit qu'il avait surement encore aidé quelqu'un à transporter ses affaires ou je ne sais quoi d'autre. Est-ce que se fut le cas ? Je n'en sais rien. Peut être. Peut être a-t-il encore fait une de ses si nombreuses bonnes actions. J'en serais guère étonné. Mais qu'elle eut lieu ou pas. Ce fut la dernière. J'ignore qui c'était. J'ignore pourquoi il la fait. J'ignore même si c'était un client. Mais il la tuait. Il lui a tiré plusieurs balles dans le corps. Je ne sais plus si c'était avant ou après mais il l'a tué. Avec des balles ou avec ces coups de couteaux. Huit coups de couteaux. Et - sa voix se cassa et il manqua de s'effondrer mais il tint bon. Il devait le dire - le visage. Il lui a lacéré le visage. La seule chose qui n'avait pas changé c'étaient ses yeux. Ses yeux si rieurs, si magnifiques. Ils étaient froids. Froids. Il était mort. Il était mort. Je ne sais pas qui a fait ça, papa, je te jure que je ne sais pas qui a fait ça mais il l'a tué. Il l'a détruit. Irving est mort, papa et il ne reviendra jamais. Jamais.
Ne tenant plus, il s'effondra sur la main de son père qu'il tenait toujours entre les siennes. Jamais.
FIN DU FLASH BACK
Stiles releva les yeux vers sa soeur. Elle, connaissait peut être la vérité. Elle, pourrait peut être lui venir en aide. Il devait le faire. Comme avec son père. Il lui devait la vérité. Mais la situation était différente. Depuis qu'il savait, Stiles ne pouvait s'empêcher de lui en vouloir. Il s'en voulait alors mais ce sentiment revenait à la charge. Bien sur, elle n'y était pour rien. Quelle soeur pourrait souhaiter une mort aussi atroce à son frère ? Pas elle, pas Joanny. Irving ne devait être alors qu'un dommage collatéral. Mais de quoi ? Etait-elle vraiment ce que l'on disait d'elle ? Une tueuse ? Une meurtrière de sang froid ? Ce monstre lui avait-il vraiment volé son âme en plus de son innocence ? Il voulait l'entendre. Il voulait l'entendre de sa bouche, de sa voix. Si elle avait des questions, il en avait lui aussi. Il était là pour ça. Il devait savoir la vérité, lui aussi. La connaître. Mais il savait qu'avant ça, il devrait lui parler en premier. Lui répondre, lui avant qu'elle ne puisse répondre à ses questions, avant que ses dernières n'aient un sens. Alors il commença. Tout doucement.
- Joanny. J'ose espérer que tu me pardonneras un jour pour ce que je m'apprête à te dire. Que tu n'en viendras pas à me haïr pour être venu te voir et te dire ça. Mais je n'ai pas le choix. Il n'y a que toi. - il hésita, rit légèrement et poursuivit - C'est ça, la vérité, Joanny. Il n'y a plus que toi. Toi et moi.
Il avait assené le dernier mot, conscient de la sentence. Il n'était pas sur qu'elle comprenne, qu'elle saisisse la porté de ses paroles. Peut être était-elle enfermée quelque part dans sa tête. Pourtant, il ne pouvait pas lui laisser le temps de mettre les informations à leur place. S'il ne parlait pas maintenant, il avait le sentiment qu'il ne le ferait pas avant longtemps, peut être jamais. Pardonne- moi, petite soeur
- Nous sommes les derniers, Joanny. J'aurais aimé ne pas être celui qui te l'apprendrais mais j'ai supposé que tu l'ignorais. Puisque que je n'ai pas eu de tes nouvelles au cours de ses dix dernières années. Pas une seule fois. Ni pour l'un, ni pour l'autre. Ni pour papa, Joanny, ni pour Irving. Tu te demandes sans doute ce qui a bien pu se produire. Pour papa, c'est assez simple. Tumeur cérébrale. Inopérable. Il n'a pas trop souffert, j'y ai veillé. Pour Irving en revanche ...
Son regard s'assombrit. L'idée de se remémorer en éveil cette scène qui hantait chaque nuit de pseudo-sommeil qu'il avait, l'écorchait. Il relâcha l'air qui comprimait ses poumons et sentit les larmes montaient à ses yeux. Il eut l'impression qu'on lui arrachait le cœur. Il se tenait encore debout mais il ignorait comment. Il reprit finalement le fil de ses paroles mais à mesure qu'il avança le ton se faisait plus fort, plus désespéré, plus déchirant, plus effrayant.
- Il a été assassiné. Assassiné. Détruit. Anéanti. Défiguré. Rayé à jamais. Il est parti. Il est mort, Joanny. On me la prit. On me la prit. Pour toujours. Plus jamais, Joanny, plus jamais ...
Sa voix se brisa et il éclata en sanglots. D'abord tombé sur les genoux, il se prit la tête encore les mains,tentant de contrôler les tremblements qui le saisissaient. C'était trop, beaucoup trop. Irving, Irving, Irving. Pourquoi ils t'ont fait ça ? Pourquoi dis-moi pourquoi ? Parle-moi, Irving. PARLE - MOI ! Pendant les instants qui suivirent, il fut incapable de continuer. La statue venait de se briser. Son coeur vide venait alors de reprendre place, plus douloureux que jamais. Il était dans un était pitoyable mais il ressentit presque une forme de soulagement. Les tremblements s’atténuèrent un peu et pour la première fois, il porta son regard sur Joanny.
WELCOME TO DETROIT
Invité
Sujet: Re: Parce qu'il ne reste que nous ... [Stiles & Joan Kellers] Ven 27 Juil 2012 - 13:44
Si Joan s'était douté le matin même en se levant que Stiles referait une apparition surprise dans sa vie, elle aurait au moins pu réfléchir aux conséquences de ces actes passées. En cet instant, elle était tiraillée entre toutes les émotions qui la tiraillaient en rencontrant les yeux de son frères. S'il apprenait la vérité, il serait déçu, extrêmement déçu. Et la jeune femme pouvait supporter tout, les pires sévices, un second viol, être brûlée au fer rouge mais décevoir son frère, c'était bien au delà de ce qu'elle pourrait endurer. Elle avait tout fait pour les oublier: tous. Son père, ses frères, sa mère. Elle ne pouvait pas penser une seconde que l'un d'eux prendrait l'initiative de la retrouver, encore moins pour discuter de tout et de rien. Une décennie entière s'était écoulée et Joan avait plus que conscience que beaucoup de choses avaient pu changé dans la famille entre ce laps de temps. Mais à quel point le devinait-elle? Que très légèrement. Elle trouvait cela étrange que Stiles était venu seul. S'il y a bien une chose dont Joan se souvenait, c'était la cohésion qui régnait en ce temps là... Comment cet esprit avait-il bien pu disparaitre? Il aura suffi de deux malheureux évènements pour voir la cohésion exploser en milliards de petits morceaux. Le détachement de Joanny s'est effectuée en premier: sa malheureuse soirée a balayé tout le reste sur son passage la laissant comme une coquille vide n'ayant plus aucune considération pour personne, encore moins elle même. Puis, la mort de la figure maternelle les laissa tous au bord du gouffre, la promesse de la cadette l'empêchant d'en terminer avec ses souffrances. Elle avait dû s'éloigner, se venger pour survivre. Quant à ses frères, Joan n'était pas très sûr d'avoir saisi la raison de leur départ, tout ce qu'elle savait aujourd'hui était que tous ces évènements l'avaient conforté dans son choix. Aujourd'hui, en se retrouvant face au visage pâle et au sourire éteint de Stiles, les choses étaient bien différentes. Elle regrettait amèrement. Elle avait gagné certes mais était-ce le cas pour tout le monde? En ce qui concernait son frère, la réponse semblait clairement négative et Joan avait la vague impression de faire partie des causes de son désespoir.
Il avait les bonnes adresses. C'est tout ce que Stiles trouva à lui dire pour justifier sa présence. Joan imaginait déjà le travail de recherches qu'il avait dû faire pour arriver jusqu'ici. Elle avait effacé bon nombre de traces même si récemment, elle avait sûrement été moins prudente. Une chose était sûre; Stiles avait voulu la trouver et il y avait clairement une raison. Pour le moment, elle ramassa ses courses avec un air suspicieux pour son frère. Sa curiosité finit par l'emporter.
Tu as engagé quelqu'un pas vrai? Tu ne m'aurais pas trouvé autrement...
Joan ne lui demanda pas pourquoi il aurait fait cela. Elle n'était pas prête pour le savoir. Elle n'avait même pas pu profiter de la présence de Stiles. Les familles normales ne fonctionnaient pas comme eux. Ils ne s'étaient pas touchés, à peine souris, ils n'étaient que des étrangers l'un pour l'autre. Voilà ce que Joan constatait alors qu'ils pénétraient dans le refuge de Joan Kellers. Arrivés à l'intérieur, la froideur de Stiles se transforma en toute autre chose. Son masque tombait: une douleur terrible s'affichait désormais sur son visage déjà marqué. Il prit appui sur le mur cherchant de l'air pour respirer. Joan restait là, l'air penaud, comment réagir dans ces cas là? Elle n'était qu'une étrangère pour lui désormais. Dans tous les cas, elle ne l'avait jamais vu comme cela. La jeune femme n'était donc nullement rassurée devant ce regard si triste et désespéré. Elle tenta de lutter contre la compassion, elle aurait juste voulu le serrer dans ses bras, lui dire que tout irait bien mais à en juger par son accueil, elle se ravisa. Son frère réussit à prononcer son vrai prénom en entier, cette intonation était si inattendue. Un mélange entre malheur, haine, chagrin et rancoeur. Joanny était perdue et ne savait pas quoi répondre à ce simple appel. Elle se contenta donc de rester debout à le regarder souffrir comme si elle était à des kilomètres de Stiles. Après ce silence pesant, troublé par la douleur de l'aîné, Stiles s'approcha, les yeux embués lui prenant les mains et la priant de s'asseoir. Une mauvaise nouvelle. Joan sut instantanément ce qui se passait. Il était venu sel pour la simple et bonne raison qu'Irving n'était plus. Voilà ce qu'elle déduisit du comportement étrange de Stiles. Pourtant, elle ne voulait pas le croire, elle le voyait si nettement dans les yeux de son frère mais sans sa confirmation, elle ne cèderait pas au deuil. Lorsqu'il lui baisa les mains, Joan réussit à capter son regard, rendu fou par la peine.
C'est Irving c'est ça? C'est pour ça que tu es venu?
Stiles conserva son regard perdu. Il était vraisemblablement dans ses pensées. Joan ne le força pas, elle avait juste la boule au ventre, ne sachant pas à quoi s'attendre. Elle avait fait un trait sur sa famille il y a bien longtemps et elle n'avait jamais espéré revoir l'un d'entre eux. Cela n'empêchait pas la douleur de la perte, elle les aimait tous d'une force incomparable. Elle avait beau changé de vie, son être tout entier appartenait aux Kellers, elle aurait fait n'importe quoi pour eux, si seulement, elle n'avait pas été aveuglée par la haine... Puis, Stiles commença à parler. Son discours était très clair même si Joan mit deux bonnes minutes à comprendre la profondeur de ses paroles. Toi et moi. C'est tout. Plus personne d'autre. La solitude. Stiles & Joan contre le reste du monde. Elle le regarda, avec un air de douleur, pas aussi puissant que Stiles mais à cet instant elle souffrait. Elle regrettait de ne pas être resté, de ne pas les avoir sauvé. Elle aurait pu. Elle aavit été là pour les derniers instants de vie de sa mère, elle aurait dû supporter chacun d'entre eux comme ils avaient tenté de le faire pour elle après son viol. Joanny réussit tout juste à répondre, l'émotion l'assaillant de toute part.
Quoi? Toi et moi? Et les autres?! Stiles, qu'est ce qu'il se passe?
Question idiote. Mais obligatoire lorsqu'on était sous le choc. Après un léger instant où Stiles dût se reprendre, il commença à lui expliquer. Son père était décédé d'une tumeur. La pire mort que Joan aurait pu imaginer pour l'homme aussi droit, honnête et gentil qu'il était. Sa boule au ventre se transforma en tremblements se répercutant sur chaque cellule de sa peau. Elle ne sentait plus ses bras, encore moins ses jambes. Elle avait juste les yeux grands ouverts et les oreilles à l'écoute de la pire chose qu'elle ait jamais entendue. La suite lui fit plus mal que tout. Irving. Son frère si charmant à l'écoute, le sourire toujours aux lèvres... On l'avait tué. Pourquoi? Pourquoi voudrait-on mettre fin aux jours d'un homme si charmant qu'Irving Kellers? Cette fois, les larmes de Joan coulèrent sans aucune honte. Elle avait perdu les souvenirs heureux de deux hommes qu'elle avait tant chéris. Des modèles pour elle et Stiles ne pouvait que lutter contre la douleur insoutenable. Il avait perdu la moitié de lui même et ce constat arracha le pire des sanglots à Joan. Son frère n'avait plus de but, il avait perdu la meilleure part de lui même, sans espoir de la retrouver un jour et elle était là, à pleurer inutilement alors qu'elle avait été absente toutes ces années, laissant Stiles gérer toutes ces histoires seul. Le remords vint très vite s'ajouter aux paquets d'émotions qui la submergeaient déjà.
A l'annonce de la nouvelle, Stiles s'effondra, les sanglots tuant tous les efforts pour continuer la conversation. Jonan finit par sortir de sa léthargie et se posa à ses côtés pour lui apporter le peu de réconfort qu'elle pouvait. Elle les avait abandonnés à leur funeste destin et la seule chose qu'elle pouvait faire était soutenir physiquement son frère aîné qui ne distinguait plus une once de réalité, pleurant à s'en abimer les poumons. Il releva son regard vers elle, calmant les sanglots. Joan essuya sa dernière larme, elle n'avait pas le droit de pleurer pas devant lui qui avait tant souffert. Elle sentit le regard de Stiles peser sur elle. Elle était à genoux elle aussi, à ses côtés et attendait que les mots traversent enfin sa gorge. Elle posa finalement son regard azur, délesté de toute émotion, la froideur de la tueuse surpassant tout le reste...
Qui l'a tué? Pourquoi?
Un ton glacial, froid. Celui qu'elle utilisait pour retirer le dernier souffle de ses victimes il y a encore quelques mois...
WELCOME TO DETROIT
Stiles C. Kellers
AGE : 34 NOMBRE DE CONTACTS : 217 ANNIVERSAIRE : 15/10/1990 EN VILLE DEPUIS LE : 21/07/2012 AVATAR : Jake Gyllenhaal
Sujet: Re: Parce qu'il ne reste que nous ... [Stiles & Joan Kellers] Jeu 2 Aoû 2012 - 20:34
Des tremblements continuaient de parcourir ses membres mais il avait réussi à en faire cesser une partie, comme toujours quand il tentait de faire ça à une de ses crises. En général, il se contentait d'ailleurs de quelques tremblements recroquevillés sur lui-même, à hurler intérieurement le nom de sa perte. Rarement, il s'était alors laissé aller à montrer sa douleur. Même en présence de son père, seules ses larmes avaient coulé mais ce soir-là. Il était face à elle. Face à elle qu'il savait responsable de la mort d'Irving. Toutes ses émotions étaient alors entremêlées, le réduisant à un simple récipient dans lequel on aurait mélangé tous les pires sentiments du monde. L'amour, la haine, le chagrin, le désespoir. Jamais depuis. Jamais depuis ce soir-là, il n'avait perdu réellement la face. Il y avait eu l'enterrement bien sur mais il avait alors été dans un état second, hors de la réalité, continuant de lui parler comme s'il était encore là à côté de lui, comme si on enterrait quelqu'un d'autre et non pas la personne qu'il eut aimé le plus au monde, qu'il aimerait le plus au monde. Jusqu'à la fin de ses jours, jusqu'à ce que cette vie cesse enfin. La libération, les retrouvailles, une éternité de soulagement, peut être de bonheur mais en attendant, il n'y avait rien, rien d'autre que la souffrance. Il avait connu d'autres personnes dans sa vie. Il y avait eu Ivy puis quelques hommes. Il les aimait à sa manière mais jamais de cet amour pur et simple. Indestructible. L'amour fraternel qu'il ressentait pour son frère et qui continuait chaque jour de creuser dans son cœur la moindre parcelle. Sa poitrine se vidait peu à peu chaque jour, jusqu'au moment où il aurait perdu son humanité. Il espérait que ce jour-là fusse celui où il serait face au meurtrier de son frère. Pour pouvoir faire ce qu'il avait à faire sans état d'âme. Pour pouvoir lui arracher la vie comme il lui a arraché la sienne et celle de son frère. Pour en finir. Enfin. Mais ce temps-là n'était pas encore arrivé. Il l'espérait proche mais se doutait bien qu'il pourrait se révéler bien long. Serait-il seul alors ? Une seule personne avait la réponse.
Cette personne était celle au regard froid à côté de lui. Pendant un instant, Stiles se demanda si c'était bien elle, sa petite sœur. Il resta un instant figé face à ses yeux. Ce bleu glacial avait quelque chose d'Irving mais alors il était mort. Joanny pourtant était bien vivante. Du moins en apparence. On aurait dit le regard froid d'un meurtrier, peut être était-ce alors vrai ? Peut être était-elle réellement devenue ce monstre au sang-froid et au cœur de glace ? Qu'avait-elle fait alors ? Quelle excuse trouverait-elle pour justifier ses actes et ceux du meurtrier de leur frère ? Était-elle comme lui ? Comme ce monstre ? Pouvait - elle avoir la capacité de faire la même chose que lui à un être humain ? L'avait-elle déjà fait ? Intérieurement, Stiles se sentit effrayé. En l'espace d'une seconde, il en vint à avoir peur de sa sœur. Non, elle n'était pas sa sœur. Sa petite sœur n'avait pas ce regard, pas cette voix. Il l'avait perdu alors, elle aussi. Un gouffre sembla se créer dans sa poitrine, un de plus qui menaçait de le faire sombrer. Il avait envie de se recroqueviller et de fermer les yeux. Fermer les yeux et ne jamais se réveiller. Sortir de cet enfer qu'était devenu son existence en l'espace de quelques années. Il n'en fit pourtant rien. Si la peur avait fini par apparaître dans ses yeux, elle disparut bien vite, pour laisser place à pire. Elle n''était plus qu'une étrangère maintenant, ça n'était plus Joanny. Quelle scrupule pouvait-il avoir maintenant à parler ? A asséner l'effroyable vérité ? Pour la première fois, il se permit vraiment à ressentir. Ressentir ses sentiments interdits à l'égard de sa sœur. Il lui en voulait. Il lui en voulait pour la mort d'Irving et en cet instant même, un sentiment de haine vint le saisir. Il était au bord du gouffre. Il n'avait plus rien à perdre. La folie qui menaçait de s'emparer de lui, put enfin le prendre. Lentement, elle s'insinua en lui. Son regard changea. Elle était responsable, il en était certain. Le doute était parti.
De son ton glacial, elle avait donc prononcé le mot meurtrier. Celui qu'il le hantait depuis maintenant six ans. Pourquoi ? Pourquoi ? Un rire nerveux et assassin vint se bloquer au fond de sa gorge, tandis qu'il commençait à prendre ses distances avec elle. Il la regarda pourtant fixement dans les yeux quand il s'adressa à elle d'un ton dur, presque haineux. Pourquoi ?
- Pour toi.
Il se releva soudain en proie de nouvelles émotions, face à la fenêtre, dos à sa sœur. Le chagrin, la douleur étaient toujours bien présents et menaçaient de le submerger à nouveau mais quelque chose d'autre était là, installé dans son âme. De la colère. L'avait-il déjà éprouvé ? Oui. Quand il avait enfin réalisé ce qui s'était produit. Quand il avait enfin réalisé la mort d'Irving. C'était d'ailleurs ce soir-là qu'Ivy et lui avaient rompu. La scène parfois encore venait hanter ses pensées. Pauvre Ivy !
FLASH BACK 2008, Londres.
Stiles était allongé sur son lit, dans un état catatonique. Une pièce d'un cent roulant entre ses doigts. Ses yeux continuaient de la fixer comme si elle était un simple objet entre ses doigts. L'était-elle réellement ? Perdu dans un monde vide de pensée, il entendit à peine les talons d'Ivy sur le pas de la porte. Sa chère fiancée. Il ne l'avait pas épargné ces derniers jours. Il se demandait comment elle pouvait encore supporter une loque comme lui. Depuis la nuit de la mort d'Irving, depuis l'instant où on les avait trouvé et détachait l'un de l'autre, il était dans un état second. Même le jour de l'enterrement, il avait été ailleurs. Son seul véritable contact avait été avec son frère. Mais il n'était pas réel. Cela faisait maintenant deux mois. Deux mois où boire et manger étaient devenus des options que seule Ivy lui rappelait. La compagnie était à la charge de leur employé. Mais il y accordait peu d'importance. Il n'était pas en état de conduire d'ailleurs. Il était en état de rien faire. Un vrai zombie. Ce soir-là marqua pourtant son réveil. La jeune femme s'approcha de lui et se pencha pour lui faire face. Avec un regard vide, Stiles concentra son attention sur elle. La pièce ou elle. Quelle différence ? Le ton de la jeune femme vint pourtant confirmer son attention.
- Stiles, il faut que je te parle !
Le ton était doux mais ferme, déterminé. Son regard était décidé, sans appel. Au prix d'un effort considérable, il se redressa sur le lit et lui fit face. Il attendit, sans dire un mot. Il n'avait plus parlé depuis des semaines à vrai dire, au point d'en oublier sa propre voix. Seule celle d'Irving et maintenant d'Ivy résonnait à ses oreilles. Ivy jouait avec ses mains nerveuse mais son regard était décidé. Son ton ne la fit pas mentir. Il étai dur, puissant, douloureux aux oreilles de son ombre de fiancé.
- Stiles, écoute. Je ne sais même pas si tu m'entends. S'il reste encore quelqu'un à l'intérieur de sa coquille vide mais je vais te le dire quand même, parce que c'est la dernière fois que tu entendras le son de ma voix. Comprends-moi, Stiles, je t'aime ! Mais cette vie, c'est pas une vie ! J'ai vingt-deux ans et je ne peux pas. Je ne peux pas rester avec quelqu'un qui ne ressent plus rien pour moi. Qui ne ressent plus rien tout court d'ailleurs. Je comprends. Je comprends que la mort de ton frère t'ai anéanti mais il faut faire le deuil, Stiles. Je t'ai laissé du temps, j'ai été patiente, j'ai été là, pour toi pendant tout ce temps. Mais ça fait deux mois, Stiles. Deux mois et rien. Cette nuit-là tu es parti en même temps que lui et il n'y a rien que je puisse faire pour te ramener. Alors voilà, je m'en vais. Je te quitte, Stiles.
Elle acheva puis les larmes aux yeux, elle prit la direction de la porte. Stiles resta figé dans la même position. Ces mots n'avaient engendré aucune réaction chez lui. Il était totalement déconnecté de la réalité. Elle aurait pu partir ainsi, ne jamais se retourner et rien n'aurait pu se passer. Mais elle ne l'a pas fait. Au moment de franchir la porte, elle se retourna vers lui.
- Je ne suis pas toi, Stiles. Je ne le serais jamais, je ne pourrais jamais être à ta place. Mais je suis au moins sure d'une chose. Si c'était à moi que c'était arrivé, si c'était ma petite soeur qu'on avait tué et défiguré de la sorte. Je ne serais pas restée sans rien faire. Je me serais battue. Pour elle, pour sa mémoire et pour la mort de son meurtrier. Stiles, c'est lui qui doit payer, pas toi. Si tu dois au moins te souvenir d'une chose ce soir, souviens-toi de ça. Soutiens-toi comment est mort ton frère.
Après un dernier soupir, elle franchit enfin la porte. Stiles resta un moment figé puis les choses se mirent en place. Comment est mort Irving. Des flash lui revenaient soudain, ses yeux s'équarpillent et il se lève d'un bond. Irving, où est Irving ?
- IVY ! Ivy, où est Irving ?
La jeune femme se retourna à mi-parcours du couloir. Elle se mordit la lèvre puis revint sur le pas de la porte. Avec un regard désolé, elle adopta un ton doux.
- Irving est mort, Stiles. Il y a déjà deux mois.
Pris de tremblements, Stiles se retient au battant du lit et regarda Ivy comme si elle était folle.
- Comment ? Comment il est mort ? - Il a été assassiné, Stiles. Pendant une tournée. - Qui ? Qui l'a tué ? - Je l'ignore, Stiles. Je suis désolée, je l'ignore. - Non. Non. Non.
Un flash, puis un autre. Il parut se débattre puis son regard changea. Il était mort. Irving était mort. Cet homme l'avait tué. Ce monstre l'avait tué. Sa respiration se fit saccadé, tandis que son coeur disparaissait de sa poitrine, pour laisser place à autre chose. Pourquoi, pourquoi lui ? Cette injustice, cet assassinat, cette monstruosité. Il se mit à hurler. Hurler de rage, de colère, de désespoir. Il hurla à s'en déchirer la gorge, à s'en tuer la voix. Il hurla, comme il avait jamais hurlé, comme il ne hurlerait sans doute plus jamais. Il hurla jusqu'à ce que sa voix cassée vint à se briser. De dépit et de colère, il se mit alors à tout casser dans la pièce. Absolument tout. Restée un instant, Ivy finit par s'éloigner en larmes pour ne plus jamais revenir.
FIN DU FLASH BACK
Stiles prit appui sur les battants de la fenêtre. Lorsqu'il se retourna enfin vers Joanny, sa voix était brisée mais forte. De la colère venait alors de prendre possession de ses mots.
- Tu te demandes qui l'a tué, Joanny. - il rit nerveusement, en proie à la démence - Mais c'est toi ! C'est toi qui l'a tué Joanny. Oh, je sais, je sais ce que tu dois te demander. Suis-je fou ? Peut être. Peut être suis-je fou !
Il eut un rire presque dément. D'autres tremblements vinrent saisir ses membres mais c'étaient des tremblements de colère, des tremblements de folie. Son regard était désespéré, au bord du gouffre. Une autre crise le menaçait. Beaucoup plus dangereuse cette fois, plus meurtrière aussi.
- Bien sur, bien sur. Ce n'est pas toi qui l'a tué avec une arme. Je le sais, Joanny. Mais si ce n'est pas lui, c'est sans doute quelqu'un pas vrai ? Oui, Joanny. Je connais ton petit secret. Je sais ce que tu es. Pourquoi tu l'es, combien tu en as détruit. Ca je n'en sais rien, mais tu vas surement me le dire. Le fait est, Joanny, que quelqu'un n'a pas apprécie. Quelqu'un que tu as blessé. Quelqu'un de pire encore. Et ce quelqu'un, Joanny, c'est celui qui a tué, Irving. C'est lui qui a tué notre frère, Joanny. Voulait-il ta mort, voulait-il t'atteindre, l'as-tu demandé dans un accès de folie ? Je n'en sais rien. Tout ce que je sais, c'est qu'aujourd'hui, je suis seul, ici, face à toi. Tu sais, Joanny, ce monstre a fait une erreur. Ce n'est pas Irving qu'il aurait du tuer. Ca n'était pas Irving, le mauvais frère. C'était moi, c'est moi qui aurait du mourir ce soir-là, c'est moi.
Ses yeux étaient presque fous mais ils étaient à nouveau emplis de désespoir. Et à la prononciation de ses derniers mots, ils vinrent s'emplir d'horreur. C'est moi. Irving. Il était à nouveau perdu dans ses pensées. Perdu dans son désespoir. Submergé par ces images qu'il tentait tant d'oublier.
FLASH BACK 2007, Londres
La nuit venait de tomber sur Londres. Stiles était au téléphone avec un client potentiel. D'une main, il notait rapidement les indications qu'il lui donnait pour son futur trajet. Le ton commercial et enjoué, il poursuivait ses questions, afin d'avoir le plus d'information possible. Le salaire à la clé promettait d'être grandiose. Irving sortit de la pièce du fond et adressa un sourire à son frère. Stiles interrompit un temps sa conversation pour se tourner vers lui.
- Ou vas-tu comme ça ? - La tournée de la vingtième ! Comme tous les soirs, tu as oublié ? - Tu n'avais pas rendez-vous à Victoria ce soir ? - Non finalement. Son père a eu un empêchement donc notre effroyable rencontre n'aura lieu que demain. - Ah dommage ! Je mourrais d'envie de t'entendre me raconter à quel point ce fichu diplomate est imbu de sa personne ! - Bah, tu peux bien attendre un jour. - Tu veux pas aller voir Vic' quand même ? Je t'ai donné ta soirée, si je me souviens bien. J'ai prévu de faire la tournée à ta place. - Non, c'est bon. Je l'ai déjà vu tout à l'heure et puis puisque je suis là, je vais aller faire ma tournée. Comme d'habitude. - Bah si tu y tiens ! Et rentre pas trop tard, cette fois ! Les mamies peuvent se passer de toi, Irving !
Il avait dit sur un ton moqueur mais Irving avait accueilli ces propos avec le sourire. Comme toujours. C'était sa plus grande qualité. Irving était souriant. Toujours. Stiles aussi souriait. C'était probablement l'un de ses derniers vrais sourires. Le dernier qu'il verrait de son frère. Irving quitta la pièce, les clés tournant dans ses mains et franchit la porte d'entrée.
Plusieurs heures avaient passés depuis le départ d'Irving pour sa tournée. Toujours à la boutique, Stiles commençait à s'impatienter.
- Irving, où es-tu ?
Il hésita et puis,
- Oh et puis zut ! Je viens te chercher !
Il prit ses propres clés, éteignit toutes les lumières et ferma boutique. Il partit rejoindre sa voiture et brancha le GPS sur la tournée de la vingtième. Il démarra le véhicule et commença à circuler dans les rues de Londres. Il ne roulait pas très vite, ne souhaitant pas louper de vue le taxi de son frère. Il était sans doute encore en train de rendre service. Ca lui ressemblerait bien mais il fallait tout de même qu'il rentre. Même les saint-bernard ont le droit de dormir ! Après plusieurs rues et plusieurs tours, Stiles commença vraiment à s’inquiéter mais où était-il ? Ce fut alors qu'il le vit. Le taxi, la porte conducteur ouverte tout comme la porte passager. Pourquoi les avait-il laissé ouvertes ? La zone était déserte. Pas un bruit, pas un son. Soudain, pris de panique, Stiles gara rapidement son véhicule et courut vers le taxi. Il arriva du côté conducteur. Personne. Mais où, où es-t ... Stiles se figea soudain en voyant une silhouette étendue quelques mètres plus loin, immobile. Paniqué, Stiles courut vers elle.
- Non, non, non, non !
Il arriva face à elle et le vit. Lui ? Était-ce vraiment lui ? Non, ça n''était pas possible, ça n'était pas son visage, leur visage. Et dans la pénombre, il les remarqua. Ses yeux. Ses yeux d'un bleu cristallin. Les siens, les leurs. Il les revit comme la dernière fois, plein d'affection et de rire. Pourquoi étaient-ils comme ça maintenant ? Si froids, si glacials, sans vie. Sans vie ... Stiles s'effrondra à genoux à côté de lui et ramena lentement le corps de son frère vers lui, vers la lumière et là, il vit. Il fut un instant prit de nausées. Son visage. Il était .... défiguré. Lacéré d'une lame. Du sang coulé encore par certaines plaies bien que le corps fusse froid. Seuls ses yeux restaient. Reprenant soudain ses esprit, Stiles étendit son frère sur le sol et commença avec des gestes incontrôlés à toucher son corps. La respiration saccadé, il mit ses deux mains sur sa poitrine et tenta de le réveiller de le ranimer. Il était seulement dans le coma, seulement dans un état catatonique, le choc sans doute, la douleur aussi. Il pressa à force, tentant en fin de faire redémarrer sa respiration. Ses mains étaient baignées de sang chaque fois un peu plus, à chaque flexion mais il n'arrêtait. Il resta là, pendant plusieurs minutes, tentant désespérément de le ramener à la vie.
- Allez Irving ! Allez, réveille-toi ! Je suis là, maintenant ! Réveille-toi ! Tu n'as plus à faire semblant, c'est fini ! Je vais m'occuper de toi. On va te soigner et tout ira mieux. Je t'assure et demain, tu vas tout tuer devant le beau-père. Hein ! J'en suis sure. Allez, Irving, réveille-toi ! Réveille-toi ! IRVING ! REVEILLE-TOI MAINTENANT ! C'est bon, c'est fini, je suis là. Je suis là, Irving. Irving
Il s'arrêta soudain de forcer, en larmes.
- Petit frère, s'il te plait. Réveille-toi. S'il te plaît. Irving, je t'en supplie. Irving.
En sortant ses mains, il put voir alors l'ampleur des dégâts. Des coups de couteaux, des impacts de balles. Mais comment ? Mais qui ? Pourquoi ? En état de choc, il porta le corps de son frère sur ses genoux. Sa voix était lointaine, douce.
- Irving, Irving, mon petit frère ! Ca ... ca va aller ! Tout va bien aller ! On va s'en sortir ! Pas vrai ? On s'en sort toujours toi et moi. Toujours !
La berçant doucement dans ses bras, il continua de pleurer mais ne fit rien pour faire cesser ses larmes. Elles étaient incontrôlables. Dans un geste extrêmement doux et affectueux, il déposa ses lèvres sur son front ensanglanté. Sa voix était lente mais le débit infini, le ton bas mais affectueux.
- Ca n'est pas réel. Tu n'es pas mort. On est en train de rêver. On va se réveiller. Tu vas te rêver. Tu verras. Et demain, on en rira. Soulagés d'être là tous les deux. Les frères Kellers, envers et contre tout !
Il sourit légèrement à son frère, continuant de le bercer.
- Chut, ne t'inquiète pas ! C'est rien. Tout va s'arranger.
Irving. Il resta ainsi toute la nuit jusqu'à l'aube. Jusqu'à ce que quelqu'un les trouvent, sans jamais cesser de lui parler, de l'embrasser, de le bercer comme un enfant.
- Irving.
Ce mot chuchoté fut le dernier qu'il prononça avant des semaines, avant de réaliser qu'Irving était mort. Qu'il était mort lui aussi cette nuit-là.
FIN DU FLASH BACK
Stiles suffoqua presque. Il s'appuya sur une des chaises, à nouveau en proie aux larmes mais pas seulement. A la folie aussi. Il était perdu, anéanti. Il hurla puis il se retourna vers elle. Il parla à nouveau, vociférant presque. Sa voix menaçant de se briser
- Qu'as-tu fait ? Dis-moi, Joanny qu'as tu fait ! Je veux savoir ! Tu me dois la vérité, Joanny. Tu la dois à Irving. Q''as-tu fait au point que quelqu'un veule le tuer ? Au point que quelqu'un en arrive à le tuer ? A lui faire ça ? Parce que tu sais ce qu'ils lui ont, Joanny ? Oh peut être pour toi, ça n'est rien de choquant, peut être as-tu toi même fait subir la même chose à quelqu'un ?! Il l'a défiguré, Joanny. Défiguré. Tu voies ce visage en face de toi, ça n'était plus le sien. Tu sais comment je l'ai reconnu, Joanny ? A ses yeux. A ses fameux yeux qui font la fierté de notre famille. Nos fameux yeux bleus. Le reste n'était plus que lambeaux. Huit coups de couteaux et plusieurs balles dans la poitrine ! Il aurait pu se contenter de lui tirer une balle ou bien de le poignarder ! Mais non, non ! Il a fallu qu'il le fasse souffrir, qu'il s'acharne, qu'il le détruise totalement. Alors quoi ? Pourquoi Joanny ? Pourquoi ? DIS-LE MOI ! DIS-MOI POURQUOI ON L'A TUE ! DIS-LE MOI !
Les derniers mots lui brisèrent la voix. Il était en larmes et s'effondra une nouvelle fois sur le sol. Sa voix fut alors toute basse, suppliante.
- Dis-le moi. Dis-moi pourquoi on me l'a prit ! Je suis prêt à tout entendre, à tout te pardonner mais dis-le moi. Je t'en supplie.
La colère avait disparu de ses yeux quand il les plongea dans les siens. Ils étaient suppliants comme ses mots. Il était désespéré, anéanti. Détruit.
WELCOME TO DETROIT
Invité
Sujet: Re: Parce qu'il ne reste que nous ... [Stiles & Joan Kellers] Ven 3 Aoû 2012 - 19:32
Des mots à vous déchirer le coeur en mille morceaux. Une douleur lancinante qui passe d'abord dans vos oreilles avant de faire percuter votre cerveau. La fin d'un monde. D'une ère. Il y a peu, Joan était une adolescente comme les autres, avec des rêves pleins la tête: elle serait avocate, elle protégerait les gens démunis des injustices. Elle les ferait tous croupir à l'ombre alors qu'elle embrasserait une carrière digne des plus grands. Une adolescente qui voyait l'amour en grand, elle l'a touché du doigt, effleuré. Elle n'aurait jamais cru que son monde s'écroulerait ainsi en une simple phrase, à peine une phrase juste un mot, ce mot qui l'atteignait au plus profond de son être. Joan Kellers, l'être insensible, de glace n'avait vécu qu'à travers des idéaux. Elle rêvait, elle aurait pu éventuellement réaliser une oeuvre magnifique. Embrasser le bien comme un sportif pousse son dernier effort avant la ligne d'arrivée. Mais la réalité revenait toujours vous frapper, toujours. Au moment où vous décidez de laisser le passé derrière vous, de ne faire plus qu'un avec l'espoir. Le renouveau qui brille dans vos yeux, cette nouvelle vie qui vous tend les bras. Avoir vaincu, de la plus belle manière, à la sueur de son front, à la douleur des entrainements comme une préparation sportive des plus intenses. Mais une victoire à quel prix? Joan ne s'était jamais posée la question pour la simple et bonne raison qu'elle était seule, seule contre ce monde qu'elle ne comprenait pas. Qui aurait imaginé que la vie viendrait lui arracher ce nouveau rêve? Lui arracher son coeur tout simplement. Les restes symboliques qui avaient constitué il y a dix ans, Joanny, l'adolescente gracieuse, intelligente et travailleuse qui promettait à sa mère de changer le monde. Elle avait changé le monde, elle l'avait plongé un peu plus dans l'obscurité, elle n'avait rien à perdre. Le seul prix qu'elle avait payé et de bonne grâce, c'était son âme. Elle ne pouvait regretter de s'être abandonnée à cette cause, elle en avait eu besoin de cette vengeance. Revivre passait par là. Le voir mort, le voir souffrir de ses mais. Il n'y avait que cela qui avait compté à ses yeux. Laisser tout derrière elle, cette famille qu'elle aimait pourtant... Mais, rien ne dure toujours et cette écrasante réalité venait vous retirer cette infirme part de vous même, la seule qui restait éveillée. Joan n'était plus. Elle ne bougeait pas, ne comprenait pas. Elle n'avait jamais parlé de sa vie. Jamais. C'était la règle d'or d'ailleurs. Elle était la seule qui devait être impliquée dans ce plan, la vengeance lui appartenait. Et voilà qu'aujourd'hui, la culpabilité la prenait d'assaut. Son coeur battait la chamade alors que Stiles ne supportait plus le poids du regard bleu glacial de sa jeune soeur. Joan ne le regardait pas, elle ne se retourna pas. Elle ne dit rien pendant presque deux minutes. Pourquoi parler alors qu'aucun mot n'existait pour définir ce qu'elle ressentait à l'instant? La cadette de la famille ne voulait pas s'avouer coupable, elle n'avait pas tué Irving, c 'était tout bonnement impossible. Il n'y avait aucun témoin, elle avait toujours été méthodique à part peut être une unique fois...
FLASHBACK 2006, Quelque part en Floride.
La main sur son fouet, Joan avait les mains ensanglantés après cette épreuve de force. Sa victime résistait, le sourire aux lèvres. Elle en avait rencontré des fous mais certainement pas aussi dangereux que ce Myles Stevens. Elle l'avait traqué par intermittence, préférant se consacrer à des cibles plus simples avant d'attaquer le vrai problème. Kyle était réellement fier d'elle. Il restait dans le coin de la salle, un rire sadique et tonitruant qui troublait le calme apparent de ce moment de torture. Joan tentait de reprendre son souffle alors que la victime, avec une féroce agilité, réussissait à s'approcher de la jeune femme avant de lui prononcer quelques mots, dans l'espoir que le maitre ne l'entende pas. Mission accomplie pour Stevens qui se remit en place, prêt à recevoir son châtiment. Qui ne vint pas. Joan avait lâché son arme, le célèbre fouet gisait à terre, avec le reste d'hémoglobine du criminel. La mâchoire serrée, un regard haineux, Kellers resta plantée devant sa victime qui continuait de sourire devant son initiative. Puis, sans crier gare, elle se détourna, refusant d'entendre les réprimandes de son patron. Celui-ci vint s'interposer entre elle et la porte, lui serrant le bras bien plus fort que souhaité au premier abord...
Tu n'as jamais abandonné. Jamais, ne me dis pas qu'un simple casseur te fait peur. Qu'a t-il dit pour froisser les sentiments de Mademoiselle?
Joan ne cilla pas, affrontant l'homme qu'elle haïssait le plus au monde, sans honte, sans peine. Simplement une froideur exemplaire avant de parler d'un ton monotone, de réciter les paroles de Myles Stevens.
Le Dieu Celte ne le sauvera pas et sa beauté périra de mes mains.
Puis, Joan se détacha de son agresseur alors que celui ci tentait de comprendre. La jeune tueuse quitta la salle sans se retourner. Elle avait compris la menace, l'avait entendu... Elle savait pertinemment qu'il faisait référence à son frère, dont le nom signifiait beau dans l'ancien temps...
FIN DU FLASHBACK.
Mais il était mort et enterré. Kyle avait fini le travail. Il était rentré ce soir là, un simple hochement de tête victorieux face à l'oeuvre accompli. Il avait fait taire la mystique voix de Myles Stevens à jamais. La seule fois où Joan avait laissé planer le doute. Une rare fois qui avait des conséquences terribles aujourd'hui, qui lui faisait sentir le poids de son erreur, de sa jeunesse. Malgré sa fougue, son envie, sa vengeance, Joan avait été vaincu par meilleur qu'elle. Pour toi. Les mots résonnaient à ses oreilles tels une secte récitant le chant protocolaire à la cérémonie funéraire. Joan avait creusé la tombe de son frère, voilà ce que Stiles impliquait. Avant de se relever, de la laisser lutter contre elle même, Stiles avait lancé tout son être dans ce regard réprobateur. Il lui en voulait. Évidemment. Elle avait abandonné sa famille, un à un. D'abord sa mère, elle l'avait laissé périr ce soir là. Joan le savait. Au fond d'elle, ses intentions étaient claires, ce message voulait tout dire. Les deux femmes avaient conclu un pacte: Joan ne dirait rien, la laisserait partir contre une vie bien vécue pour la jeune fille. Les désirs d'une mère, d'un d"espoir face à la souffrance de son unique fille. Joan l'avait laissé s'en aller, sans une once de regret, sans une once d'amour. Et pas un pleur. Puis, son père. Elle était partie ce soir là, le laissant seul face à son funeste destin, la maladie telle une épée de Damoclès au dessus de son crâne. Joan n'avait pas regretté une seule fois ce départ précipité: pas un mot, juste un regard et les pleurs du père délaissé qu'elle entendit en refermant la porte. Et aujourd'hui, sonnait la fin d'Irving Kellers, le frère aimant, souriant, généreux de la famille. Certainement, la perle, cette magnifique perle qui rendait le monde plus beau que par sa présence. Encore une fois, Joan était à l'origine de ce départ. Elle pourrait certainement se pardonner celui de sa mère, après tout, elle l'avait voulu. Elle avait simplement respecté son choix. Elle pourrait sûrement se remettre de celle de son père, regrettant simplement de ne pas avoir été là pour ses derniers instants mais elle ne pourrait certainement jamais envisager une quelconque renaissance pour la mort d'Irving. Elle avait tué son frère. Tout simplement. Son égoïsme, son incapacité à faire totale abstraction de son ancienne vie avaient coûté la vie à une des personnes qu'elle aimait le plus.
Joan se releva, portant le poids du mal et de la douleur sur ses épaules. Pas une larme, sa douleur restant retranchée au plus profond de son âme. Elle était enfin debout, ses jambes acceptant encore de la porter. Elle ne prononça aucun mot, à quoi bon? Elle attendit la suite. La douleur augmenta considérablement lorsque le rire dément de Stiles résonna dans son humble demeure. Il résumait ses interrogations: non, elle n'avait pas appuyé sur la détente, non, elle n'avait pas usé de son poignard contre lui. Elle ne savait rien de tout cela, elle n'était pas là. Elle les avait abandonnés. Stiles continua de la marteler: Joan est responsable parce qu'elle était devenue son pire ennemie, qu'elle avait donné l'opportunité à des monstres inconnus de se venger à leur tout. Payer le prix de cette perte valait toutes les peines de la Terre. La douleur était incomparable, la honte la prenait aux tripes et pourtant, aucune larme ne monta. Stiles devenait fou, des sanglots le transperçant à nouveau alors qu'il annonçait qu'il n'avait plus une once d'humanité en lui. Joan avait perdu toute sa famille, Stiles avait également disparu, suivant les traces d'Irving, ne conservant que cette coquille maladroite, vide et déjà loin de la Terre ferme. Joan ne commenta pour le moment cette agression, elle était encore en train de digérer l'annonce. Elle tenta toutefois de mettre ses cordes vocales en action, toujours dos à Stiles.
Non, tu n'es pas fou Stiles. Tu es toujours en vie seulement.
Joan n'avait aucune idée de la raison qui l'avait poussé à parler ainsi. Elle souhaitait seulement se donner une contenance, évaluer les dommages psychologiques opérées par la nouvelle. Ce qui frappait en cet instant était l'état amorphe de Joan, elle était vide. Plus aucun sentiment ne l'atteignait, si Stiles avait raison, elle était finie. C'était la seule chose dont elle était certaine. Elle ne voulait plus démabuler sur Terre alors qu'il était parti. Elle se refusait au bonheur s'il n'était plus là. Irving avait été un modèle de vertus et elle avait assassiné le bien même, c'était une idée plus qu'inconcevable pour Joan. Voilà la conclusion qu'elle avait faite en cet instant alors que Stiles parla de nouveau, à deux doigts d'exploser littéralement. Stiles expliqua encore une fois que c'était uniquement sa faute. Sa quête de vengeance, ses tortures, ce massacre à répétition, cette absence de peur, de honte, de remords, de toutes ces émotions humaines avaient conduit un homme à agir, à la toucher en plein coeur. Atteindre sa faiblesse pour la terrasser. C'était chose faite désormais. Stiles se mura dans un silence étrange que Joan préféra rompre par un simple commentaire, encore une fois.
Aucun de vous deux n'aurait dû mourir, ce n'était pas dans le plan.
Joan était revenue des mois en arrière, peut être des années. Elle était la Joan meurtrière, froide, voire même glaciale qui n'avait plus rien à offrir de joli au monde à part cette façade. Ce n'était pas dans le plan. C'est tout ce que Joan savait, elle n'avait pas prévu cela. Jamais, elle n'avait envisagé qu'on viendrait lui arracher le coeur de la sorte, encore moins que ce serait le dernier membre de sa famille, son sang qui lui enfoncerait le poignard tranchant de la culpabilité. Mais elle ne s'effondrait pas, elle n'avait plus rien à ressentir, plus rien à faire dans ce monde. Sa vengeance ne l'avait pas soulagé, elle était amère, pas contre Kyle mais contre elle même. Elle n'avait jamais trouvé la solution miracle pour continuer de vivre. Elle n'avait pas vécu.. Elle y avait cru en retrouvant Ethan mais désormais, elle devait le laisser dans la case des souvenirs lointains, n'étant plus à même d'atteindre sa propre âme, délaissée par la peine.
Le masque de Stiles s'effondra. Joan se détourna vers lui, le voyant crier au diable, lui demandant pourquoi. Légitime question. Joan n'avait pas la réponse. Elle l'avait peut être eu il y a quelques années, lorsqu'elle était encore capable de justifier ses actions. Ce n'était plus le cas. L'arrivée d'Ethan l'avait chamboulé une première fois, sa garde étant fortement diminuée, lui remémorant qu'elle avait mal agi, qu'elle aurait pu vivre à ses côtés. Mais non, c'était la haine qui était venue l'accueillir et non les bras rassurants de son aimé. Justification qui était désormais inexistante après la mort injuste d'Irving. Ses mains étaient salies depuis de nombreuses années mais le poids du fratricide l'empêchait de respirer convenablement, l'image agonisante de Stiles lui déchirant la poitrine. Joan ne voyait plus Stiles, elle voyait la douleur d'Irving au moment de quitter cette Terre, si jeune, sans avoir eu le temps de vivre une vie décente qu'il aurait tant mérité mais Irving n'était plus. Il ne restait que Stiles, un Stiles à genoux, cherchant une aide, une justification qui ne venait pas. Les lèvres de Joan étaient scellées tout comme son âme était vide désormais. Cette fois-ci, elle n'alla pas porter secours à son frère, toutes ses forces la quittant. Lui, la suppliait de lui avouer ses tords alors qu'il exposait les dernières secondes d'Irving, son visage tuméfié, brisé, ce qu'elle avait plus ou moins fait subir à d'autres êtres. Image douloureuse de ce qu'elle était capable de faire, elle avait fait le mal. Elle s'était fourvoyée, elle ne valait rien, sa vengeance non plus. Les yeux d'Irving. Cette vision magique de son sourire lui martelaient le crâne, ses cris se mêlant à l'affaire. Elle posa ses mains sur sa tête et se laissa tomber à terre, ne réalisant pas ce qu'elle faisait. Son corps la lâchait, son âme l'avait déjà quitté. Il fallait rester forte, pas pour elle mais pour Irving. Elle devait donner quelque chose à cette moitié d'homme qu'elle avait en face d'elle. Il fallait qu'elle lui laisse une chance de vivre à nouveau, avant de le quitter. Alors, Joan se concentra pour enfin confesser ses pêchés, enfin afficher ce qu'elle était vraiment, un monstre... Elle releva les yeux, laissant ses bras tomber et ne lâcha pas le regard de Stiles pendant la durée de son discours, alors qu'ils étaient toujours à terre, deux mètres les séparant physiquement, des milliers moralement.
Tu n'imagines pas ce que cela fait d'ôter la vie d'un être. Quelqu'un de si semblable à soi même et pourtant si différent sous la torture... Leurs membres cédant sous le poids des coups, leurs gémissements te suppliant d'arrêter.. Oui, Stiles, j'ai tué. Et je ne peux pas retourner en arrière. Je ne regrette même pas. Il le fallait si je devais continuer à arpenter cette Terre, je devais le tuer, lui faire payer ma douleur. Alors, je l'ai fait. Je l'ai suivi pour mieux lui faire mal. Et, j'ai aimé faire du mal à ces inconnus, ces criminels qui ne méritaient certainement pas de considération. Voilà la raison Stiles: la vengeance d'une jeune femme violée dans son intimité. La haine d'un être humain qui n'a jamais compris son fardeau, qui n'aurait pas pu continuer de vivre en sachant son bourreau sur ses deux jambes. Irving ne devait jamais faire partie des dommages collatéraux, il n'aurait jamais dû être une cible, toi non plus. Je ne comprends pas, je ne suis plus rien désormais, plus rien pour eux.
Aucun sanglot, aucune émotion, un vide magistral se déversant dans la noirceur de sa maison alors qu'elle lâchait le regard de son frère aîné. Elle avait prise sa décision, sans même le savoir, son corps lui intimant de s'arrêter maintenant..
WELCOME TO DETROIT
Stiles C. Kellers
AGE : 34 NOMBRE DE CONTACTS : 217 ANNIVERSAIRE : 15/10/1990 EN VILLE DEPUIS LE : 21/07/2012 AVATAR : Jake Gyllenhaal
Sujet: Re: Parce qu'il ne reste que nous ... [Stiles & Joan Kellers] Mer 22 Aoû 2012 - 16:48
D'un moment à l'autre, Stiles menaçait de basculer dans la folie. Pas la folie révélatrice comme celle qu'il avait affronté quand il s'était rendu compte de la vérité. Non simplement la folie. Le point de non-retour qui lui vaudrait un enfermement pour l'asile jusqu'à la fin de ses jours. Parce qu'il le savait. S'il cédait, il ne reviendrait pas. Il n'avait rien pour le retenir, rien, ni personne pour le maintenir à la surface, pour lui donner une raison de revenir à la raison. Pendant un instant, il avait pensé à elle. Sa petite soeur. La dernière trace de son sang sur Terre mais non. Pas même elle ne pourrait lui donner envie de revenir. Elle était morte cette nuit-là comme il l'avait été avec Irving. Les deux derniers survivants de la famille Kellers n'étaient plus que des zombies. Il ignorait jusqu'à quel point, elle était touchée et ne se risquait à l'évaluer mais il savait que lui-même n'était plus. Il ne vivait pas, il survivait. La douleur allait le faire basculer dans la démence. Alors quoi ? Qu'est-ce qui l'empêchait soudain de sombrer ? Son rictus se changea en rire sans joie. La même raison qui faisait qu'il était encore en vie, qu'il était là face à cette meurtrière. Irving. Toujours Irving. Sa mort n'aurait pas du être. Pas comme ça, pas si jeune. Parfois il se demandait comment cela s'était produit. Si cet homme l'avait d'abord "séduit" avant de le tuer. S'il avait tenté de fuir. Au fond, au delà de la vengeance, c'étaient aussi ses dernières instants que Stiles voulait connaître. Son frère était mort quand il était arrivé, il le savait aujourd'hui mais alors comment, quand était-il mort ? Les marques avaient-elles été gravées de son vivant ? Nerveusement, il passa sa main sur son visage, imaginant ses doigts en lame de couteau. Les yeux fous, il avait à peine prêté attention aux mots de sa soeur. Elle était bien peu bavarde mais chaque parole avait l'effet tranchant d'un poignard. Avait-elle seulement conscience de ce qu'elle disait ? Un nouveau rire fou le prit. En vie ? Elle appelait ça vivre ?
- En vie.
Passant sa mâchoire inférieure sur ses lèvres, ses doigts nerveux derrière son cou, il la regardait presque souriant. Mais ce sourire n'avait rien de joyeux. C'était presque un sourire dément. Un pas de plus.
- Tu m'as bien regardé Joanny ? Tu trouves ... tu trouves que j'ai l'air en vie ?
Il marqua une pause reprenant son sérieux, son regard pénétrant vers sa soeur, comme s'il essayait de la saisir. Sa voix était étrangement calme, trop calme, trop douce.
- J'ignore si tu as déjà réellement aimé quelqu'un, Joanny. Lui excepté et encore. Je ne te demande pas de comprendre. Je ne l'ai jamais demandé à qui que ce soit. Mais je t'en prie. Ne parle pas d'une chose que tu ignores. Je suis plus le même Joanny. Certes, c'est vrai physiquement, je me tiens là, devant toi mais à l'intérieur. A l'intérieur, il n'y a plus personne. Je suis mort. Avec lui. Et sa mémoire est la seule chose qui fasse que je sois encore de ce monde et non pas à ces côtés, comme j'en rêve depuis cette nuit-là.
L'instant ne dura pas. Des flash envahirent son esprit, il redevient bientôt aussi fou. Il lui assena la vérité, souffrant autant qu'il parlait. Chaque image avait un effet meurtrier, chaque souvenir le frappait comme un coup de dague dans la poitrine. Oui, il savait la vérité et oui, il la tenait pour responsable de la mort d'Irving. Comment pourrait-il en être autrement ? Il se refusait à être le seul à porter cette culpabilité, parce qu'au fond, il savait que si ça n'avait pas été son frère, ça aurait été lui. Il le savait. Ca devait être lui en tournée ce soir-là. Peut être même était-il la véritable cible mais du fait de leur ressemblance, le meurtrier n'y avait pas fait attention ou tout simplement cela n'aurait pas eu d'importance pour lui. Il aurait tout donné. Tout donné pour retourner en arrière et partir en tournée à sa place. Comme prévu. Et mourir à sa place s'il l'avait fallu. Oui, il l'aurait fait. Sans la moindre once d'hésitation. Il aurait même pu supporter la torture de son vivant si cela avait pu lui sauver la vie. Il est vrai que le corps a ses limites. Qu'il ne peut tout supporter sans céder même au prix de la volonté. Mais rien, rien n'aurait pu briser les sentiments qu'il avait pour lui. Là où son corps aurait cédé, son esprit même, ce sentiment là ne l'aurait jamais trahi. Jamais. Assis sur cette chaise au bord de la suffocation, il se figea pourtant en entendant parler Joanny une nouvelle fois. Mais de quoi parlait-elle ? Le plan. Le plan.
- Le plan ? Le plan ?! Parce qu'il y avait un plan ? Vraiment ? Et c'était quoi ? Hein dis-moi ? Quel était ton plan pour tes deux misérables frères ? Hein ? Pour ta famille, Joanny. On était censés survivre ? Censés résister ? Tu sais ce qu'il lui a fait Joanny, pas vrai ? Mais comment j'ai pu être aussi con ! Et c'est quoi la suite maintenant ? Hein ? Tu vas me tuer aussi ? Moi, ton propre frère ? Oh mais pardon, c'est vrai que nous ne sommes plus rien pour toi !
Il se releva et se mit à vociférer. La douleur était insupportable. Il devait savoir, il devait à tout prix savoir. Quitte en mourir. Quitte à ce qu'elle doive le tuer aussi. Il n'en avait que faire. Il voulait la vérité. Pour lui, pour Irving. Comment avait-il pu la perdre à ce point-là ? Elle s'était laissé tomber à terre et il ne pouvait plus que la supplier. Il était prêt à tout. Il n'avait plus que ça. Les larmes coulant encore sur ses joues. La colère l'avait vidé. Il était prêt à tout supporter. A tout entendre. Joanny. S'il te plait. Elle releva son regard vers lui et il se calma un instant. Adsorbé par le moindre mot qui parvenait à ses oreilles. Il ne savait pas comment l'accepter. Prêt ? Non il ne l'était pas. Il le savait. Il l'avait même accusé. Mais l'entendre de sa bouche avait quelque d'implacable, d’irréversible. Sa petite soeur était une meurtrière. Une tueuse de sang-froid. Oui, Stiles, j'ai tué. La torture, l'absence de regrets. Mais comment, pourquoi ? Qu'avait-il manqué ? Quel frère avait-il été au point de laisser sa soeur sombrer de la sorte ? Etait-ce en elle depuis toujours ? Ou avait-elle changé de la même façon que lui ? Il savait qu'il pouvait tuer. Quand bien même, il consacra maintenant sa vie à sauver celles des autres, il savait qu'il pourrait le tuer, lui. Il n'aurait aucune pitié pour cet homme. Il ne pouvait pas en avoir. Et soudain, il comprit. Ils n'étaient pas si différents mais leur cible était différente. C'était donc lui, le responsable. Son violeur. Celui-là même qu'il avait lui-même juré de tuer s'il remettait la main dessus. Il comprenait ce meurtre. Il comprenait ce choix. Mais les autres ? Comment avait-elle pu en tuer d'autres sans en tirer de regrets ? Était-ce avant, après ? Elle parlait de criminels. Cela atténua à peine le sujet. Il aurait du prendre peur. Il aurait du la haïr pour le monstre qu'elle était devenue. Pour avoir oser faire souffrir des hommes comme on avait fait souffrir son frère Mais il n'y avait rien de cela. Pas encore du moins. Non, le sentiment qui primait soudain était la culpabilité. Comme un coup de boomerang, celle qui avait précédé la mort d'Irving lui revenait en pleine face. A mourir de souffrance par amour pour son frère, il avait presque fini par oublier qu'il avait oublié de sauver quelqu'un d'autre avant lui. Il se détestait alors bien plus qu'il ne la haïssait, elle. Elle avait une excuse. Quelle excuse avait-il, lui ? Il était son grand-frère. Il était l'aîné des trois. Il aurait du les protéger tous les deux. Il aurait du la protéger, elle. Il revoyait l'image de l'ami de cette dernière après cette nuit-là. Il s'était senti coupable mais il n'avait pas été le seul.
FLASH BACK Londres, 2002.
Stiles était avec Irving. Depuis plusieurs heures déjà, il ne cessait de le targuer de questions. Ils étaient souriants, l'un un rire à peine masqué dans la gorge, l'autre le rouge aux joues.
- Allez, dis-moi, c'est qui ? - Stiles, arrêtes, je te dirais rien ! Tu sais pas tenir ta langue ! - Oh allez ! Pas à moi, Irv' ! Dis-moi au moins si je connais ! Fille ou garçon ? Tu sais, si t'es gay, je m'en fous ! C'est pas moi qui vais venir te causer problème avec ça ! - Non, c'est pas un garçon. Mais arrêtes-là, je te dirais rien ! - Irving ! - Non.
Prenant un ton faussement offensé, il était en réalité très content de l'effet exercé sur son frère. Tout sourire, Stiles sauta sur son frère jumeau.
- Tu vas voir si tu veux pas me le dire ! - Stiles ! Arrêtes, tu vas nous faire tomber !
Aussitôt dit, aussitôt fait. Les deux frères étaient tombés du canapé, littéralement éclatés de rire.
- Tu es incorrigible, Sti' ! - Tu peux parler !
Les deux frères étaient en train de se relever quand ils entendirent frapper à la porte. Ils se regardèrent surpris et Stiles prit la direction de l'entrée. Se recoiffant brièvement dans la glace du couloir, il ouvrit la porte et vit apparaître deux officiers de police. Irving arriva derrière lui, inquiet à son tour.
- Monsieur Kellers ? - Oui. - C'est au sujet de mademoiselle Joanny Kellers. - Que s'est-il passé ? Elle va bien ? - Je suis désolée, messieurs Kellers. Elle est à l’hôpital. - Comment ça ? Qu'est ce qu'il s'est passé ? Elle va bien ? - D'après ce que l'on sait, elle était agressée sexuellement par un homme dans la soirée.
Stiles se figea sur le pan de la porte. Il ne pouvait pas y croire. Joanny. Sa petite Joanny. Agressée ? Non, ça n'était pas possible. Qui avait pu lui faire ça ? Il s'appuya sur le battant, sentant à peine la main d'Irving rejoindre la sienne derrière lui. Il se tourna vers lui, ses yeux baignaient de larmes. Stiles commença à reprendre consistance.
- Qui lui a fait ça ? - Nous l'ignorions, monsieur Kellers mais nous pensions que vous aviez peut être une idée. Votre soeur avait-elle des ennemis, vous a - t - elle fait part de quelque chose qui pourrait nous aider ? - Non, non. Qui, qui pourrait lui vouloir du mal ? - Vos parents sont là ? - Non, ils sont de sortie. Ils rentrent demain. - Vous devriez peut être les appeler. - Je .. oui. Joanny, je peux la voir ? On peut la voir ? - Bien sur, monsieur, on va vous accompagner.
Il se tourna, toujours en état de choc vers Irving. Ce dernier ne disait rien visiblement aussi choqué que lui.
- Va, va chercher les clés, je ... je vais aller prendre des affaires. Pour Joanny.
Il se dirigea vers l'étage, les laissant tous sur le pas de la porte. Il monta les escaliers machinalement, des scénarios pires les uns que les autres passant dans son esprit. Son souffle se fit de plus en plus accéléré et quand il atteint la chambre de sa soeur, il eut du mal à ne pas s'effondrer sur le lit. Il devait la voir. Il devait savoir comment elle allait, ce qui s'était passé. Peut être qu'Ethan le savait. Comment cela avait-il pu arriver ? Il ouvrit les placards en grand et commença à jeter en vrac des affaires sur le lit. De quoi pouvait-elle avoir besoin ? Il se sentait tellement stupide. Il se retint pourtant de pleurer. Il allait devoir être le plus fort des trois. Joanny était sans doute dans un état pitoyable et il savait qu'Irving ne lui serait d'aucune aide. Ressentant soudain l'envie pressante de la voir, il prit le premier sac qui lui tombait sous la main et enfourna les affaires dedans avant de redescendre rapidement les escaliers. Irving paraissait toujours en état de choc. Il lui parla du regard et les deux frères suivirent les agents jusqu'à l'hôpital. Le trajet parut durer une éternité. Quand ils arrivèrent enfin, Stiles sortit presque en courant de la voiture. Parlant précipitamment, il demanda aussitôt à la voir en dépit des remarques des infirmières. A vrai dire, il les entendait à peine. Il devait la voir. Savoir qu'elle était là, en vie. Il finit par obtenir raison et fut conduit Irving sur ses talons jusqu'à la chambre. Il ne put rien dire. Laissant libre cours à ses larmes, il quitta aussitôt la pièce pour rejoindre le couloir, il s'effondra contre le mur et mit sa tête sur ses genoux. Il sentit Irving venir s'asseoir à côté de lui. Il n'avait rien dit depuis le début. Il s'en voulut de ne pas trouver les mots justes pour le soulager mais lui-même n'arrivait pas à savoir comment faire. On avait touché à sa soeur. On avait touché à sa petite soeur. Ce type allait payer. Ce monstre allait payer pour ça. Sa petite soeur. Il entendit quelqu'un l'appelait. C'était un autre agent de police. Il se leva rapidement pour lui faire face.
- Vous l'avez trouvé ? - Non, je suis désolé, monsieur Kellers. - Mais qu'est ce que vous attendez ? Vous pouvez pas laisser un type comme ça dans la nature ? - Évidemment, monsieur Kellers, nous faisons tout notre possible. - Eh bien c'est pas assez. Qu'est ce que vous faites là, au lieu d'être dehors à le chercher ? D'ailleurs comment un type pareil pouvait-il être dehors ? C'était une simple soirée entre jeunes. Comment ça a pu arriver ?
Le chagrin laissait soudain place à la colère. Sa réaction prenait des proportions excessives mais il ne pouvait pas se retenir. Il devait lâcher prise. On avait fait du mal à sa petite sœur et il ne se le pardonnerait jamais. La seule chose qui le retint, ce fut la voix d'Irving. Il se tourna aussitôt vers lui.
- Calme-toi. Je suis sur qu'ils vont ce qu'il faut. Ils vont le retrouver.
Stiles se contenta d'un hochement de tête et reporta son regard vers la chambre et la silhouette de Joanny.
- Ils ont intérêt à le retrouver. Avant moi. Sinon je le tuerais.
Sa voix était un murmure mais il savait qu'Irving avait entendu. Qu'importe. Il lui faisait confiance. Il savait que même s'il désapprouverait, il serait là pour l'épauler quoi qu'il arrive. Ce monstre paierait. C'était la seule chose qui l'empêchait de se rendre à l'évidence. Il avait échoué. Échoué à la protéger. Il avait failli à sa promesse. Avec un regard pour Irving, il se promit que cela n'arriverait plus jamais. Il pourrait sans doute supporter la culpabilité de ce que l'on avait fait subir à Joanny mais il mourrait si quelque chose devait arriver à Irving. Il était le grand frère. Il était coupable. Jamais il ne se le pardonnerait.
FIN DU FLASH BACK
Il la vît détourner le regard alors même que le sien avait changé. Lui pardonnerait-il d'être devenue ce monstre ? Sans doute, pas. Lui pardonnerait-il sa part de responsabilité dans la mort d'Irving ? Jamais. Pas plus qu'il ne se pardonnerait jamais lui-même. Ca n'était pourtant pas la haine ou la supplication qui vivaient dans son regard comme auparavant. Non, c'était celui d'un grand frère. Celui d'un grand frère pris en faute. Celui d'un homme qui se sentirait toujours coupable du sort de sa famille. Il n'avait pu sauver Joanny. Il n'avait pu empêcher leur mère de se suicider. Il n'avait pu protéger Irving de son meurtrier. Il n'avait pu être là pour son père quand bien même il eut été là pour sa mort. Mais qu'était-il ? Qu'était-il si ce n'était un champ de ruine ? Un pantin qui transformait en cendres tout ce qu'il touchait ? Il était le responsable du fléau de sa famille. S'il avait tué cet homme comme dit, Joanny n'aurait pas eu à devenir ainsi pour le retrouver et accomplir cette vengeance elle-même. Alors quoi ? Allait-il aussi échouer à venger Irving ? Non, il en mourrait. Il ne méritait pas de vivre. Il ne méritait pas d'être encore sur terre, d'être là face à elle. Elle n'était pas la seule coupable. C'était trop facile. Il était aussi responsable qu'elle. S'il avait insisté ce soir-là. S'il avait insisté, Irving serait encore en vie. Plus de colère, plus de cris. L'échéance. Il était coupable. Il s'était calmé, bougeant à peine, observant d'un regard ce qui fut sa petite soeur. Il fit raisonner les derniers mots qu'elle avait prononcé dans sa tête. Plus rien pour eux. Avait-elle donc arrêté ? Sans comprendre, sans savoir ce qui le poussait à le faire, il prononça les mots qu'il s'était refusé à prononcer jusque là.
- Je suis désolé.
Il se releva lentement pour lui faire face, de sa hauteur. Ca n'était pas fini. Tout n'avait pas encore été dit et elle devrait continuer de s'expliquer mais il savait qu'il le lui devait. Au moins, une fois.
- J'ai échoué, Joanny. Je n'ai pas su te protéger, comme je n'ai pas su protéger maman ou Irving. Je comprendrais que je ne signifie plus rien pour toi. Que tu te sois totalement détachée de notre famille et j'en suis désolé. Désolé que tu aies eu à faire ce j'aurais du faire moi-même.
Il laissa passer un temps. Il était satisfait jusqu'à un certain point. Cela n’effaçait pas le passé et cela n'effacerait pas ce qu'il prévoyait de faire mais il avait jugé qu'il le lui devait. Il se détourna d'elle puis essuyant brièvement les larmes qui se formaient dans ses yeux, reprit la parole.
- Tu m'affirmes ne rien comprendre mais je sais que tu me caches quelque chose, Joanny. Tu m'affirmes ne pas savoir mais je sais que tu as une idée. Parce que tu le veuilles ou non, aujourd'hui, tu ne vaux pas mieux que lui. Je ne parle pas de la pourriture qui a fait ce que tu es maintenant. Celui-là, j'espère sincèrement qu'il a souffert comme il le mérite mais les autres. Les autres, Joanny. Tu me dis que ce sont des criminels. Mais parle-moi, qu'est-ce qui te différencie d'eux au final ? Je sais. Je sais que je ne suis pas le seul à être mort dans cette pièce mais fais-moi une faveur. Même si tu n'es plus ma soeur. Même je ne suis plus rien pour toi. Dis-moi ce que tu sais. Qui est ce type ?
Son regard était à nouveau froid. Il avait compris, fait ce qu'il avait à faire. Maintenant, au même prix qu'elle, il devait se détacher de ses sentiments pour elle. Il se résolut à en faire le deuil comme pour les deux autres. Seul Irving resterait. A jamais.
WELCOME TO DETROIT
Invité
Sujet: Re: Parce qu'il ne reste que nous ... [Stiles & Joan Kellers] Jeu 23 Aoû 2012 - 13:42
La froideur s'était insinuée dans la totalité de son être. Le temps s'était arrêtée et Joan n'avait pas évolué. Elle était restée cette personne sans âme, sans identité, une machine à tuer. Elle ne tentait plus de jouer un jeu ni de persuader son frère qu'elle était une jeune femme respectable, elle savait qu'elle avait échoué, que tout ce qu'elle avait fait n'avait servi à rien. Aucune de ses actions ne l'avait soulagé, au contraire, elle avait simplement l'impression d'avoir le poids du monde sur ses épaules. Elle était à terre et voyait toutes les images défiler : ces visages meurtries, suppliant, des êtres humains au bord de la mort et elle en était responsable. Joan pensait même se rappeler de leur noms désormais, chose qu'elle s'était refusée pour rester en vie. Rester en vie, ce que Stiles semblait vouloir faire, sans succès. Les restes de la famille Kellers ne présageaient rien de bon. Joan ne parlait que très peu, concentrée sur tous ses souvenirs, comme s'ils allaient venir lui avouer qu'ils la pardonnaient pour ce qu'elle avait osé leur faire. Joan savait que tout cela était inutile, elle ne serait plus jamais capable de se regarder dans un miroir, en sachant ce qui l'attendait en bas. Stiles, lui, parlait plus que la jeune femme ne l'aurait cru. Il était devenu fou et Joan le voyait dans ses yeux, d'ordinaire si rieurs. Selon lui, il ne vivait plus, seul la mémoire d'Irving le portait. Comment avaient-ils pu en arriver aujourd'hui, à ce moment ? Se faire face, oublier qu'ils étaient de la même famille, la mort les séparant irrémédiablement. L'objectif d'une vie était désormais mis à sac par un unique événement, Joan avait le goût amer du remords dans la bouche. Elle savait qu'elle aurait dû les mettre à l'abri, être plus prudente, c'était elle la cible et non sa famille. Aujourd'hui, voir Stiles dans cet état l'empêchait de voir le côté positif de sa vengeance. Il n'arpentait plus cette Terre, c'est ce qu'elle avait toujours voulu et pourtant... Pourtant, ce n'était plus suffisant, cela ne l'avait jamais été et elle avait été trop aveugle pour réaliser que le vengeance aussi belle soit elle n'apportait rien de plus qu'une suite de catastrophes, dont Irving... Le joyeux Irving, la perle Celte de la famille...
FLASHBACK Londres, 2000.
Un soir d'été à Londres. La jeune et jolie Joan se promenait dans les rues froides et vides de la grande ville en compagnie de son grand frère, Irving. Depuis quelques temps, l'enfant avait peur de tout, obsédée par la dépression naissante de sa mère, des monstres sous son lit et tout ce qu'elle pouvait entendre à la télévision et à la radio. Heureusement, elle savait qu'elle pouvait parler à son frère qui l'avait toujours protégé, même à l'école alors que les enfants de leur âge passaient le plus clair de leur temps à chercher la popularité. Sa main dans celle de son frère, Joan observait les environs en espérant que leur mère serait heureuse du cadeau qu'ils venaient d'acheter pour son anniversaire. La jeune fille souriait, cela lui arrivait fréquemment ces temps ci. Elle tentait encore de déceler les mystères du monde et Joan savait que celui qui lui ferait découvrir était bien l'individu à ses côtés. Elle était encore innocente et coulait comprendre ce qui se tramait dans sa famille depuis quelques semaines.
Dis Irving, tu crois un jour que maman, elle voudra bien de nous ?
Elle lança un regard désormais effrayé à son frère. Elle était jeune et la dépression de sa mère sonnait pour elle comme un rejet pur et simple de sa personne. Irving s'arrêta et regarda sa sœur avec un sourire. Il était toujours comme cela : généreux, souriant et à l'écoute.
Ne dis pas de bêtises Joan, maman t'aime. C'est juste que parfois, elle a besoin de lancer des assiettes et de nous gronder pour évacuer sa douleur...
Elle... Elle est malade ?
Oui, Joan, maman est malade mais ne t'inquiètes pas, elle ira mieux et si ce n'est pas le cas, je serai toujours là moi et tu sais ce qu'on pourra faire tous les deux ? Se gaver de bonbons !
Joan sourit et reprit la main de son frère, désormais satisfaite de ce qu'elle avait entendu.
Super ! Mais ce sera un secret hein ? Sinon, on va encore se faire gronder... Je t'aime, Irving !
Joan s'était arrêtée et sans le regarder, lui avait dit tout bonnement la simple et vérité. Elle aimait son frère plus que tout au monde, ses deux frères d'ailleurs. Sans eux, elle était perdue et effrayée mais la jeune fille se doutait qu'elle n'aurait jamais la chance de faire disparaître cette peur...
FIN DU FLASHBACK.
Joan regardait Stiles, elle ne le toisait pas, ne le regardait pas avec amour ou colère. Elle se contentait de capter son regard lorsqu'il lui avouait être mort de l'intérieur et qu'elle ne pouvait rien faire, non rien, sauf se sentir coupable de son état. Joan le savait, elle avait perdu tout. Elle avait perdu ses frères, ceux qui la portaient lorsqu'elle tombait de vélo, ceux qui la protégeaient lorsque des grands venaient l'embêter à l'école, ceux qui l'emmenaient au médecin lorsqu'elle était malade. Joan avait causé leur perte et ne pouvait que difficilement laisser l'émotion et surtout les larmes l'inonder.
Je trouve que tu as l'air blessé. Blessé, en colère, certainement vide mais en vie.
Joan venait de résumer l'état constant de la famille Kellers. De simples coquilles vides tentant de trouver une place dans ce monde. Brisés par la perte, les maux, la douleur et surtout le chagrin, les deux membres restants de cette famille londonienne n'avaient plus grand chose à perdre, encore moins à gagner, ils survivaient tout simplement. Stiles trouvait toujours le moyen d'en rajouter à son discours, il souhaitait la culpabiliser, la faire mourir de remords, Joan n'avait pas besoin de ses paroles pour le savoir. Elle ne vivrait plus désormais, et certainement pas de la même façon. Son but nouveau n'existait pas, elle aurait dû être portée par la haine de l'homme qui a appuyé sur la gâchette mais non, en finir, c'était tout.
Je vois ce que tu veux dire, Stiles. Cela faisait dix ans que j'étais comme cela, ne crois pas que la coquille vide que j'ai été pendant toutes ces années n'est pas capable de comprendre ce qu'est l'amour. Je vous aimais tous les deux, sois en certain...
Joan voulait continuer de parler mais aucun mot ne voulut franchir le pas. Elle n'avait pas envie de pleurer, d'ailleurs, elle n'avait plus de larmes, ou pas assez pour faire comprendre à Stiles ce que représentait Irving dans sa vie. Joan ne réagit pas, pourtant, Stiles devenait clairement fou devant elle. Il semblait en proie au doute et certainement à la douleur qui envahissait tout son esprit. Joan restait sur les genoux, observant le sol miteux de sa maison. Que pouvait-elle faire d'autre ? Le regarder devenait une mission impossible, pas avec tout ce qu'elle avait fait. Il lui disait la vérité, elle en faisait de même. Son plan avait dérapé. Si aucun criminel ne survivait, il n'y avait aucune raison qu'ils aillent fouiller dans son ancienne vie. C'était sa manière de les protéger : elle avait toujours couvert ses traces, fait attention à ne rien dévoiler son identité et surtout tuer chaque homme qu'elle avait l'ordre de tuer. Tout était dans le plan, elle avait toujours suivi ses propres directives, sauf cette fois... Cette unique fois où sa victime semblait connaître ce qu'elle était, cet homme connaissait sa famille ou du moins savait des détails sur un de ses frères. Kellers n'avait pas pu lui faire face, elle n'avait pas pu en finir, de peur qu'un plan machiavélique se cache derrière ce visage fou et délirant. Elle avait laissé le destin de cet homme dans les mains de Kyle, elle n'aurait pas dû laisser cet être vil prendre en charge une affaire aussi importante, lui avouer ce qu'il lui avait murmuré ce soir là, avant de lui asséner le coup final. Elle avait échoué, tout ce pour quoi elle avait oeuvré avait causé sa propre perte et elle n'avait pas eu le courage d'ouvrir les yeux avant d'avoir Stiles en face d'elle. Toujours les yeux rivés sur le sol, elle écouta Stiles. Il avait raison sur toute la ligne évidemment et il n'y avait plus grand chose qu'elle puisse faire pour retourner en arrière. Donner sa propre vie, c'était la seule manière pour Joan de s'excuser, de lui demander à genoux qu'il lui pardonne sa naïveté. Toutes ses questions lui martelaient le crâne, enfonçant à chaque réplique une lame aiguisée dans son subconscient. Joan souffrait, ses membres tremblaient mais elle lui devait la vérité. Continuer jusqu'à ce que ses cordes vocales refusent de fonctionner...
Je ne dévoilais jamais rien sur mon identité, les personnes avec qui j'entrais en contact ne connaissaient que mon prénom. Aucun détail sur ma vie personnelle, c'était comme si vous n'aviez jamais existé. Vous auriez dû être en sécurité, vous auriez dû finir par croire que j'étais morte, je ne comprends pas ce qu'il s'est passé... Et non Stiles, je ne vais pas te tuer, j'en ai terminé avec tout cela, que tu le croies ou non. Tu es toujours mon frère, tu le seras toujours.
Joan releva son regard timidement. Cette fois, la froideur avait laissé place à d'autres sentiments beaucoup plus gênants pour elle. Malgré les années, elle l'aimait. Elle les avait toujours aimé, sa famille était cette partie d'elle qui n'était jamais parti tout comme Ethan faisait toujours partie d'elle. Jouer la comédie pendant dix ans n'avait rien retiré de l'adolescente qu'elle était. Kellers se doutait que ce n'était que le début de l'explosion, sous peu, le caractère de Stiles prendrait le dessus et elle finirait par ne plus tenir son rôle, les larmes prenant le pas sur l'artifice qu'elle voulait créer. Stiles commença à parler de plus en plus fort, Joan n'avait plus aucun contrôle sur ses muscles et le laissa se libérer du poids étrange de la culpabilité et du chagrin. Elle osa même lui parler de ce qu'elle faisait : elle avait tué et n'avait aucune raison d'avoir honte. Elle aurait certainement fait la même chose en recommençant sa vie. Personne ne pouvait rien y faire et la jeune femme n'avait plus de mots pour décrire ses gestes et son comportement alors elle se tut. Pourtant, une explication très simple lui brûlait les lèvres, cette nuit là avait tout changé, elle se revoyait encore dans ce lit, après l'Enfer...
FLASHBACK Londres, 2002.
Les néons lumineux lui faisaient mal, à vrai dire tout son corps n'était plus que douleurs. Elle entendait les infirmiers parler de son état, de ses blessures. Ses oreilles pouvaient toujours entendre et ses yeux encore voir, c'était déjà un bon début. Selon le personnel de ce lieu inhospitalier, elle avait plusieurs côtes cassées, des contusions monstrueuses au visage et bien sûr, des blessures difficiles à regarder en dessous du bas ventre. Une larme coula sur sa joue alors qu'une infirmière lui demandait distraitement si elle allait bien. Question stupide : comment pourrait-elle aller bien alors qu'elle venait de subir les pires sévices pour une jeune femme de son âge ? Joan ne prit pas la peine de répondre, concentrée sur la lumière au dessus d'elle, une lumière blafarde tout comme le reste de la décoration et surtout comme elle. Joan ferma les yeux et se retrouva dans une chambre. Non, ce n'était pas une chambre, c'était l'intérieur même de son être : vide, blanc, sans saveur. Elle vit Stiles & Irving derrière la fenêtre en pleine discussion, la jeune femme sentait que son plus grand frère était hors de lui. Il hurlait sur un policier alors que Joan recommençait à pleurer, son visage tuméfié lui faisant encore plus mal. Elle ne se souvenait de rien, juste de la douleur et c'était encore plus pénible que de voir le reste de sa famille se ronger les sangs hors de la chambre. Soudain, elle réalisa que cela ne servait à rien. Personne ne l'aiderait, elle était seule et le serait toute sa vie. On ne pouvait pas la comprendre, même sa famille au dehors ne pourrait pas l'aider. Elle laissa sa larme tomber sur l'oreiller puis rouvrit les yeux. Le monde extérieur était effrayant : la colère de Stiles, la chambre blanche, le personnel qui courait, le cerveau de Joan allait exploser. Elle ne se laisserait pas abattre, elle avait toujours eu peur de ce qu'il y avait autour d'elle. C'est aussi pour cela qu'elle était si timide, qu'elle était incapable d'avouer ce qu'elle ressentait à ses proches. Elle n'aurait plus cette chance, Joan le savait. L'adolescente devait tirer un trait, elle devait changer pour que plus personne et plus rien ne l'atteigne. Elle n'avait plus l'espoir d'une vie normale, elle ne se marierait pas, n'aurait pas d'enfants et encore moins de carrière professionnelle glorieuse. Elle n'aurait rien. Elle devrait juste vivre avec son reflet et la haine, la douleur la laissant de marbre à la peine d'autrui. Joan voulait savoir, elle voulait comprendre pourquoi l'infirmière avait eu un regard effrayé en soulevant la couverture pour observer son visage et son corps de plus près. Elle utilisa ses dernières forces pour arriver dans les toilettes. Un miroir l'y attendait, elle se posta contre le lavabo et prit un souffle impressionnant, de peur de faire une syncope. Elle releva le regard. Joan toucha son visage et ne se reconnut pas, ce n'était pas son visage. Elle tenta de se regarder quelques secondes mais ne pouvait plus affronter son propre reflet. Kellers finit par s'effondrer sur le sol, en pleurs. Elle se vengerait, elle le tuerait, tant pis pour le reste...
FIN DU FLASHBACK.
Joan était toujours recroquevillée sur le sol, les images lui arrachant un gémissement plaintif. Stiles avait certainement raison, elle n'avait pas bien agi mais que pouvait-elle faire d'autre ? Comment vivre lorsqu'on ne reconnaît pas son propre reflet ? Joan se le devait à elle même et pour elle, c'était une cause suffisante pour être fière de ce qu'elle avait fait. Bien évidemment, elle aurait préféré éviter de devoir tuer tous ces autres êtres mais pour l'atteindre, elle n'avait pas eu le choix. C'était le seul moyen pour obtenir la confiance de Kyle même si Joan savait que Stiles ne pourrait pas le comprendre. Elle n'arrivait plus à regarder son frère alors elle détourna les yeux pour remettre ses idées en place. Un long silence s'en suivit. Il fut rompu par le ton coupable de Stiles. Il s'excusait. Joan releva les yeux vers lui à nouveau dans un geste d'incompréhension. A vrai dire, elle se releva d'un bond, ne sachant pas réellement ce qu'elle faisait. Elle reste debout face à lui alors qu'il s'excusait de ne pas avoir pu la protéger, il voulait qu'elle lui pardonne d'avoir été un frère indigne en somme. Joan s'approcha pour n'être plus qu'à un mètre de son aîné, elle sentit une larme couler sur sa joue, la première depuis son arrivée. Elle n'y prêta pas beaucoup d'attention, concentrée sur son frère. Il n'y était pour rien, il n'aurait rien pu faire pour elle et il ne voulait pas qu'il culpabilise pour quoique ce soit. Tout ce qui était arrivé à Irving, son viol, tout cela n'était que sa propre faute. Stiles devait juste subir les pots cassés de ces événements malheureux.
Tu n'y es pour rien, Stiles. Que voulais-tu faire de plus ? Tout cela, c'était des choses que tu ne pouvais pas contrôler...
Joan se tut et attendit qu'il lui assène le coup final. Cela ne tarda pas. Stiles voulait savoir ce qui la différenciait de tous ces criminels qu'elle avait tués de sang froid. Elle n'avait pas la réponse, tout simplement parce qu'elle était devenue comme eux au fur et à mesure des années. Oui, Joan se doutait. Elle pensait savoir l'unique personne qui avait tué Irving, ou du moins qui aurait pu engager quelqu'un pour le faire. Myles. C'était la seule personne qu'elle avait malencontreusement laissé en vie. Son frère ne laissait plus transparaître aucune émotion, juste la haine. Il voulait connaître l'identité de celui qui avait osé toucher à Irving mais Joan ne pouvait pas lui dire, elle ne pouvait pas être responsable de sa transformation en monstre. Il y avait déjà assez d'elle dans cette famille. Elle répondrait à ses questions évidemment mais pas celle là. Cela n'en valait pas la peine. Elle s'arrangerait pour arranger ce problème, elle était la cible et plus personne ne devrait être touchée. Elle ferait ce qu'elle avait à faire, disparaîtrait de cette Terre et Stiles préserverait son intégrité.
Oui, Stiles, tu as raison. Je ne vaux pas mieux qu'eux et je n'ai jamais prétendu que j'étais différent d'eux. Après tout, j'ai toujours eu les mêmes objectifs que ces malades. Je suis folle, Stiles et cela ne changera jamais. Je ne peux pas t'accepter cette faveur, je ne peux pas te dire qui c'est. Tout cela n'en vaut plus la peine. Le problème disparaîtra bientôt, ne t'en fais pas...
Elle rangea sa détresse et resta les bras ballants à observer son frère devenir ce qu'elle était. Un homme rongé par la haine et la vengeance...
WELCOME TO DETROIT
Stiles C. Kellers
AGE : 34 NOMBRE DE CONTACTS : 217 ANNIVERSAIRE : 15/10/1990 EN VILLE DEPUIS LE : 21/07/2012 AVATAR : Jake Gyllenhaal
Sujet: Re: Parce qu'il ne reste que nous ... [Stiles & Joan Kellers] Lun 27 Aoû 2012 - 19:59
Une lame de rasoir. Une arme à feu dans un tiroir. Un couteau de cuisine. Un briquet dont la flamme brûle tremblante entre les doigts. Un simple scalpel posé sur une table stérile. Combien de fois y avait-il pensé ? Combien de fois s'était-il dit "Et si j'essayais ?" ? Combien de fois avait-il été tenté de mettre ce rêve à exécution ? Mourir noyé dans son sang, le sourire aux lèvres. La mort aurait sans doute été douloureuse mais elle aurait eu le goût de la liberté. Il savait que si certains voyaient leur vie défilait devant leurs yeux au moment de leur mort, lui, il l'aurait vu lui. Son frère. Son petit frère. Souriant. Magnifique. Enfin là. Ce rêve pourtant n'en restait qu'un. Jamais même, il n'avait tenté le geste, tenir l'objet entre ses doigts pour se dire "Alors j'essaye ?" Par manque de courage, par manque de conviction, par peur de la mort ? Non, pour lui. Par principe. Il avait été là pour ramasser Irving après le suicide de leur mère. Le plus sensible, le plus doux, le plus touché des trois. Sans doute, Joanny l'avait-elle été mais après ce qu'elle avait vécu, elle n'avait peut être pas alors saisi le fait. Stiles avait su faire ça en tant qu'aîné de la famille mais surtout parce qu'Irving avait eu besoin de lui. Les cris, les pleurs, les cauchemars après cette vision d'horreur, ça n'était pas lui qui les avait fait. C'était Irving. Son petit frère pour qui il se levait chaque nuit, avec qui il finissait la nuit en le serrant dans ses bras pour qu'il se calme. Joanny l'avait-elle su ? Leur père l'avait-il su ? Sans doute pas. Il n'avait pas failli à masquer cela. Parce qu'elle avait déjà assez souffert. Parce qu'il venait de perdre sa femme. Il n'avait pas pleuré sa mère. Il avait été bien trop occupé à veiller sur lui. A veiller à ce qu'il reste bien, à ce qu'il ne sombre pas comme il n'avait pu empêcher de laisser sombrer Joanny. Et il avait réussi. Ce jour-là, où ils avaient claqué la porte n'avait pas été totalement mauvais avec le recul. Car même s'il était resté hanté, même s'il parlait encore parfois de leur famille abandonnée, Irving avait été heureux. Heureux jusqu'à sa mort. Cela serait sans doute la seule fierté de Stiles. La seule chose dont il ne regrettait rien. Il avait réussi à le rendre heureux, au moins quelques années. Et il emporterait son sourire dans la tombe, comme un dernier cadeau, comme la seule chose qui aurait eu de l'importance dans sa pitoyable existence. Le regard fou, Stiles était toujours face à Joanny. Pour elle, il était en vie. Tout cela n'était que théorie. Respirait-il ? En partie seulement. Ses poumons étaient sans cesse oppressés par la douleur, au point qu'il avait oublié ce que c'était, que chaque inspiration était une torture permanente à laquelle, il avait fini par s'habituer. Marchait-il ? En partie également. Oui, il tenait sur ses deux jambes mais au prix d'un effort considérable. Celui qu'il exerçait chaque matin pour se lever, se forcer à avancer. Faire un pas relevait presque de l'exploit. Non, il n'était pas vivant. Il n'était plus que le simulacre d'un homme. A peine vivant. Un rire nerveux vint marquer ses mots.
- Si ça te fait plaisir de le croire. Je n'appelle pas ça vivre, Joanny. A moins que tu n'aies oubliée cette sensation toi aussi.
Au moment de prononcer ce qui suivit, il le regretta aussitôt. Qui était-il pour dire qu'elle n'avait jamais aimé ? Au fond, ils n'étaient plus bien différents aujourd'hui. Pourtant lui-même savait que seul l'amour lui restait. Sans doute était-ce vrai. Sans doute ces sentiment qu'elle avait essayé de cacher au sujet du jeune blondinet que Stiles avait finalement amené dans ses valises avaient-ils été réels ? Et puis, elle avait aimé Irving, sans doute. Comment pouvait-il en être autrement ? Qui donc n'aurait pu l'aimer ? C'était une chose impossible. Lui, parfois agaçait les gens, se montrait trop direct, pas assez sérieux. Que dire d'Irving ? Si gentil, si innocent, le sourire franc aux lèvres et les larmes qui coulaient sans honte. Un ange à l'état pur. Il avait conscience de la chance qu'il avait eu d'être né au côté d'un frère tel que lui. En dépit de la douleur que sa mort lui causait, il ne pourrait jamais regretter de l'avoir connu, d'avoir été là à ses côtés depuis le début, d'avoir eu la chance de le côtoyer chaque jour. Il avait été sa part de lumière et selon toute logique, sa mort signifiait l'obscurité. Oui, ce monstre avait tué le mauvais frère. Ca, il en serait toujours certain. Et il paierait pour ça.
- Je te crois. Au fond, on est pas si différent à l'heure actuelle.
Une dernière parole calme avant le chaos. Ses mots étaient sans doute de trop, sans doute blessants, sans doute trop durs ou bien suppliants. Mais il avait cessé la demi-mesure. Seul l’excès lui rappelait la vie. Les cigarettes fumées les unes après les autres dans l'espoir qu'un jour, elles l'achèveraient pour lui. Les sorties dans les bars à rencontrer n'importe qui. Les heures de travail interminables au cœur même de l'enfer. La mort sans cesse, la maladie, la souffrance. Il survivait à ce qu'il voyait. Tout cela n'était au final qu'une projection de sa propre douleur. Celle que l'on ne peut extirper. Celle qui donne envie de s'arracher le cœur avec les doigts. Courir sans cesse. Hurler. Vivre à cent à l'heure pour éviter de finir recroquevillé dans un coin à ne plus bouger. Il continua de vociférer à s'en déchirer la gorge, comme pour exprimer toute la frustration qu'il accumulait, toute cette rancœur que depuis peu il reportait sur elle, sa pauvre petite soeur. Il devrait s'en mordre les doigts. Sentir cette autre culpabilité mais la sensation était trop surréaliste. Il avait besoin de la faire sortir. Rien ne vint dans l'autre sens. Il continuait encore et toujours jusqu'au point de rupture. S'effondrer encore, quand les jambes ne nous portent plus, quand les souvenirs deviennent pires que des coups de poignard dans le dos. Mais qu'on l'achève, qu'on l'achève ! Qu'elle parle enfin ! Qu'elle mette fin à la souffrance devenue insupportable. Non, il n'y avait pas de plan bien sur. Pourquoi y aurait-il eu un ? Il l'écouta enfin parler à son tour. Il se rendit compte à quel point il devait avoir l'air pitoyable face à elle. Quelle image devait-elle avoir de lui maintenant ? Il avait sans doute perdu aussi cela, ce qui lui restait de sa soeur, de sa condition de frère. Il n'avait plus rien à perdre en dépit de ses mots. Elle n'allait pas le tuer. Voilà qui était bien dommage. Elle aurait pu lui rendre ce service. Mettre fin à ses souffrances comme elle avait indirectement causée celles d'Irving. Elle affirmait qu'il était toujours son frère. Quelle hérésie ! Il n'avait plus rien d'un frère. Plus rien si ce n'est cette effroyable instinct. Cette envie de se diriger vers elle et de la serrer dans ses bras pour la protéger. Non, il ne pouvait pas, il ne pouvait plus. C'était fini. Il avait perdu ce droit en l'accusant de la mort de leur frère. Une mort dont il était tous les deux coupables. A la voir ainsi recroquevillé sur le sol, il s'en voulait mais au fond il l'avait cherché. C'était lui qui avait fait cela aussi. Il était comme ce monstre. Le destructeur de sa soeur. Peut être même avait-elle, elle, réussi à vivre ? Quel égoïste il faisait encore mais il ne pouvait pas penser autrement. Il ne pouvait garder pour lui cette culpabilité qui n'était pas tant la sienne. C'était lâche mais c'était tout ce qu'il avait trouvé. Que valait le courage de toute manière ici ? Il n'avait même pas pu arriver au bout. Il aurait mérité de mourir en essayant.
FLASH BACK Londres, 2002.
Plusieurs semaines étaient passées depuis le viol de Joanny. Il avait essayé de lui parler, de comprendre, avait harcelé Ethan de questions dont il n'avait bien sur pas la réponse. Joanny ne parlait pas. Elle était comme partie dans un lieu qu'elle seule connaissait. Leur mère avait encore sombré dans la dépression. Un état dont elle ne sortirait sans doute jamais maintenant. Leur père faisait face comme il pouvait mais avoir deux visages semi-morts face à lui ne l'aidait pas vraiment. Irving en souffrait lui aussi. Il ne parlait pas tant. Il parlait d'ailleurs beaucoup moins mais il souffrait. Ses nuits agitées où il venait le rejoindre dans son lit pour le calmer, ce regard triste qui avait remplacé ses yeux si souriants. C'était devenu insupportable. L'attente était alors devenue un autre exutoire. Une nouvelle porte de sortie. Le responsable c'était ce monstre. Celui qui avait détruit sa soeur et entrainé le reste de la famille dans la chute. Il devait payer. Il le fallait. La police pourtant stagnait. Elle ne parvenait pas à le trouver. Comment cela était-il possible ? Comment pouvait-il en être de la sorte ? Mais qu'est ce qu'ils foutaient bon sang ? Ce jour-là, ce fut l'interrogation de trop, l'attente cessa de devenir vivable. Prétendant à Irving devoir aller faire des courses, il sortit de la maison et prit la voiture qu'il démarra en trombe, jusqu'au commissariat. Si ces types n'étaient pas foutus de le trouver, lui le ferait. Mais pour cela, il avait besoin de leurs informations, besoin de ce que Joanny n'arrivait pas à dire, à décrire. Il se gara à la va-vite à l'entrée et ne se fit pas prier. A peine arrivé à l'accueil, le ton commença à monter. Il exigeait de voir le commissaire chargé de l'enquête. Ce qui devait être une vulgaire affaire de mœurs pour lui, était une question de vie ou de mort pour Stiles. Alerté par le bruit, le commissaire arriva vite et l'invita à venir dans son bureau. Stiles refusa de s'asseoir.
- Je veux connaître le contenu du dossier. - Navré monsieur Kellers mais je ne peux pas. - J'en ai rien à foutre de vos histoire de confidentialité et compagnie, c'est de ma sœur qu'il s'agit. Ma petite sœur que ce monstre a littéralement détruit. - Je comprends bien mais vous devez laisser la police faire son travail - Son travail ? Quel travail ? Ca fait des semaines, commissaire et toujours rien ! Vous n'en avez rien à foutre ! Pour vous, ça n'est qu'une affaire comme une autre ! Mais pas pour moi, si vous n'êtes pas foutus de faire votre boulot, moi je vais le faire à votre place. - Monsieur Kellers, ça n'est pas à vous de faire ça. Vous ne pouvez pas faire justice vous-même. - Alors quoi ? Vous allez nous laisser dans l'ignorance ? Et combien de temps, hein ? Ma soeur se meurt chaque jour un peu plus, ce type doit payer et vite ! - Nous faisons tout notre possible monsieur Kellers - Et bien, c'est pas assez ! Bordel, mais vous devez avoir quelque chose, vous ne pouvez pas être aussi incapable ! - Surveillez votre langage, s'il vous plaît ! - Je vous parle comme je veux ! Vous ne voulez pas m'aider ? Et bien soit, je ferais votre boulot à votre place !
Sans laisser le temps d'un mot de plus, Stiles quitta le bureau en claquant la porte. Les jours qui suivirent furent aussi éreintants qu'inutiles. Il ne cessait de partir en quête de réponses, harcelant presque parfois les présents à la soirée mais rien, rien ne venait et les nuits courtes de l'ambiance pesante n'arrangeaient rien. Et puis le suicide de sa mère intervint et il cessa ses recherches, occupé à ramasser les derniers morceaux de sa famille. Lui, le dernier membre encore debout.
FIN DU FLASH BACK
Avec le recul, il était persuadé de ne pas avoir assez essayé, s'en voulait d'avoir fui et puis les raisons lui revenaient alors. Irving, toujours Irving. Le centre du monde, de son monde. Il était passé avant le reste. Avant sa vengeance, avant le reste de la famille, avant son propre équilibre. Bien sur, ce dernier ne l'avait jamais su. Il ne l'aurait alors jamais accepté. Mais ça avait été pourtant ça. Une autre forme d'égoïsme de la part de Stiles. Il avait bien échoué pourtant et c'était de cela qu'il s'excusait. Comme il s'excusait d'être encore envie à la place d'Irving. Joanny n'avait sans doute aucune idée du temps qu'il avait pu passer et des remords qui avaient continué des années après dans sa quête. Cette quête qu'il avait raté et qui avait poussé Joanny à devenir une tueuse. Une autre l'attendait. Celle pour le salut d'Irving. Une quête pour laquelle, il se refusait à échouer. C'était son unique raison de vivre désormais. Venger son frère pour pouvoir ensuite mourir. Pointer une arme sur la tempe de son meurtrier avant de la pointer sur sa gorge. Deux coups de feu et la fin. La paix, la liberté. Il aurait fait la dernière chose qui lui restait à faire sur Terre. Ses remords s'exprimaient maintenant en mots. Mots auxquelles sa petite soeur sembla réagir. Elle ne connaissait pas la moitié de l'histoire.
- J'ai échoué, Joanny, que tu le veuilles ou non. Cette vengeance que tu as entrepris, je l'avais commencé mais je ne l'ai jamais terminé et voies le résultat aujourd'hui? Tu es devenue une meurtrière et j'ai perdu la chose qui comptait le plus au monde. J'ai échoué à empêcher maman de prendre cette corde, parce que j'étais trop occupé ailleurs pour toi et pour Irving. J'ai échoué à le retenir ce soir-là. C'était moi Joanny, qui aurait du être dans cette voiture et je l'ai laissé prendre ma place. J'ai échoué à le protéger. J'ai tué ma famille, Joanny bien avant toi. C'est pour ça que je suis désolé, pour ça que je demande ton pardon. Puisses-tu un jour me l'accorder.
C'était tout ce qu'il pouvait faire désormais. Il n'y aurait pas de retour en arrière. Il allait la prendre à partie, montait encore ses accusations qu'il ne pourrait jamais retirer. Il savait qu'il le devait, il l'avait toujours su. Depuis le jour même où il avait découvert la vérité. Depuis le jour où il avait compris qu'il devait la retrouver. Il avait presque honte de l'avouer mais c'était un coupable et non sa sœur qu'il était venu chercher et c'était ce qu'il allait maintenant récupérer.
FLASH BACK Londres, 2011.
Depuis la mort de son père, Stiles s'était remis à chercher. Cette enquête lui rappelait celle qu'il avait entrepris pour retrouver le meurtrier de Joanny. Il avait bien sur échoué mais rien, rien ici ne pouvait l'empêcher de continuer. Il n'avait plus rien à perdre, il n'avait plus que ça. Cette dernière promesse faite à son père, cette raison même de vivre encore un peu. Il devait venger Irving. C'était là, la seule chose qui l'avait empêché de mourir jusqu'à présent. Il en était convaincu. Le savoir lui avait donné une nouvelle étincelle. Il ne travaillait plus autant, consacrant maintenant une majeur partie de son temps à cette quête. Sa quête de vengeance, sa quête de liberté. Avec le temps, ses contacts avaient été facilités et bien plus nombreux. Il pouvait maintenant demander des services, user des outils des forces de l'ordre. Il avait pensé engager un détective avant d'y renoncer. Cette enquête, c'était la sienne et il voulait s'y consacrer corps et âme. Par amour pour son frère, arraché à la vie de la façon la plus monstrueuse qui soit. Des semaines et des semaines encore mais jamais sa motivation, sa conviction ne faiblissaient et quand un signe tentait de les faire disparaître, il lui suffisait de penser à lui, à son visage défiguré, à son sourire, aux derniers mots de son père. Il n'en parlait à personne, vivait sa vie presque normalement. Et il allait le voir. Sur sa tombe. Tous les soirs. Il lui parlait de sa journée, de ses découvertes, renouvelait sa promesse et souriait même parfois à son souvenir. Il était le seul à y avoir droit, pas celui que l'on utilise pour la société, non le vrai. Celui qui reflète l'amour inconditionnel qu'il éprouve à son égard. Le seul qu'il n'éprouverait jamais. Il n'était pas rare que ce soit le gardien qui vienne lui dire de partir, une fois là, il était incapable de le laisser, encore. L'épuisement se faisait sans cesse ressentir puis enfin, une information vînt. Une information capitale de celles que l'on cherche sans arrêt, ni temps mort. Un de ses contacts avait une info. Selon ses dires, elle n'était pas des moindres. Stiles avait aussitôt accouru.
- Evan, merci. - Ne me remercie pas, Stiles. Pas encore. - Arrêtes, tu sais bien que toute information est capitale. Je ne te remercierais jamais assez de m'aider. - Je n'en suis pas persuadé. Ce que je trouvais risque de ne pas te plaire, Stiles. - Crois-moi, au point où j'en suis, je peux tout entendre, tout encaisser. Cesse de tourner autour du pot et dis moi plus ce que tu as trouvé. - Pardonne-moi Stiles - Evan ! Dis-moi.
Evan soupira, se mordit la lèvre puis parla enfin d'une voix lente, sur un ton d'excuse.
- J'ignore qui est le meurtrier de ton frère, Stiles mais je sais pourquoi il était là, ce soir-là, peut être même pourquoi il l'a tué. - Que veux-tu dire ? Mais parle bon sang ! - Ta soeur, Stiles. C'est au sujet de ta soeur. Ce type, il savait qui il attaquait. C'était une vengeance, Stiles. Une vengeance contre elle. - Quoi ? Mais qu'est ce que tu racontes ? Qu'est ce que Joanny a avoir là-dedans ? Ca fait des années qu'on ne l'a pas vu, Evan et puis qui pourrait lui en vouloir au point de ... de tuer Irving ? - Un mec du business qui a une dent contre elle, j'en sais pas plus, mec, désolé. - Non mais attends une seconde. Qu'est ce que tu veux dire par business ? Joanny a jamais été là dedans ! - A l'époque peut être mais maintenant. C'est la rumeur en tout cas. Elle est ... elle est de ce monde, Stiles. - Non, je ne veux pas te croire. Pas elle. C''est pas possible. - Je suis désolé, c'est tout ce que je sais. Je t'avais dit que ça te plairait pas. - C'est pas possible, tu as du rater quelque chose - Peut être bien. J'en sais rien. C'est à toi de voir maintenant.
Evan lui adressa un regard désolé et le laissa en plan. Stiles se prit la tête entre les mains. C'était pas possible, pas Joanny. Certes, elle avait du changer depuis le temps, mais pas à ce point, pas elle. Etait-ce vraiment une vengeance contre elle ? Mais pourquoi ? Qu'avait-elle fait, qu'avait-elle demandé ? Il n'avait pas de réponses à ses questions. Et une seule personne les détenait. Joanny. Stiles sortit de la pièce et se prépara pour une nouvelle enquête. Il devait retrouver sa petite soeur, neuf ans après leur séparation.
FIN DU FLASH BACK
Il était là, face à elle. Il avait fait fi de ses sentiments pour elle, de son amour de frère pour penser en tant qu'enquêteur, en tant qu'homme en quête de vengeance. Elle n'était plus sa soeur en face de lui mais la personne qui détenait les réponses qu'il cherchait tant. Les réponses dont il avait besoin pour accomplir sa dernière action, sa vengeance. Il avait fait sa demande, sans hésitation. Ses pensées dans l'attente n'étaient plus tournées que vers Irving. Encore. Toujours. On touche au but, Irv' ! Bientôt, il paierait pour ce qu'il t'a fait et je pourrais enfin de rejoindre. Il écouta attentivement chaque mot que la jeune femme prononça, impatient d'avoir le bout, la réponse tant attendue. Le nom de ce monstre ou bien n'importe quoi. Elle savait, il le voyait de ses traits. Son coeur se mit à battre à vive allure. Il était prêt. "Oui, Stiles, tu as raison. Je ne vaux pas mieux qu'eux et je n'ai jamais prétendu que j'étais différent d'eux" Je suis navré, Joanny. Mais tu as au moins le mérité d'être franche. Crois-moi, ça, je suis prêt à te le pardonner "Après tout, j'ai toujours eu les mêmes objectifs que ces malades" Non, Joanny, c'était différent. Tu voulais ta vengeance tout comme moi, je la désire maintenant. "Je suis folle, Stiles et cela ne changera jamais." Je n'ai rien à en dire. Je ne vaux pas mieux. Moi-même désormais, je suis fou. "Je ne peux pas t'accepter cette faveur, je ne peux pas te dire qui c'est." Quoi ? Stiles se figea un instant. Avait-il bien entendu ? Non, il restait encore le pire. Le pire de tout "Tout cela n'en vaut plus la peine." N'en vaut plus la peine. "Le problème disparaîtra bientôt, ne t'en fais pas..." Disparaîtra bientôt. Ne t'en fais pas. Non, non, elle n'avait pas dit ça. Il avait mal entendu. Il se trompait. Ses oreilles, son cerveau lui jouaient des tours. Elle n'avait pas dit CA ! Pendant un instant, Stiles fut incapable du moindre geste. La stupeur, l'effondrement s’abattait sur lui avec une extensivité qui menaçait de le tuer. "Je ne peux pas t'accepter cette faveur, je ne peux pas te dire qui c'est. Tout cela n'en vaut plus la peine. Le problème disparaîtra bientôt, ne t'en fais pas..." Stiles regardait sa soeur comme si elle était une étrangère, comme si elle venait de lui infliger un coup de poignard dans le coeur en le regardant droit dans les yeux. Il fut incapable du moindre mot, figé dans son horreur. Puis les mots se mirent en place. La première pensée. Elle savait. Elle savait qui c'était mais elle refusait de le dire, de le lui dire. Mais pourquoi, pourquoi ? La deuxième pensée. Plus la peine. Mais qui ? Qui était - elle pour juger ? La peine ? Mais il ne lui demandait rien. Rien du tout. Juste un nom, une information. Pas son indifférence à sa souffrance, encore moins à la mort d'Irving. La haine qu'il éprouvait à son égard ne cessait d'augmenter. Le rouge commença à colorer ses joues devenues albâtres. La troisième pensée. Disparaîtra bientôt. Il comprit alors. Elle voulait le faire, elle. Ca n'était pas de l'indifférence à l'encontre d'Irving, non. C'était contre lui. Elle rejeta sa douleur, sa foi, l'objet même de son existence. Ne pas s'en faire. Facile à dire pour elle. Ca n'était pas elle qui se levait chaque matin en espérant finir mort le soir même après avoir exécuté sa vengeance. Elle était devenue sa vie, son moteur, l'objet même de sa vie et elle voulait la lui arracher. Lui prendre ça. Sa raison de vivre. C'était un autre meurtre. Aussi puissant et douloureux que celui d'Irving. Non, elle ne pouvait pas. Elle ne pouvait pas lui faire ça. Pas maintenant, plus maintenant. Non, NON !
- Tu ne peux pas ? TU NE PEUX PAS ? Non, non, Joanny, non. Tu dois me le dire. Tu me le dois. Tu dis que ça ne vaut plus la peine mais pour qui ? Pour toi ? Pas pour moi. PAS POUR MOI ! Non, le problème ne va pas disparaître, pas de tes mains en tout cas. Non, non, ça n'irait pas. Tu ne peux pas me faire ça ! Tu ne peux pas me le voler ! Bordel, Joanny ! J'ai rien d'autre ! RIEN D'AUTRE ! Comment tu peux me faire ça ? Pas toi, pas toi Joanny ! Non, pas toi. Bordel, tu sais ce que je ressens, Joanny. Je sais que tu le sais, sinon tu ne serais pas devenue ce que tu es, tu ne serais pas partie de te venger contre ce monstre. Laisse-moi ça Joanny. C'est toute ma vie ! Toute ma vie ! Si tu me l'enlèves, je n'ai plus rien, plus rien ! Plus aucune raison de vivre, Joanny. Tu ne peux pas me voler ça, tu ne peux pas me voler Irving. Je t'en prie.
Il attendit un instant mais rien de ce qu'il attendait ne vint. Elle avait décidé de garder ça pour elle. De le lui prendre. De le lui voler. Elle venait de tuer Irving pour la seconde fois. Il se calma soudain et recula. Il ne servait à rien de continuer. Ca n'était pas Joanny. Il ne pouvait pas parler à une inconnue qui avait juré sa mort. Il avait cru en faire le deuil. Il s'était bien évidemment trompé. Il n'y avait plus que la haine et le mépris dans ses yeux.
- C'est donc comme ça que tu l'as voulu. Et bien qu'il en soit ainsi. Comment j'ai pu être aussi con ! Ne te fais pas d'illusions, je le retrouverais et je veillerais à le faire avant toi et ce jour-là, je le tuerais. Et si je dois te rayer de mon passage pour le faire alors je le ferais. Tu n'es plus rien pour moi désormais. Tu n'es plus qu'un obstacle. On aurait pu le faire ensemble. Comme un frère et une sœur pour la mémoire de leur frère. Mais tu as fait le choix de me trahir, de le trahir. Va en enfer !
Un dernier regard et il prit la direction de la porte. Il posa la main sur la poignée, hésita une seconde.
- Si tu me laisses partir, c'est terminé. Tu ne pourras plus revenir en arrière. C'est ta dernière chance. Si j'ai encore une quelconque importance pour toi, si Irving a encore une quelconque importance pour toi, alors dis-le moi. Dis-le Joanny ou c'est la dernière fois que tu me verras.
Il se retourna vers elle mais de ce qu'il vît, rien ne vint le satisfaire. Le cœur lourd mais déterminé, il actionna la poignée et ouvrit la porte.
- Adieu Joanny.
Il sortit et referma la porte derrière lui. Malgré sa tentative, il ne put empêcher des larmes de se former dans ses yeux. Il les laissa couler sur ses joues et avec un dernier regard vers la maison, prit la direction de sa voiture. C'est fini, Irving. Joanny n'est plus. Il n'y a plus que toi et moi. Toi et moi. Pour toujours.
WELCOME TO DETROIT
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Sujet: Re: Parce qu'il ne reste que nous ... [Stiles & Joan Kellers] Mer 29 Aoû 2012 - 14:13
L'Enfer reprenait ses droits, arrachant le peu d'humanité qu'avait conservé Joan après ses années de combat. Désormais, elle devait faire face à la face cachée de Stiles. Ils étaient devenus si semblables, aussi détruits par ce que la vie leur avait réservé. Assise en tailleur, la cadette de la famille avait arrêté de rêver, elle priait simplement pour qu'on lui arrache le cœur purement et simplement. Que pouvait-elle espérer d'autre maintenant que son frère ne vivait qu'à travers le reflet d'Irving sur son visage ? Tout ce qu'elle avait imaginé pour eux s'était effondré, ne s'était jamais réalisé. Pas de famille, pas d'enfant, pas de bonheur, juste un abyme sans fin qui les avait entraînés à la mort de l'innocence et du cœur même de leur nom. Comment faire face alors qu'on était encore à peine certaine de pouvoir se relever ? Les souvenirs déferlaient, la douleur ne s'amenuisait pas. Le fond, Joan ne voyait que le fond d'une vie passée à espérer, à croire que les choses pouvaient s'améliorer un tant soit peu mais tout cela était un leurre. Non, son frère ne vivait plus. Elle non plus, il venait de sonner le glas de son existence. Joan savait en cet instant que ce qu'elle avait créé depuis son arrivée à Detroit ne la sauverait pas. En vérité, le poignard avait toujours été présent, s'enfonçant peu à peu dans une chair qui tentait de cicatriser si difficilement. Maintenant, tout était terminé et Joan le voyait dans le regard de son aîné. Plus aucune vie ne les attendait au tournant, pas tant que les personnes responsables de la mort d'Irving arpenteraient cette planète et ce constat amenait Joan à vouloir sa propre mort. Elle en était responsable et elle ne pouvait plus changer la donne, Irving était mort et enterré et il ne reviendrait jamais sourire pour elle. Joan ne méritait pas son sourire, peut être même ne l'avait elle jamais mérité, destinée depuis sa tendre enfance à devenir le monstre qu'elle s'était efforcée de cacher derrière un sourire angélique. Les paroles de son frère ne faisaient que renforcer ce que Joanny pensait désormais. En effet, elle s'était donnée l'illusion de vivre, elle avait même peut être vécu quelques heures en dix ans. Kyle lui avait ôté sa vie, à plus de quatre vingt dix pour cent. Il ne restait plus grand chose d'elle même et désormais, elle était la fautive, celle qui avait retiré la vie d'Irving à la même hauteur. Vivre avec un fardeau pareil lui était inenvisageable. Ne plus croire en rien, rester de marbre face aux supplications de Stiles, elle n'avait pas la force et certainement plus les moyens de l'encourager, de lui dire que le calvaire était fini. Malgré le décès d'une partie de lui même, il pourrait vivre. Tout cela n'était que mensonge, Joan savait plus que quiconque à quel point Stiles et Irving faisaient partie de la même enveloppe, l'un sans l'autre, cela ne valait plus rien. Elle n'avait pas la force d'esprit pour aller blasphémer sur ce fait indéniable, Stiles avait perdu une part de lui même, la meilleure partie de son tout. Que pouvait-elle donc répondre face à cela ? Que tout allait s'arranger ? Qu'un jour, il se réveillerait et qu'il n'aurait plus mal ? Cela ne se passait pas ainsi, Joan avait appris à ses dépens qu'on ne pouvait oublier, tout restait bien ancré. L'amour que l'on porte à une personne ne disparaît pas parce que nous le désirons : notre inconscient peut peut être s'en persuader mais notre cœur conserve ce sentiment et ne le fait jamais partir, jamais. Alors, Joanny releva son regard légèrement embué, à la limite cadavérique, pour souffler son dernier espoir, lui dire adieu.
La sensation de vivre ? Je l'ai peu connu et tu le sais. Alors, oui, tu as certainement raison, le sentiment de bien être ne revient jamais. On ne peut pas faire le deuil d'une personne, certainement pas d'une partie de soi-même..
Elle partit dans ses rêveries, tout cela importait peu de toute manière. Elle finit par hausser les épaules pour indiquer à Stiles que parler de ce genre d'émotions ne ferait avancer aucune de leurs deux personnes. Stiles restait là, perdu dans son mutisme. C'était comme s'ils ne s'étaient jamais connus, comme si leurs moments passés ensemble n'avaient été que furtifs et étaient inutiles aujourd'hui pour contrebalancer qu'ils étaient du même sang. Joan savait qu'elle ne sortirait plus la même de cette entrevue. Elle allait se perdre, elle allait abandonner le combat, définitivement parce que la vue de sa chair et son sang lui était insupportable, parce qu'elle avait fait tout ce qui était en son pouvoir pour ne mêler personne à sa vengeance et qu'ils avaient dû quand même payer pour elle. Ils étaient morts, tous morts. Aucun n'avait survécu, aucun n'était resté indemne, son égoïsme les avait projetés en Enfer, tous. Joan ne laissa échapper aucune larme, aucune mélancolie, elle n'avait plus le droit de vouloir le passé. Elle avait tout fait pour lui dire adieu, elle avait agi selon son bon vouloir et il n'y avait plus de place pour ces simples sentiments aujourd'hui. Pourtant, elle les avait aimés, ses frères plus que tout le reste. Elle aurait pu vivre en sachant son père mort, elle aurait pu affronter le monde après le suicide de sa mère mais le meurtre d'Irving, la catatonie de Stiles, cela lui était juste impossible. La phrase de son frère ne la rassurait pas sur leur avenir : il la croyait, oui, mais cela n'était plus suffisant. Elle arrivait à déceler un adieu dans sa voix, une peur profonde dans sa voix. Joan ne trouva rien à lui répondre, oui, ils n'étaient plus si différents et c'était une bien mauvaise chose. Reléguer à être des tueurs, reléguer à devenir des moins que rien pour une simple vengeance. Il avait fallu que la jeune brune le comprenne trop tard et Stiles, lui, était bien trop aveuglé par son amour pour Irving pour envisager d'abandonner. Elle aurait fait la même chose que lui, à vrai dire, elle l'avait fait même si les circonstances étaient différentes. Perdus dans leurs pensées, aucun des deux Kellers n'avait envie de rompre le silence pesant. Joan se doutait de ce qu'il allait lui demander, elle savait ce qui lui demanderait de lui dire et elle s'y refusait. Si seulement, Stiles pouvait comprendre que sa décision était pour lui, pour qu'il surmonte le deuil de la manière la plus saine possible, pour ne plus être rongé par la haine, par la vengeance, par toutes ces émotions qui ne devraient pas régir une personne. Stiles finit par parler et ce qu'il dit n'avait rien à voir avec ce que Joan avait imaginé : des excuses. Il se croyait responsable de ce qui lui était arrivé, parce qu'il n'avait pas été là, parce qu'il n'avait pas eu le cran d'aller jusqu'au bout, de le retrouver et de lui faire payer à sa place. Il se sentait entièrement responsable du sort de leur famille, Joanny n'y comprenait rien. Stiles avait tout fait pour sauver la famille, il avait fait ce qu'il avait pu pour la garder avec eux, il n'avait pas échoué comme il le prétendant, c'était elle qui avait été trop borné pour écouter son point de vue. Joan n'avait pas parlé pendant des mois, traumatisée, perdue et aveuglée par la haine. Stiles avait fait des recherches, il avouait aujourd'hui qu'il avait tenté de la sauver à sa façon mais cela n'avait pas été suffisant et de toute manière, Joan n'aurait jamais accepté qu'il parte à sa recherche à sa place. C'était son combat, pas le sien. Son frère avait déjà bien assez de problèmes à gérer, il devait veiller sur les membres restants de la famille, il devait assumer tout cela parce qu'il était l'aîné. Joan, elle, avait pris un chemin différent, elle en avait eu besoin, elle l'avait voulu et Stiles n'aurait rien pu faire pour l'en empêcher. Elle se releva timidement pour s'approcher de son frère qui avait parlé d'une voix maladroite, pleine de remords, une voix qu'elle ne lui avait jamais connu. Joan ne tenta rien de plus, elle resta là à le regarder, à découvrir la facette cachée de son frère. Elle avait toujours su depuis qu'elle était toute petite que Stiles était le plus protecteur et certainement le plus vulnérable d'eux tous et elle en avait la preuve aujourd'hui. Joan avait perdu son deuxième frère, elle en était persuadée désormais. Sonr egard sauvage ne lui présageait rien de bon, la laissait de marbre alors qu'auparavant, elle se serait jetée dans ses bras pour qu'il arrête son discours geignard. En dix ans, les choses avaient bien changé. Ils étaient des adolescents naïfs, rêveurs mais aujourd'hui, leur coquille adulte n'avait plus rien à voir avec ce qu'ils avaient été. Leur relation n'était plus qu'illusion. Une barrière invisible et infranchissable, celle de la culpabilité, s'était élevée entre eux. Joan ne pouvait plus franchir la limite qui était imposée. Avec un regard froid, pour na pas sombrer dans la douleur, Joan se contenta de lui répondre ce qui n'était que la pure vérité.
Ce n'était pas ton combat Stiles. Tu n'étais pas responsable du sort de notre famille et tu ne l'es toujours pas. Je suis certaine que tu le sais au fond de toi.
Forcément, leur conversation ne pouvait pas tourner autour du remords éternellement. Désormais que Stiles avait lâché la bombe à propos d'Irving, Joan savait bien pour quelle raison il était là. Il n'était pas dupe, on n'assassinait pas une personne des plus gentilles et innocentes pour s'amuser. Joan avait su instinctivement qu'elle était la responsable. Elle attendant les remontrances, elle attendait la douleur déchaînée contre elle. Elle attendait que Stiles lui coupe le souffle, la frappe, la torture verbalement. Son vœu ne se fit pas attendre plus longtemps. Elle ne lui avait pas donné ce qu'il voulait. Le nom. La personne coupable de ce massacre. Joan n'en était pas certaine évidemment mais Myles était la seule personne qu'elle n'avait pas tué de ses mains et pour elle, ce n'était pas une coïncidence. Elle tenta d'écouter tout ce que Stiles avait à lui dire, elle ne réussit qu'à capter une infime partie. La partie la plus douloureuse, celle qui la transformerait à jamais. « Tu n'es plus rien pour moi désormais. » Cette phrase résonna dans son esprit, elle lui transperça les tympans. Joan n'était plus rien, plus rien pour personne. Elle allait respecter ses vœux, elle partirait en Enfer, elle ferait cela dans les règles de l'art, se confessant pour ses pêchés, ne reniant plus ce qu'elle était : un monstre. Elle le libérerait une dernière fois avant de mieux lui planter un poignard acéré dans le cœur. Joan n'était plus rien et ce constat faisait mal, encore plus mal que les souvenirs de ce fameux soir. Elle n'avait jamais connu pire, ses jambes ne la portaient plus, elle ne réalisait plus ce qu'il se passait autour d'elle, elle n'avait plus le goût de continuer, plus la foi pour pouvoir se regarder dans un miroir. Détruite, finalement. Avec tout le cœur qu'elle avait pu mettre dans sa quête, Joan Kellers était vaincue par de simples mots. Stiles tenta pourtant d'avoir la réponse coûte que coûte, il ne voyait qu'Irving, ses pupilles n'étaient que haine et dégoût. Joan finit par lâcher son regard alors que celui-ci saisissait la poignée de la porte. Que pouvait-elle lui dire ? Qu'avait-elle le droit de faire ? Elle n'entendait plus rien, elle ne voyait plus rien, un murmure d'adieu lui parvint aux oreilles puis plus rien. Le silence, le gouffre. Joan se mit à pleurer toute s les larmes de son corps, tentant de se justifier, mais c'était trop tard. Encore une fois, elle arrivait trop tard. Elle avait détruit Stiles, elle avait brisé Irving et ne se le pardonnerait jamais.
Je ne peux pas te le dire, je ne peux pas. Je ne veux pas que tu deviennes comme moi . Je suis désolé, Stiles, je suis désolé.
Et c'est dans un silence pesant que Joan Kellers commençait à effacer son existence. Un souvenir par un souvenir. Elle abandonnait la lutte, elle allait quitter ce monde et tout s'arrangerait. Demain serait un nouveau jour, demain serait ses adieux...
THE END.
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Sujet: Re: Parce qu'il ne reste que nous ... [Stiles & Joan Kellers] Mer 12 Sep 2012 - 19:39
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Parce qu'il ne reste que nous ... [Stiles & Joan Kellers]