Aussitôt que l’aiguille du cadran de la chambre d’Aaron Thomas Middleton changea sur sept heures, un grand succès de la merveilleuse star québécoise Celine Dion lança. My Heart will go on était l’une des chansons préférées du jeune rouquin qui ne put s’empêcher de réciter les paroles sous un air mélodieux dès qu’il put ouvrir les yeux. Ainsi, habillé d’un pyjama en satin violet pâle, le jeune médecin glissa ses pieds dans ses petites pantoufles en flanelle lilas qui allait parfaitement avec la couleur de son habit de nuit. Il marcha jusqu’à la cuisine après avoir fait un arrêt à la salle de bain et fit couler le café préréglé dans sa tasse en forme de tigre qu’il avait acheté dans une boutique d’antiquité récemment, celle-ci venait d’Afrique et Aaron l’adorait. Il sirotait son nectar en regardant les nouvelles du matin et en se confectionnant des muffins à l’avoine et aux noix de pécans, une recette qu’il tenait de sa grand-mère qui était à s’en damner. Le roux adorait cuisiner et il surpassait la totalité des femmes de sa famille, ce qui comblait sa grand-mère de joie. Ainsi, Thomas versa la pâte finalement préparée dans le moule qu’il enfonça dans le four et se concentra sur le ménage de sa maison. Lorsque l’envie midi fut terminé, la maison du rouquin était totalement propre, elle brillait de tous les côtés, ce qui ravi le jeune homme, il prit ainsi le reste du temps libre avant l’arrivée de son demi-frère Payton pour faire un diner digne de ce nom, pour classer sa bibliographie de roman à l’eau de rose par ordre alphabétique. L’homme sifflait alors en passant du salon à la cuisine pour regarder la cuisson de son poulet divan aux brocolis, habillés d’un tablier rose fleuris et d’une paire de gant agencée. L’homme espérait que le diner soit près lorsqu’il verrait son frère débarquer chez lui. Aaron n’avait pas souvent de la visite, alors il tentait de faire de son mieux à chaque fois.

Tic, tac, tic, tac, l'horloge murale émettait son bruit caractéristique alors que les secondes, les minutes s'écoulaient. Chaque seconde ressemblait à s'y méprendre à la suivante. Il ne se passait plus grand chose d'intéressant dans la vie de Payton depuis deux ans. Une tasse de café en main, une copie dans l'autre, il tentait tant bien que mal de se concentrer sur le torchon et le ramassis de connerie qui s'étalait sous ses yeux. Enseigner l'analyse comportementale à des demeurés profonds, quelle veine ! Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il avait lourdement payé son geste désespéré. Tenter de mettre fin à ses jours et ne devoir son salut qu'à une stupide commode, si ça ce n'était pas la poisse alors il ne savait plus comment il s'appelait. La vie ne lui avait jamais fait de cadeau, la mort encore moins, en le rejetant de la sorte. Le rejet, à croire qu'il était condamné à vivre éternellement seul. Sa mère l'avait abandonnée en se montrant lâche, sa femme l'avait quittée, ses frères ne s'occupaient pas de lui et sa fille était plus ou moins prisonnière de son ex-femme et donc ne passait que rarement du temps avec lui. Seul encore et toujours, même au beau milieu d'une foule. Le seul qui se préoccupait encore de lui n'était autre que son « demi-frère », ils n'étaient pas du même sang et pourtant il était le seul à le soutenir. Quelle vie merdique ! D'ailleurs, en pensant à Thomas, l'ancien profiler se rappela subitement que ce dernier l'avait convié à dîner chez lui. Il jeta un œil à la pendule suspendue au dessus de sa tête. Merde, merde et merde. Cela lui était totalement sorti de la tête. Sans plus attendre, il laissa tomber la tasse de café sur le bureau, le liquide brun se répandit sur la copie. Tant pis, pas le temps de nettoyer pour le moment. D'un bond il se releva, attrapa dans l'entrée un blazer et fonça au pas de course dans la rue.

Vingt bonnes minutes plus tard, il arriva enfin dans le quartier de Thomas, en sueur. Accoutrement peu approprié, mais peu importe. Si on ne lui avait pas interdit la voiture, peut-être serait-il arrivé un peu plus frais. La respiration difficile, il se tint au porche de la demeure avant de sonner à la porte d'entrée. Un sourire se dessina sur les lèvres de Payton, il imaginait très bien le festin qu'avait dû préparer Thomas, mettant les petits plats dans les grands, il avait certainement dû briquer son logement de fond en comble, sans oublier le port de ses gants assortis à son tablier. Un drôle de personnage. Étrangement, il se sentait tout à fait normal à ses côtés. Sagement, il attendit qu'on vienne lui ouvrir.

Thomas Middleton était un homme rempli de surprise. On le reconnaissait très facilement dans les couloirs de l’hôpital pas seulement parce qu’il portait le blouson de médecin, mais surtout par sa personnalité extravagante et surtout très surprenante. Le rouquin n’entrait dans aucun des clichés qu’on connaissait. Il était sans doute l’unique homme à être Aaron sur cette planète, mais il s’en fichait. Il appréciait sa vie. Il voyait en n’importe quoi une joie de vivre immense et un bonheur conquis par la moindre petite partielle de vie qu’il semblait apercevoir. Avec Middleton, on ne s’ennuyait pas par la diversité de sa personnalité, mais évidemment, en gardant un peu trop le sourire avec le rouquin, cela amenait souvent un mal de crâne impardonnable. Lorsqu’il débuta la parlotte, Aaron ne s’arrêtait plus, il ajouta chaque détail à ses mots, ce qui rendait la situation encore plus insoutenable pour certains. Beaucoup s’adressaient à lui que pour rigoler, il faisait semblant de faire le gentil personnage, mais en réalité, c’était de l’amusement plus qu’autre chose que dégageait les mots qu’ils lui adressaient. Ce genre de comportement avait été souvent aperçu lorsqu’il était adolescent surtout auprès de ses demi-frères. Une bande de macho sans scrupule qui s’amusait à torturer le pauvre homme efféminé qui préférait cultiver les légumes et faire le ménage plutôt que de transformer le foin et passer le tracteur dans les champs.

En cette après-midi ensoleillée, Aaron avait fait un véritable buffet, un vrai repas digne d’un hôtel cinq étoile et cela, tout simplement pour son demi-frère Payton qui souhaitait passer un peu de temps avec lui. Dans toute la belle-famille que Middleton avait, Pay était son préféré, il ne parlait pas beaucoup, mais il l’avait toujours bien défendu. Il connaissait les manies du brun et avait désinfecté la totalité de sa résidence, tellement qu’on pouvait y voir des éclats de brillance un peu partout. Lorsque la sonette retentit, Aaron sursauta, il afficha un énorme sourire et alla directement ouvrir la porte. Payton avait un peu de retard, mais ce n’était pas Thomas qui lui ferait la remarque. Muni de son tablier et ses mitaines de four il leva les deux mains en l’air et hurla. « Payton ! Je suis terriblement heureux de te voir, tu sembles avoir très chaud, aller rentre, est-ce que tu veux que je serve une bonne limonade fraiche que je viens tout juste de faire, c’est totalement maison, j’ai été acheté les citrons hier soir dans un jardin qui vendent des fruits et légumes frais, un véritable bonheur, si tu veux l’adresse ! » Évidemment, à peine arrivé et Thomas lui dévoilait la totalité des détails de sa vie.

Le front luisant de sueur, Payton attendait que son demi-frère vienne lui ouvrir la porte. Pas vraiment dans ses habitudes de faire patienter durant des heures ses invités, le brun ne tarderait pas à arriver en quatrième vitesse. Comme prédit, la porte ne tarda pas à s'ouvrir laissant apparaître un Thomas exactement comme il se l'était représenté quelques instants plus tôt. Son air efféminé pouvait en amuser plus d'un, mais pas Payton. Bien que très différents l'un de l'autre, ils avaient un point commun et pas des moindres. Leur bizarrerie légendaire. Enfin bizarrerie, Payton aurait bien envie de demander à ce lui qui oserait avancer une telle chose, qu'est-ce que la normalité ? Rentrer dans un moule, appartenir à telle ou telle classe, se comporter de telle ou telle manière ? Non ça ce n'est pas vraiment être normal, c'est juste être bête et discipliné. C'est sur ces pensées presque rassurantes, que l'ancien profiler offrit son plus beau sourire au maître de maison. « Salut Thomas ! Je suis un peu en retard, j'ai couru, je ne voulais pas te faire trop attendre. Une limonade ne serait pas de refus ! », dit-il en entrant dans la demeure briquée de fond en comble de son demi-frère. Payton n'aurait eu aucun mal à manger par terre, tellement le sol était brillant. De plus une odeur de propre et de frais emplissait toute la maison. Au moins ici, le blond n'avait pas peur d'être contaminé par un germe quelconque. Délicate attention de la part de Thomas, qui connaissait sans doute mieux que quiconque ses phobies. « C'est gentil pour l'adresse du verger, mais c'est pas vraiment mon truc la cuisine, je risquerais de tout faire brûler, on va éviter ce genre de catastrophe, si tu vois ce que je veux dire. Tes gants sont superbes au passage ! » , ne put-il s'empêcher d'ajouter l'air un peu taquin. Ses réflexions envers son frère n'étaient jamais méchantes, un peu ironiques voilà tout. Avec lui, il se comportait tout à fait différemment, à des années lumière de son comportement habituel lorsqu'il pouvait se trouver en compagnie d'étrangers. Le professeur riva son regard au sol avant de demander : « Avoues tu as engagé une femme de ménage avant mon arrivée, où ce cache-t-elle ? ». Immense sourire, alors qu'il faisait mine de chercher la dite femme de ménage. Payton savait pertinemment que Thomas avait tout fait tout seul, du ménage au repas. Il tenait juste à souligner là le caractère un peu extraordinaire de la chose. Avant de passer aux nouvelles et autres futilités du genre, Payton demanda l'air de rien : « Qu'est-ce que tu nous a préparé de bon ? ».

Thomas Middleton savait comment plaire à son frère, évidemment, sa manie de propreté était un trait de sa personnalité qu’il connaissait très bien, préférant user d’un nettoyage quatre fois plus précis avant ses visites qu’à son habitude. Il ne faut pas non plus dire qu’habituellement sa maison était malpropre, loin de là. Aaron faisait constamment le ménage et chaque chose avait sa place. Le rouquin prenait toujours un grand plaisir à recevoir son demi-frère. Il savait bien qu’il n’avait aucun lien de sang avec lui, mais Payton était celui de la famille Oak qu’il préférait le plus. Il n’aimait pas le comportement des autres qui depuis toujours faisait des commentaires et des actions contre lui, ce qui le rendait terriblement triste et atteint. Aaron prenait un plaisir à inviter Pay à souper. Il ajouta donc tout sourire. « Pas grave tu sais Payton, ça me fait plaisir de te recevoir … c’est tellement rare que je peux t’avoir pour manger, que je suis ravi de pouvoir prendre mon temps pour que tout soit parfait ! Je te sers une limonade sur le champ et merci pour le compliment, ce fut un coup de cœur immédiat lorsque je les ai vu à la boutique d’élément de cuisine l’autre jour, un vrai petit délice ! J’ai craqué, pour 25,00 en plus ! » Il tapa des mains de façon enjouer et accourut rapidement jusqu’à la cuisine pour glisser un verre sur le comptoir et y verser sa limonade fraiche. Le tout accompagné d’une tranche de citron et d’un éventail qu’il ajouta au verre ainsi que quelques glaçons et Thomas le tendit à Payton. « Voilà ! » Et Aaron en but une gorgée du sien également en prenant la peine de lancer un miam très prononcé. Il ouvrit ensuite la bouche de stupéfaction face au commentaire de Oak. « Une femme de ménage, mais non Payton, je n’utiliserais jamais quelqu’un pour faire ce travail ! J’ai moi-même passé chaque racoin de la maison pour que tout soit parfaitement propre ! » Évidemment, Thomas n’avait pas compris qu’il le taquinait. Enfin, Aaron ouvrit le fourneau et brassa un peu sa soupe. « Ah, un poulet divan aux brocolis et un potage à l’abricot et au gingembre ! » Il lui fit un sourire. « J’ai également fait des pattes Alfredo pour accompagner le tout, j’espère que tu vas aimer ! »

Un large sourire s'afficha sur le visage au préalable froid de l'ancien profiler. Son frère avait vraiment le chic pour lui faire penser à autre chose qu'à son morne quotidien. Une sorte de bouffée d'air, dans son monde un peu trop étouffant. Gentil, comme à son habitude, Thomas ne lui tint absolument pas cure de son léger retard. Comme le disait si bien le roux, leurs entrevues se faisaient rares à présent, les aléas de la vie respective de chacun n'y était pas pour rien. Alors il fallait saisir la moindre occasion pour se retrouver, et ne surtout pas s'éloigner. Le blond s'amusa du fait que son frère soit un fan inconditionnel des ustensiles de cuisine en tout genre. Pas vraiment masculin tout ça, mais c'est ce qui le rendait d'autant plus attachant, du moins à ses yeux. Son intérêt pour la cuisine avait souvent été sujet à railleries dans la famille, sauf que les primates stupides qu'étaient leurs frères, étaient bien heureux de pouvoir déguster les petits plats concoctés par Thomas. Malheureusement, on ne choisit pas sa famille comme le dit si bien l'adage.
Tel un jouet monté sur ressort, Thomas parti au pas de course chercher les rafraichissements. Maitre de maison exemplaire, et aux petits soins. Payton remercia son demi-frère d'un signe de tête, tout en ajoutant un « Merci ! ». Il trempa les lèvres dans le liquide acidulé. Un véritable régal. « C'est super bon ! ». Le visage du professeur se fendit d'un énième sourire. « Du calme, je plaisantais Thomas, je sais parfaitement que le jour où une femme de ménage viendra en ces lieux, tu seras mort depuis belle lurette. Je te remercie d'avoir pris le temps de tout nettoyer de fond en comble ! ». L'annonce du programme culinaire mit en appétit Payton. Le moins que l'on puisse dire c'est que Thomas avait raté sa vocation, il savait y faire pour marier les saveurs et rendre un plat exquis. « Ça m'a l'air splendide rien qu'à t'écouter ! Quelles sont les dernières nouvelles autrement ? »

Aaron regardait son grand frère avec un petit sourire. Il savait bien que tout le monde le jugeait, mais lorsqu’il était en présence de Payton, c’était autre chose, il se sentait plutôt utile et prêt à l’amuser un peu. De tous les membres de sa famille, Thomas était celui qui comprenait le plus le problème de propreté du brun. Il avait lui-même un côté perfectionniste qui exigeait la perfection et la propreté extrême, partout où il passait. Il était même du genre à faire des taches de ménage lorsqu’il travaillait à l’hôpital, tandis que ce n’était pas ce qu’il devrait faire réellement.

Après avoir servi la boisson à son frère, celui-ci le complimenta, ce qui fit sourire l’homme qui continua à préparer son repas. Il ajouta quelques retouches à son plat et s’installa dans la cuisine pour y installer la table. Il y avait déjà un grand bouquet de fleur, mais il installa plusieurs types d’ustensiles et de vaisselles parfaitement lavés. « J’espère que tu adoras surtout, c’est un plaisir de te recevoir c’est un plaisir ! » Il se répéta, mais ne s’en rendit pas compte. Thomas continue à sourire et continua à expliquer ses nouvelles à son frère. « J’ai appelé ma mère il y a deux jours, elle dit que tout va bien au Ranch, sinon, ton père semble toujours bien se porter, elle m’a dit que Hubert, le veau que j’avais adopté l’autre fois quand je suis retourné à Helena est rendu très grand maintenant, il a même fait tomber Lexie enceinte, c’est pas super non ! Et toi ? » Dit-il avec un faible sourire. Il était en train de brasser la soupe qu’il préparait et coupa quelques lisières d’herbes fraiches pour accompagner les assiettes, celles-ci étaient surtout présentes pour la présentation.

Entendre Thomas parler de famille, de ranch et de tout ce qui pouvait concerner leur famille de près ou de loin, le renvoya presque irrémédiablement quelques années auparavant, tandis qu'il rentrait dans la maison familiale, après avoir nourri les chevaux avec son grand frère, Deshawn. Chercher sa mère en vain, ne pas la trouver de suite, puis finir par tomber sur cette vision horrifique qui s'était inscrite et gravée dans chaque recoin de son cerveau, à jamais. Mémoire d'outre-tombe, petit cadeau qu'elle lui avait adressée malgré elle. Payton n'était certainement pas censé tomber sur le cadavre de leur mère, pendue à une poutre par une vulgaire cravate, mais le destin en avait décidé autrement. Rien, vraiment rien ne leur avait mis la puce à l'oreille, elle semblait tout à fait heureuse... ce geste était resté incompréhensible durant de longues années. Un mystère obsessionnel, qu'il avait fini par résoudre en regardant des heures durant, inlassablement, des vieilles cassettes d'anniversaire. Elle n'était pas heureuse, probablement ne l'avait-elle jamais été, mais elle l'avait bien caché, du moins aux personnes non avisées qu'ils étaient tous à l'époque.

Revenant sur terre, à l'instant présent, Payton tenta de sourire à nouveau. Parler de famille, un sujet plutôt compliqué et douloureux pour lui. Saisissant au vol la perche que Thomas venait de lui tendre concernant le veau qu'il avait adopté. « Merci pour les nouvelles ! Si tout le monde va bien, c'est le principal. Tu devrais apporter Hubert ici la prochaine fois que tu leur rendras visite, ça pourrait te faire une bonne compagnie, une peu imposante et qui prend de la place, mais compagnie quand même ! », dit-il sur le ton de la plaisanterie, pour changer de sujet. « Pas grand chose à recenser pour moi. Je travaille toujours quelques heures par semaine à la fac. Mes étudiants sont de vraies plaies, je me demande pourquoi ils participent à mon cours, enfin participer, c'est un bien grand mot pour parler de personnes qui se contentent de dormir sur leur table. Enaëlle va très bien autrement et puis avec Lalie, c'est toujours aussi tendu, ce n'est pas prêt de changer je crois bien ! », il haussa légèrement les épaules, d'un geste las, tout en triturant son verre de limonade.

Aaron Thomas Middleton était réellement conquis par ce petit diner. Il ne s’attendait pas à discuter autant avec son demi-frère. Se remémorer des joyeux souvenirs l’amenait à rire et à prendre goût à la vie. Il n’avait pas toujours été heureux auprès des Oak, mais grâce à Payton, cela avait changé. Il se sentait libre et épanouie avec ses sœurs et un demi-frère aussi gentil de lui. Il n’avait aucune idée de ce qu’il avait pu vivre dans le passé, mais il savait que quoi qu’il arrivait, Thomas pouvait compter sur lui. Il souriait alors, déposant le potage sur la table et ajustant une assiette de biscottes maisons et fromages de goût. « Tu veux dire Pay ! Si Hubert vient chez moi, ça risque d’être la pagaille, je n’imagine même pas comment finira mes azalées après sa visite, moi qui vient de passer un mois à les faire fleurir ! Je ne voudrais pour rien au monde les perdre, c’est petites merveilles ! » Lança-t-il un peu perturbé, mais évidemment, il sourit aussitôt. Il prit l’une des six ustensiles qu’il avait bien placés près de l’assiette et souffla sur sa bouchée avant d’en déguster le liquide. « Je trouve ça vraiment dommage pour toi et Eulalie, vous aviez l’air si heureux au départ ! Je vous ai toujours beaucoup envié ! » Avoua le frère avec un air un peu triste. « J’ai bien hâte de revoir votre fille, elle me manque, ça fait un moment que je ne l’ai pas croisé ! »

Le festin offert par son demi-frère était digne d'un restaurant gastronomique. Discuter avec lui, rire de tout et n'importe quoi, donner et recevoir des nouvelles de soi ou bien de la famille, un moment tout ce qu'il y a de plus simple mais pourtant celui lui réchauffait le cœur. Être en compagnie d'un membre de sa famille, passer un bon moment, oublier durant quelques heures au moins ce morne quotidien fait de déprime et de tristesse. Certes les sujets abordés avec Thomas étaient toujours d'une légèreté suprême, mais peut-être était-ce tout ce dont avait besoin l'ancien analyste. De la simplicité, autant dans les actions que dans les pensées, ne pas chercher compliqué, ne pas trop penser. Peut-être trouverait-il dans cette philosophie le repos de son âme. La remarque du roux arracha une légère grimace à Payton. Il est vrai que leur histoire à Eulalie et lui avait ressemblée à une sorte de conte de fée, du moins au départ, avant qu'il ne décide de péter les plombs et de s'amuser au bout d'une corde. Son égoïsme pur et dur lui éclata une fois de plus en pleine tête. Comment avait-il pu envisager le pire alors qu'il avait le soutien de sa famille ? Même s'il ne l'avouerait certainement jamais ouvertement devant Lalie, il regrettait son geste, il regrettait de ne pas avoir plus communiqué avec elle, peut-être qu'ensemble ils auraient pu éviter ce drame qui avait bouleversé leur schéma familial. Peut-être, mais les suppositions ne l'aiderait pas à avancer. Ne lui restait plus qu'à assumer ce geste, car contrairement à sa mère la chance d'en finir avec cette vie trop pesante ne lui avait pas été accordée. Tout en terminant de déguster le succulent repas préparé avec soin par son frère, Payton répondit à ce dernier. « Si le cœur t'en dis, tu peux passer à la maison le week-end prochain, Ena' sera avec moi... elle est là un week-end sur deux, Eulalie passe pour la déposer... C'était vraiment excellent, une fois de plus tu t'es surpassé Thomas. Je me demande encore pourquoi tu n'achètes pas un restaurant, tu es tellement doué pour la cuisine. Si on allait faire un tour dehors, pour continuer cette conversation et puis ça nous digérer un peu non ? » Sans vraiment attendre de réponse de la part de Thomas, le blond se leva, débarrassa ses couverts avant de les porter dans la cuisine. Après un repas aussi fameux, il fallait bien s'aérer un peu, au risque de prendre dix kilos d'un coup.

Aaron Thomas Middleton s’occupa du service tout au long du diner. Il discutait en même temps en compagnie de son demi-frère. L’homme passait un très bon moment, il se sentait à l’aise contrairement avec la plupart des gens qui le repoussait constamment. La vie de Thomas n’était pas la plus simple, mais il adorait ce qu’il était. Il n’avait pas besoin d’être quelque d’autre, sa personnalité lui était unique et il vivait très bien avec cela. Pour rien au monde, il laisserait tomber les bricolages, les romans d’amour et la cuisine. Pourquoi était-il classé comme un étrange homme, peut-être même une fausse femme. Le rouquin espérait qu’un jour, ses ragots cesseraient et qu’il pourrait vivre totalement. Il aimerait bien rencontrer l’amour même. Le roux leva la tête vers Payton, pour sortir un peu de ses pensées. Il se mit à sourire et ramassa les assiettes pour aller directement les poser dans le lave-vaisselle. Il ajouta. « Merci beaucoup, c’est vraiment très gentil de ta part, n’hésite pas à revenir, appelle moi à l’avance, pour que j’aille le temps de tout réaliser et puis on se fait un souper ! Même avec ta fille, ce serait un plaisir pour moi ! Je l’adore ! » Il sourit et passa un jet d’eau sur les chaudrons avant de les déposer dans l’évier. Aaron écouta ensuite son demi-frère qui lui suggéra d’aller ensuite prendre un peu l’air, ce qui était une excellente idée.

TOPIC TERMINÉ & VERROUILLÉ