Sujet: Re: ❝ Birth by Sleep ❞ ♞ Evanna Jeu 23 Aoû 2012 - 18:03
Birth by sleep
Le temps est une chose sur laquelle l’homme n’a aucun contrôle. Le temps est le plus sage des antidotes, il guérit les cœurs blessés, apaisent les âmes écorchées. Le temps. Allié fidèle ou ennemi mortel. Dans plusieurs cas, les deux à la fois. Le temps aide et il tue. L’imagine parfait du Dieu tenant entre ses mains les fils de la destinée des mortels avec un sourire mauvais sur les lèvres. Le temps fils, mais ne guérit pas tout les blessures. Quelques mois plus tôt, on m’avait dit que ma douleur s’estomperait, que j’oublierais. On m’avait dit que j’étais jeune, que j’avais la vie devant moi. Ma mère avait cru bon me donner des conseils, des conseils que je n’aurais jamais osé donner à un quelconque patient parce que je savais pertinemment que ce serait faux. Les parents ont cette faculté étrange de croire trouver les mots justes, de croire parler avec expériences alors qu’ils ne font que mentir pour nous protéger. Je voyais les dommages de ses mensonges sur mes patients, comme chez ma propre personne. J’avais su, au moment même où ma mère m’avait promis que tous iraient bien que ce ne serait pas le cas. Dix-huit mois s’étaient écoulés à une vitesse fulgurante, sans que je ne m’en rende vraiment compte. Sept cent quatre-vingt-huit mille quatre cents minutes s’étaient écoulées depuis mon réveil dans cette chambre d’hôpital aux murs délavés et j’avais encore l’impression que c’était hier. Je me souvenais de la brûlure de ce tube dans ma gorge, du bruit des machines ronronnant à la tête du lit. Mais surtout, je me souvenais de ces mois de vide absolu, des mois que j’avais perdus dans le néant d’un sommeil sans fond. Un coma dont j’avais encore des séquelles aujourd’hui. Les mains qui tremblaient par moment, l’élancement dans mes côtes qui me prenaient quelques fois, cette peur presque maladive des embouteillages, cette manie à utiliser les transports en commun ou a me rendre à un endroit à pieds alors que la voiture dormait dans le stationnement.
Choc post-traumatique. Séquelles d’un traumatisme crânien. Tout cela n’était que du charabia. Des mots que l’on essayait tant bien que mal de mettre sur une douleur qui n’avait pas de nom. On prétendait connaître les maux, sans pousser plus loin. Je faisais partis de ceux qui mettaient des mots sur des cas que je ne connaissais pas. Qui posait des diagnostics sur une dysfonction que je ne connaissais que par les livres et les ouvrages. De la bouche d'autres praticiens, de professeurs qui croyaient tous savoir. La réalité était que nous ne connaissions rien à rien. Nous prétendions le contraire avec tant de brio que nous finissions par croire à nos propres mensonges. Je connaissais les pathologies de mes patients parce que j’avais lu les descriptions, les caractéristiques dans les livres, parce que c’était mon métier de savoir. Cependant, j’ignorais ce que ressentait ce patient pris de délires psychotiques ou de dépression post-traumatique. Je ne faisais que mettre des mots là où on devait en mettre. Cette constatation m’aurait fait pleurer. Je réalisais soudain à quel point j’étais inutile. Je ne pouvais les sauver tous, je ne pouvais prendre une part de leur douleur. Je n’étais pas comme ces médecins qui chassent la maladie des corps avec leurs scalpels et leurs solutés. Je ne pouvais rien faire, sinon essayer de comprendre. Les prendre par la main pour les emmenés à s’aider eux-mêmes. À bien des égards, ce n’était pas suffisant à mes yeux. Je n’étais pas le temps. Je n’avais aucun pouvoir, je ne faisais aucun miracle.
Mes yeux se fixèrent dans les orbes acier de ma patiente. Une fillette de huit ans aux boucles d’un blond si clair qu’elles semblaient blanches sous la lumière crue du bureau. Elle ressemblait à ses poupées de porcelaine qui avaient jadis décoré ma chambre et qui avaient toujours eu le don de m’effrayer. L’enfant semblait bien décidé à ne prononcer aucun mot, me fixant de ses grands yeux vides. Pour la énième fois, je relus les lignes écrites de ma main sur le dossier de la jeune fille. Une page bien vide pour le temps que j’avais passé avec elle. Hope Westerna était l’unique survivante d’un carambolage sur l’Interstate survenu plusieurs semaines plutôt. Ses parents étaient décédés sur le coup. Son frère avait péril en chemin vers l’hôpital. Miraculeusement, la fillette s’en était sortie avec que quelques pointes de sutures, un bras cassé et une commotion cérébrale minime. Ainsi qu’un refus catégorique de prononcer le moindre mot. Si sur le plan physique tout était parfait, quelque chose clochait véritablement sur le point émotionnel et je n’avais pas vraiment de mal à deviner quoi. Cette pauvre enfant n’avait plus aucun repère. Elle allait vivre avec une tante dans le Montana, loin de tous ses copains, de sa maison, peut-être même de son chien. Je n’avais jamais compris ces gens qui ne font qu’empirer les choses en brisant complètement la routine d’un enfant qui venait de perdre tous ceux qu’elle aimait. «Je sais que c’est difficile pour toi, Hope, mais tu dois m’aider à t’aider, tu comprends?» L’enfant releva les yeux vers moi une fraction de seconde avant de les reposer sur la moquette. Que devais-je en comprendre? Je pinçai les lèvres, jetant un énième coup d’œil à l’horloge. Cela faisait près d’une heure maintenant que j’essayais de lui expliquer que si elle voulait que je l’aide, elle devait prendre la main que je lui tendais, sans grand résultat. «Est-ce que je vais oublier?» Je sursautai légèrement au son gracile de sa voix. C’était la première fois que je l’entendais en près d’un mois. Le visage tordu de Hope était levé vers moi et visiblement, elle retenait tant bien que mal ses larmes. «Tante Rachel dit que je vais oublier. Que le temps, ça fait ça.» J’eu un pâle sourire et secouai la tête sous l’œil attentif de la fillette qui semblait me défier de dire le contraire. «Non, tu n’oublieras pas. Tu n’oublieras sans doute jamais, mais ça ira mieux. Pas aujourd’hui, ni demain, mais un jour, tu te réveilleras et tu te rendras compte que tu n’es plus aussi triste.» Restait à savoir si je parlais plus pour elle ou pour moi.
Officiellement, Hope aurait dû être ma dernière patiente de la journée et j’avais plus qu’envie de quitter l’hôpital pour m’enfermer dans ma chambre, sourde aux supplications de Chase qui me prierait de lui tenir compagnie. Cependant, je n’en eus pas le loisir. La sonnerie du téléphone se fit entendre. On m’envoyait un jeune interne pour un suivi après la mort d’un patient. Chose relativement courante et généralement rapide. Il me suffisait de savoir si le gamin prenait bien la chose ou pas et le traiter en conséquence. Je m’en serais bien passé quand même. Le soleil disparaissait à l’horizon, la fatigue de la journée prenait sa place sur mes épaules et je n’avais rien mangé depuis des heures. Plissant le nez, un peu dépité, je fouillai dans les dossiers du personnel, cherchant le dossier de ce Phoenix Demers. Un dossier que je posai sur le coin de mon bureau sans l’ouvrir. C’était le genre de chose que je ne faisais pas. Lire les dossiers, apprendre du patient par les autres et non par soi. Je préférais me faire une idée propre du jeune homme en question. Trois petits coups se firent entendre et la porte bascula sur ses gongs, dévoilant un jeune homme qui ne semblait pas vraiment à l’aise d’être là. J’allais lui serrai la main, un sourire qui se voulait avenant sur les lèvres. «Bonsoir, vous devez être Monsieur Demers. Je suis le docteur Dunham. Entrez.» Ce n’était qu’un énoncé de faits plus qu’agaçant. Sans doute savait-il mon nom, la plaque à ma porte l’annonçait et il était évident qu’il était ce Monsieur Demers puisque c’est le seul patient que j’attendais avant le lendemain. Je m’effaçai néanmoins pour le laisser entrer, l’invitant à prendre place sur l’un des fauteuils avant d’en faire autrement «J’imagine que vous savez pourquoi vous êtes là, n’est-ce pas?» Du mois, je l’espérais, sinon, j’avais bien du chemin à faire.
AGE : 27 NOMBRE DE CONTACTS : 173 ANNIVERSAIRE : 21/04/1997 EN VILLE DEPUIS LE : 10/08/2012 AVATAR : Matt Bomer
Sujet: Re: ❝ Birth by Sleep ❞ ♞ Evanna Mar 28 Aoû 2012 - 18:37
BIRTH BY SLEEP
evanna & phoenix
Mes yeux furent attirés comme de vulgaires aimants sur le dossier, ce dossier avec mon nom, ces simples petits bouts de papiers qui contiennent une vie entière : ma vie. L'a-t-elle lu ? On va très vite le savoir, je me connais assez bien en psy vu que j'ai passé deux ans dans un hôpital relié comme un drogué à une perfusion pour m'hydrater alors que je pouvais très bien boire tout seul. Les psychiatres et psychologues sont les seuls à s'être un minimum préoccupé de moi me direz vous. Ils sont payés pour, mais je préfère penser qu'il s'intéresse vraiment à moi. Enfin plus maintenant, mais c'était avant tout ça. Je fixais la psy' que je croisais quelques fois par hasard dans le couloir, je ne lui avais jamais vraiment parlé. Elle s'approcha pour me tendre la main que je serrai timidement. « Bonsoir, vous devez être Monsieur Demers. Je suis le docteur Dunham. Entrez.», j'hochais la tête, mon premier réflexe était de la dévisager. Son nez, sa bouche, ses yeux, ses cheveux, tous ces éléments s'inscrivaient petit à petit dans ma mémoire. Une assez jeune femme séduisante aux premiers airs charmants. «J'imagine que vous savez pourquoi vous êtes là, n'est-ce pas?» Je penchais la tête ne répondant pas directement trop occupé à m'informer sur son lei de travail. Son bureau, ses statuettes, sa décoration, peut-être des photos de famille. C'était une manie chez moi, avoir le regard indiscret à toujours vouloir tout savoir, une curiosité surdimensionné sans aucun doute. Elle me désigna du doigt un fauteuil où je devais m'asseoir, ce que je fis docilement et lentement. Chaque réponse devait être calculé, je devais faire attention à ce que je disais sous peine de réveiller des soupçons sur un problème extérieur. J'ai l'air ailleurs, c'est déjà un mauvais point. Attiser sa curiosité serait une fatale erreur, je ne veux pas qu'elle découvre mon dossier et encore moins qu'elle en parle à mon tuteur.
Je ne pense pas que ma maladie peut me fermer des portes, mais la prudence sera toujours la meilleure arme. « Oui, bien sûr... mon tuteur veux appliquer le protocole et etc... », ma réponse était sûre, mon regard ne la fuyait pas et j'essayais de contrôler les battements de mon coeur pour ne pas paraître mal à l'aise. Je dépensais une énergie folle à me tenir correctement, à ne pas déplacer mon regard, à ne pas baisser les yeux. « Il semble inquiet pour moi et ça m'inquiète pour lui... », voilà, retourne bien le sujet de conversation, change le sujet. Je devais être clair, lucide et surtout ne pas craquer. Moins elle posera de question, mieux ça sera : « Évidemment que je suis affecté par la mort de ce jeune garçon, qui ne le serait ? Mais, il faut être idiot pour faire une carrière en médecine et penser que ça n'arrivera qu'aux autres. Les médecins ont fait tout ce qu'il fallait faire, les parents étaient là pour le soutenir... donc s'il est parti c'est parce qu'il le devait. La vie doit être donné pour être reprise après tout... ». Je répondais sereinement, j'essayais de calmer les tremblements de ma main que je tentais de cacher pour ne pas me trahir, ma gorge était sèche et mon inhalateur étais dans mon sac qui était resté dans les vestiaires. Je devais me contrôler pour ne pas faire de crise, j'avais l'impression de le mentir , mais je n'avais guère envie qu'elle fasse remonter des démons déjà enterrés. Je posais mon regard sur les fenêtres, il allait bientôt faire nuit. Mon regard ne pus s'empêcher de revenir sur mon dossier, je n'avais pas vu la réaction du psy. Je devais me reprendre, j'étais trop extérieur et trop impersonnel de part mon comportement. Sans doute aussi trop paranoïaque, si ça se trouve elle l'a lu et elle ne va rien dire dessus. De plus ma réponse était si confiante qu'on aurait dit une phrase bateau ou une phrase longuement réfléchi pour éviter toutes questions. Bon, reprends toi Phoenix ! Ton comportement est trop évasif. « Vous travaillez ici depuis longtemps ? Enfin je veux dire, ici à Détroit. » Changement de sujet éclair, c'était une manoeuvre risquée, soit elle allait comprendre que je veux éviter le sujet soit elle va tomber dedans, ça me permettra dans ce cas de savoir à qui j'ai affaire.